Paul-Henri de La Porte du Theil, président de l’AFG et Pierre Bollon, délégué général, dressent le bilan 2014 de l’industrie française de la gestion et présentent ses grands chantiers 2015.
I – Marché Français de la gestion 2014 : dynamisme confirmé malgré la faiblesse chronique de l’épargne longue en actions
En France :
- les encours globaux sous gestion (mandats et OPC) ont progressé de 3,5% en 2014, franchissant le cap des 3 200 Mds€.
- l’encours des fonds de droit français a cru à un rythme de +2,7% (environ +6% hors fonds monétaires).
Ensemble :
- les mandats et les fonds étrangers gérés en France ont augmenté de +4,2%.
Dans un contexte de baisse des taux, les produits obligataires classiques ont connu des performances et des souscriptions nettes record dues en partie à un report de la demande en provenance des fonds monétaires. De même, les clients de la gestion française ont bénéficié d’effets de marché globalement positifs qui ont soutenu la valorisation des fonds actions et orientés actions, cependant toujours en décollecte même si c’est à un rythme plus faible. En 2014, on a observé :
- une stabilisation à un très faible niveau historique des placements financiers des ménages,
- l’accroissement des souscriptions nettes des produits assurance-vie compensant la plus faible appétence pour l’épargne réglementée, à l’exception du PEL.
- en nette décollecte, les valeurs mobilières, compris les titres des OPC.
Dans cet environnement, en s’appuyant notamment sur une internationalisation croissante de leurs clientèles, certaines sociétés de gestion ont bien tiré leur épingle du jeu et réalisé une bonne collecte en particulier sur des fonds long terme.
Le nombre de sociétés de gestion de portefeuille (SGP), avec 39 créations brutes en 2014, a continué de croître et atteindrait désormais 638 unités. Cette croissance est due en grande partie à la création de sociétés de gestion en réponse à l’entrée en vigueur de la directive AIFM et concerne majoritairement des SGP immobilières, de titrisation, forestières et de capital investissement.
II – Plusieurs dossiers clefs nationaux et européens mobiliseront l’AFG en 2015
1/ Relance du projet de TTF « européenne » à 11 : un danger mortel
Relancé en ce début d’année dans une version proche de celle que la Commission européenne avait proposée en février 2013, le projet de taxe dite européenne sur les transactions financières aurait des conséquences dévastatrices pour l’industrie française de la gestion, ses clients et notre Place. Visant l’épargne et non la spéculation, limitée à 11 pays, elle ne remplirait pas ses objectifs budgétaires, détruirait des emplois, ferait fuir la clientèle étrangère et contraindrait à la délocalisation.
L’AFG souligne en particulier que :
- la taxation éventuelle des souscriptions ou des rachats d’OPC, qui serait contraire au principe selon lequel les opérations sur le marché primaire doivent être exonérées créerait au détriment des fonds de droit français une iniquité concurrentielle qui conduirait à terme rapproché à leur quasi disparition ;
- la taxation éventuelle des transactions sur obligations et titres de créances négociables réduirait drastiquement le rendement des fonds obligataires et monétaires, les rendant non compétitifs.
La sagesse commande donc que les travaux européens en cours permettent de converger vers un texte proche des taxes française ou britannique.
2/ Financement de l’économie : le rôle clef de la gestion française
Les gestions françaises jouent un rôle essentiel dans le financement de l’économie, détenant dans leurs portefeuilles près de 1400 Mds€ en titres d’entreprises et près de 750 Mds€ en titres publics. Une étude récente du service Economie - Recherche de l’AFG fait ressortir deux biais d’investissement positifs qui contribuent fortement au financement stable des émetteurs français :
- Un « biais domestique d’allocation » : près de la moitié des encours actions et environ 40 % du portefeuille obligataire sont au bénéfice d’émetteurs français. Il en résulte des taux de détention très significatifs (de 20 à 40%) du stock des titres émis en France.
- Un « biais domestique de maturité longue » : il favorise le financement stable des émetteurs obligataires français.
Cet apport de l’industrie de la gestion au financement de l’économie s’exerce aussi de façon croissante sur des classes d’actifs non cotés : capital investissement via les FCPR/FCPI/FIP, immobilier via les OPCI, et, de façon plus innovante, infrastructures, ISR, obligations « vertes », titrisation, dette privée… Les commissions et groupes de travail de l’AFG s’attachent à assurer un développement encadré de ces nouvelles façons de financer l’économie.
