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[Tribune Libre] L’actionnaire-dirigeant doit agir en amont

Par Marie-Laure Tuffal-Quidet - Membre de la CNCIF - Fondatrice ICE, conseil en investissements financiers -Membre de l’Association pour le retournement des entreprises (ARE)


La réforme sur les procédures collectives passe la main aux créanciers... à moins d’anticiper les difficultés financières et de négocier très tôt. Explication

La réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, applicable depuis le 1er juillet, interdit à l’actionnaire-dirigeant toute fuite en avant. S’il veut éviter, en cas de difficultés financières avérées de sa société, qu’un créancier ou un tiers en prenne le contrôle, l’actionnaire-dirigeant doit agir en amont,  trouver rapidement un accord amiable avec les créanciers et, éventuellement, les autres partenaires de sa société. Le but recherché par le législateur est de préserver l’intérêt collectif à travers la pérennité de l’entreprise. Cet objectif justifierait jusqu’à la perte de contrôle par l’actionnaire s’il n’est pas en mesure de reconstituer les fonds propres de sa société.


1/ Le pouvoir des créanciers

Jusqu’à présent, le dirigeant avait, dans le cadre d’une procédure collective, le monopole de présentation d’un plan de continuation de l’activité. Pour préserver la valeur au profit de tous les partenaires, et non plus du seul actionnaire, le législateur, sous certaines conditions, permet dorénavant aux créanciers  de proposer des plans concurrents.
Avec un changement de taille : le principe de sauvegarde de l’entreprise peut désormais porter une atteinte aux intérêts des actionnaires, en modifiant les conditions de vote en cas d’une nécessaire augmentation du capital. La réforme tient compte notamment d’une répartition de la valeur de l’entreprise par priorité entre ses créanciers et, pour le solde, ses actionnaires. Elle introduit la notion anglo-saxonne de propriété économique, plus proche de notre concept de possession.
En clair, la nouvelle ordonnance ouvre la possibilité de faire passer le pouvoir dans les mains des créanciers en cas de difficultés de l’entreprise, en passant outre l’intérêt de l’actionnaire-dirigeant. S’il n’est pas en mesure de réinjecter les capitaux nécessaires, il pourrait désormais perdre le contrôle de sa société.
Le mécanisme est simple et rapide : les créanciers réunis en comité peuvent adopter un plan de continuation concurrent de celui présenté par le dirigeant. Ce plan peut prévoir la conversion de leurs créances en capital, voir même l’ouverture du capital, sous condition,  à un tiers. Le dispositif adopté par les créanciers devrait permettre d’assurer la pérennité de l’exploitation. Le tribunal pourra alors, et uniquement en cas de redressement judiciaire, désigner un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de voter à la place des actionnaires récalcitrants.


2/ L’importance des négociations confidentielles

Afin d’éviter une telle extrémité, le dirigeant doit, plus encore qu’hier, entrer, en amont des difficultés, dans des négociations confidentielles dans le cadre de procédures amiables. Cette anticipation permettra d’éviter l’érosion des postes d’exploitation et le risque d’exigibilité des prêts. C’est dans cet esprit que le législateur souhaite limiter les coûts de restructuration à supporter par l’entreprise.
Il renforce également la protection de tout nouveau financement consenti pendant la conciliation, dont le compte-courant d’associé. Pour autant, une brèche est ouverte dans la confidentialité de ces mesures amiables puisque le commissaire aux comptes doit être informé du mandat ad hoc, ce qui entraîne un risque de déclenchement de la procédure d’alerte. Le législateur, toujours dans le même esprit de préservation de la valeur, autorise enfin, dans ce contexte amiable, la cession de toute ou partie de l’entreprise, voire la préparation de sa reprise partielle par l’actionnaire-dirigeant dans le cadre d’une sauvegarde ultérieure.
À défaut d’accord dans le cadre de procédures amiables, l’actionnaire-dirigeant n’a pas d’autre choix que de demander l’ouverture d’une procédure collective. La plus intéressante et la plus rapide est la procédure de sauvegarde accélérée qui ne peut être que la continuité d’une conciliation. L’actionnaire-dirigeant peut alors imposer son plan à la majorité des deux tiers des créanciers réunis en comité. Le législateur l’autorise ainsi, dans l’intérêt général, à passer outre les intérêts divergents d’une minorité d’entre eux. Avec cette réforme, le législateur incite l’actionnaire dirigeant à être plus que jamais sur le qui-vive. Il doit, dès les prémices des difficultés de sa société, inviter ses partenaires au banquet des négociations.

http://www.are.fr/

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