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[A l'écoute des gestions] Cap sur la Route de la Soie

« Si vous ne changez pas de direction, vous pourriez bien vous retrouvez à l’endroit vers lequel vous vous dirigiez » Lao Tseu

L’année de la Chèvre qui vient de débuter sera vraisemblablement marquée par une initiative majeure de la part de la Chine pour établir une nouvelle « Route de la Soie », par l’adoption d’un nouveau plan à cinq ans pour stimuler le développement économique et social du pays et par l’accélération du rythme des réformes du système financier.

Par Ross Teverson et Charles Sunnucks, membres de l’équipe Marchés Emergents chez Jupiter AM

La route de la Soie, ce légendaire réseau de routes commerciales qui a apporté la prospérité dans la Chine de jadis, semble être une source d’inspiration pour les dirigeants chinois du 21ème siècle au moment où ils cherchent comment remédier au ralentissement économique du pays. Lors d’un voyage au Kazakhstan en 2013, le président chinois Xi Jinping avait annoncé sa vision d’une « Ceinture Economique des Routes de la Soie », qui avait été ensuite confirmée par des investissements financiers massifs de la part des nouvelles entités qu’étaient  la Banque Asiatique d’Investissement pour les Infrastructures (l’AIIB pour l’Asian Infrastructure Investment Bank) et le Fonds de la Route de la Soie. Cette nouvelle « Route de la Soie » était citée dans la politique du troisième plenum du Parti Communiste, l’entérinant ainsi en tant que stratégie nationale officielle.

 

Bâtir l’influence de la Chine dans la zone

L’objectif principal de ce projet de nouvelle Route de la Soie est de « briser le goulet d'étranglement en matière de connectivité » - un plan ambitieux pour améliorer la communication et les échanges commerciaux entre la Chine et ses voisins via des infrastructures améliorées, une meilleure coopération entre les institutions et des échanges culturels favorisés.

Alors que débute l’année de la Chèvre, le concept de « Nouvelle Route de la Soie » devrait jouer un rôle déterminant si l’on en croit les détails divulgués sur la manière dont le nouveau comité va utiliser les larges réserves de changes du pays. Selon toute vraisemblance, la Chine va jouer le rôle de « one-stop-shop », proposant le financement, l’expertise et les équipements pour les projets de la zone. Cela devrait à la fois aider à promouvoir l’influence de la Chine dans la région et favoriser ses intérêts commerciaux.

Même si les entreprises qui remporteront les plus gros contrats pour bâtir la Nouvelle Route de la Soie seront très probablement les grandes entreprises de construction et de construction ferroviaire détenues par l’Etat, nous pensons que cette initiative pourrait être un tremplin pour l’étranger pour nombreuses entreprises plus petites, mais compétitives et possédant la technologie et l’expérience nécessaires. Par exemple, Hollysys, entreprise qui produit des systèmes de contrôle et d’automatisation pour des clients dans l’industrie, les chemins de fer ou la production énergétique, profite depuis longtemps d’un marché domestique florissant mettant l’accent sur la recherche et le développement. Cependant cette entreprise, bien qu’elle ait obtenu les certificats lui permettant de vendre à l’étranger, ne jouit pas encore réellement d’une progression de ses ventes en dehors de la Grande Chine. Ce sont les entreprises comme Hollysys qui devraient le plus bénéficier de la volonté de la Chine de promouvoir ses marques domestiques à l’étranger.

 

Le temps est venu pour un nouveau plan à 5 ans

Les plans à 5 ans chinois sont un ensemble d’initiatives sociales et économiques ; un programme commencé par Mao au début des années 50 pour amorcer une socialisation et une industrialisation intensive.

Schématiquement on peut dire que ces réformes ont portés dans les années 80 sur le passage de la production collective à un « système de responsabilité des ménages », dans les années 90 sur la promotion de la privatisation et sur la réduction des barrières commerciales dans les années 2000. Le douzième plan à cinq ans (2011-2015) représentait encore un changement de direction puisque l’accent avait été mis sur un rééquilibrage de l’économie pour aller de l’investissement à la consommation.

 

Rééquilibrer l’économie

Le treizième plan à 5 ans à venir devrait poursuivre le rééquilibrage de l’économie, tout en en allant plus loin dans les réformes des sociétés d’Etat chinoises (SOE) et des marchés de capitaux. L’objectif de croissance moyenne du PIB de ce plan devrait se situer aux alentours de 6,5% pour les cinq prochaines années - suffisamment élevé pour soutenir le développement, mais suffisamment bas pour permettre aux politiciens de mettre en place des réformes. Cet objectif de 6,5% peut sembler être une décélération significative, comparé à la croissance de 7,4% atteinte en 2014, chiffre le plus bas jamais atteint en 24 ans, mais l’économie chinoise est multi-facettes et continuera, selon nous, à offrir des opportunités d’investissement en actions prometteuses.