3/ Fiscalité de l'épargne longue/en actions : un combat prioritaire
Les lois de finances de fin 2014 n'ont porté aucune avancée en matière de placements longs/en actions, alors même que notre économie doit se doter des leviers permettant de mobiliser l'épargne des particuliers au service de la croissance et de l'emploi. Il faut en effet que le financement des entreprises puisse continuer à être pleinement assuré au cours des prochaines années malgré la diminution des réserves des caisses de retraites impactées par l'évolution démographique et les contraintes accrues pesant sur les banques et les sociétés d'assurance en matière de liquidité et de solvabilité.
C'est pourquoi l'AFG accentuera encore au cours des prochains mois son action pour que notre fiscalité devienne véritablement incitatrice aux placements finançant l'économie. Trois axes doivent être à notre sens privilégiés :
- les placements en titres d'entreprises doivent bénéficier de la "clause de l'épargne la plus favorisée", au contraire de ce qui est aujourd'hui le cas ;
- les initiatives en faveur du capital investissement doivent être pérennisées et les règles s'appliquant aux FCPR/FCPI et FIP simplifiées ;
- le PERP devrait être élargi au-delà de son option assurancielle, comme l'AFG l'a déjà proposé à plusieurs reprises.
4/ Epargne salariale : des mesures bienvenues dans la loi Macron
L’Assemblée Nationale a adopté plusieurs propositions du rapport du Copiesas, auquel a participé activement l’AFG, avec le triple objectif d’élargir à tous l’épargne salariale, de simplifier les dispositifs et de davantage orienter l’épargne vers les entreprises. Parmi la dizaine de mesures adoptées, l’AFG salue notamment la baisse du forfait social de 20 à 8% pour les petites entreprises, le fléchage par défaut vers la gestion pilotée pour les PERCO, la plus grande flexibilité d’alimentation des PERCO par l’employeur et le rapprochement des modalités de versement de la participation et de l’intéressement. La baisse du forfait social de 20 à 16% pour les PERCO investis pour partie en titres de PME va également dans le bon sens. Ces mesures, si elles sont définitivement adoptées par le parlement, renforceront l’épargne salariale en réaffirmant son rôle de financement à long terme de l’économie et en rendant encore plus efficace la gestion de l’épargne des salariés.
5/ Règlementation européenne : passer du punitif à l’incitatif ?
La réglementation européenne de la sphère financière s’est considérablement développée au cours des dix dernières années. Ces textes étaient pour une bonne part justifiés par la nécessité de supprimer des espaces de « non droit », par l’obligation de renforcer la solidité globale du système et par le désir de réduire les obstacles à l’édification du marché unique. Force est cependant de constater que l’avalanche des textes qui ont concerné l’industrie de la gestion n’a eu pour effet global ni de réduire les iniquités concurrentielles, ni de diminuer les coûts payés par les épargnants/ investisseurs, ni de restaurer la confiance.
Le projet de règlement européen pour les fonds monétaires proposé fin 2013 par la Commission n’était à cet égard pas satisfaisant car il imposait à l’ensemble de ceux-ci, y compris ceux à valeur liquidative variable, des contraintes supplémentaires inutiles et mal calibrées qui auraient pour effet, si elles étaient adoptées, de réduire leur attractivité pour les investisseurs et leur apport au financement des entreprises européennes. Ce texte est actuellement en cours d’examen par le Parlement et le conseil européens.
La directive et le règlement dits « MIF 2 » sont désormais adoptés. L’AFG se mobilise donc actuellement pour que les textes d’application qu’ils prévoient ne mettent en danger ni le financement de l’analyse financière, notamment celle des PME/ETI, ni les choix d’investissement et la qualité du conseil dont bénéficient les épargnants.
Enfin, l’AFG répondra à la consultation que lancera dans quelques jours la Commission européenne sur les mesures que l’Europe devra mettre en œuvre au cours des prochaines années pour développer une véritable « Union des marchés des capitaux ». Elle soulignera, dans ce cadre, l’impératif de favoriser la bonne allocation de l’épargne et le financement de l’économie réelle.
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