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58% du temps passé sur internet au bureau par les salariés est du surf personnel

Extrait d’une analyse de Blandine Allix, Avocat Associé, Flichy Grangé Avocats Pôle Sécurité & Santé au travail

Plus précisément, en 2013, les salariés ont passé 63 minutes par jour sur internet à titre privé, temps supérieur à celui consacré l’année précédente, selon l’étude Olfeo 2014. Ce constat pourrait amener des employeurs qui ne se sont pas encore réellement préoccupés de la question, à prendre certaines résolutions pour 2015 visant à limiter l’usage, au bureau, d’internet à des fins personnelles.

Rappelons que si l’employeur dispose d’arguments sérieux pour interdire totalement la connexion internet à des fins personnelles, notamment en raison des conséquences qu’un tel usage peut avoir sur la productivité du salarié et la sécurité du réseau informatique, la CNIL et la jurisprudence considèrent qu’interdire totalement l’utilisation d’internet à des fins personnelles n’est pas réaliste et est en outre contraire à l’article L. 1121- 1 du Code du travail (« nul ne peut porter atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ») et à l’article 9 du Code civil (« Chacun a droit au respect de la vie privée »), le salarié ayant droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée. Aussi, sauf cas particuliers, la connexion internet à des fins personnelles doit être tolérée sous réserve qu’elle soit raisonnable, qu’elle ne mette pas en cause la sécurité et l’efficacité du réseau informatique et qu’elle ne soit pas mise en œuvre pour commettre des actes illégaux ou contraires aux bonnes mœurs.

Les exemples jurisprudentiels rendus en matière de connexions abusives soulignent que sont pris en compte par les juges la fréquence de la connexion, sa durée, son impact sur le travail fourni et le fonctionnement de l’entreprise ainsi que le moment de la connexion. Ont donc été jugées abusives 10 000 connexions en 18 jours pendant le temps de travail contrairement à une connexion sur des sites pendant 1 heure par semaine. L’abus est également la limite à la liberté d’expression du salarié sur les réseaux sociaux, lequel est constitué lorsque les propos tenus par le salarié sur son employeur comportent des « termes injurieux, diffamatoires ou excessifs ». Diffamer est imputer un fait précis susceptible d’être daté et circonstancié et qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération tandis qu’injurier est faire état d’une « expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait ». Si les propos tenus par le salarié sur sa page Facebook ne sont ni injurieux ni diffamatoires, ils pourront le cas échéant être qualifiés d’excessifs. Comme pour les propos tenus par un salarié en dehors des réseaux sociaux, les juges prennent en compte, pour apprécier l’abus, le contexte dans lequel les propos ont été tenus ainsi que la position du salarié dans l’entreprise. De même, ils examinent si le manageur ou l’entreprise sont, à la lecture des propos, facilement identifiables. Mais même si l’abus est caractérisé, il est nécessaire, pour qu’il puisse être sanctionné légitimement par l’employeur par le biais d’une sanction disciplinaire, qu’il n’ait pas un caractère privé. A défaut, la sanction sera invalidée par le juge.

Aussi, les juges se sont attachés à déterminer si le « mur Facebook » devait ou non être considéré comme étant un espace présumé public ou privé. L’intérêt de cette présomption est le suivant :

- si le « mur » est présumé privé, c’est l’employeur qui devra démontrer que le paramétrage du compte était tel que les correspondances ne peuvent être qualifiées de privées ;
- si le « mur » est présumé public, c’est le salarié qui devra démontrer qu’il avait pris les précautions nécessaires pour restreindre l’accès à sa page Facebook à un nombre limité d’ « amis ».

Ainsi, selon que le « mur » est présumé public ou privé, la charge de la preuve pèsera soit sur le salarié, soit sur l’employeur, et de cette preuve dépendra la décision du juge sur le bien-fondé de la sanction. A ce jour, seules des décisions de juges du fond ont été rendues. Ces décisions sont variables puisque des cours d’appel ont jugé que le mur était présumé public contrairement à d’autres qui ont jugé qu’il était présumé privé. Si un arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation statuant en matière de délit de presse semble considérer que les conversations sur les réseaux sociaux ont en principe un caractère public, il convient d’attendre la position de la chambre sociale qui devrait rendre cette année un arrêt sur cette question.

Dans tous les cas, la meilleure protection pour les salariés reste la prudence. Les exemples jurisprudentiels soulignent que ce petit rappel est loin d’être inutile, les salariés ayant un sentiment de liberté dans l’utilisation des nouvelles technologies tel qu’ils ont tendance à oublier qu’internet peut vite se retourner contre eux.

Plus d’informations : http://www.flichy.com

 

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