Ce rééquilibrage de l’économie devrait faire apparaître des opportunités d’investissement, notamment parmi les nombreuses entreprises qui cherchent à se positionner pour tirer profit de la croissance de la consommation chinoise. Cependant, elles ne sont selon nous que quelques-unes à pouvoir s’enorgueillir d’une véritable marque nationale, d’un réel pricing power et proposant le produit adéquat pour profiter d’un changement structurel. Par exemple le site de e-commerce JD.com, qui a massivement investi dans un réseau logistique national, est un des plus grands sites de ventes directes en ligne et utilise aujourd’hui son infrastructure et son volume de clients pour développer une plateforme de ventes C2C. A court/moyen terme, la société devrait être à même de bénéficier à la fois de la croissance de la consommation en Chine et de la transformation du commerce en ligne.

 

Promouvoir les réformes financières

Par le passé, les ménages Chinois percevaient des rendements assez faibles sur leur épargne du fait du plafonnement des taux de dépôts bancaires (qui étaient souvent négatifs en termes réels, une fois l’inflation prise en compte) et du manque d’investissements alternatifs dû aux restrictions sur les transactions en devises étrangères. De plus jusqu’à la fin des années 90, les Chinois étaient rarement propriétaires de leur logement. Grâce à la « subvention » représentée par les faibles taux de dépôts accordés aux ménages, les entreprises emprunteuses, le plus souvent détenues par l’Etat, payaient des taux d’intérêts souvent inférieurs à la croissance du PIB nominal. Du fait de la répression financière en Chine, beaucoup de capitaux sont allés dans des institutions qui n’étaient pas régulées (shadow financing) entraînant vraisemblablement une mauvaise allocation du capital. Le contrôle des changes a, quant à lui, entravé la volonté d’installer l’utilisation du renminbi dans les transactions. Néanmoins à l’heure actuelle, la Chine promeut les réformes financières comme étant une des pierres angulaires du développement du pays.

Bien que les réformes financières soient un processus relativement graduel, les changements semblent s’accélérer. Par exemple, rien que sur les 6 derniers moins, la Chine a permis à tous les étrangers d’acheter les actions à des entreprises chinoises, qui jusqu’à présent n’étaient accessibles qu’aux citoyens de la Chine intérieure et à quelques institutions financières étrangères dûment sélectionnées ; les banques se sont vue attribuer une plus grande latitude pour établir les taux d’intérêts auxquels elles rémunèrent les dépôts et parallèlement, le plafond du taux garanti qui peut être offert sur certains produits d’assurances a été relevé.

Dans les 12 prochains mois, la banque centrale devrait profiter des mesures mises en place pour stimuler l’économie et faire progresser la libéralisation financière. Les autorités chinoises vont probablement également entreprendre des réformes financières qui devraient aider à combattre le surinvestissement dans les industries lourdes et rediriger ces capitaux vers des secteurs plus dynamiques de l’économie, notamment dans les services. De plus, même s’il y a naturellement un risque de sorties massives de capitaux du pays, plus de place devrait être faite pour les capitaux étrangers  dans l’économie chinoise. Les réformes financières devraient aussi provoquer un écart plus important des rentabilités parmi les banques chinoises, et par conséquent nous devrions assister à un élargissement de la fourchette étroite dans laquelle elles se négocient toutes actuellement. Par exemple, la réforme des marchés de capitaux va vraisemblablement avoir un impact négatif sur la majeure partie de l’activité de prêts des banques, mais pour Bank of China, actuellement sous valorisée par rapport à ses pairs du fait de son exposition aux prêts étrangers, la réforme des marché de capitaux et la promotion du renminbi en tant que devise internationale devraient lui permettre d’être réévaluée dans la mesure où les prêts à l’étranger en renminbi sont en passe de devenir un atout plutôt qu’une faiblesse.

Du point de vue de l’investissement, alors que l’année 2015 promet d’apporter de nouveaux défis à de nombreux secteurs d’activités, nous pensons qu’il y a encore beaucoup de très belles opportunités d’entreprises tirant profit de changements structurels, industriels ou spécifiques à l’entreprise. Selon toute vraisemblance, nous devrions assister à un découplage des valorisations entres les entreprises capables de saisir ces changements comme des opportunités, et celles qui en seront incapables.

www.jupiteram.com

 

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