Pour l’équipe de gestion de Rothschild & Cie Gestion, la problématique de la rentabilité des classes d’actifs est aujourd’hui primordiale. L’environnement de taux extrêmement bas en Europe creuse sensiblement l’écart de rentabilité entre les actions et les classes d’actifs obligataires, un phénomène qui appelle une lecture nouvelle du rendement ajusté au risque.
Didier Bouvignies, Co-Responsable de la Gestion, estime qu’« avec la chute continue des taux de rendement des emprunts d’Etat et du crédit corporate, les actions européennes représentent la classe d’actifs la plus rentable au monde ». Après avoir été longtemps positif sur les obligations des pays périphériques, il considère « qu’avec des rendements en net repli, entre 2,6 et 3,3%, le risque n’est quasiment plus rémunéré sur le 10 ans espagnol, italien ou portugais. En revanche, les actions de la zone euro affichent une rentabilité aux bénéfices attendus en 2014 de l’ordre de 7%. Jamais l’écart de rentabilité aux bénéfices des actions européennes avec les obligations allemandes n’a été aussi élevée depuis cinquante ans ».
Les craintes d’un scénario déflationniste en zone euro sont-elles excessives ?
La conjonction de perspectives macroéconomiques et d’indicateurs de marché en voie d’amélioration justifient l’attrait de la prime de risque des actions européennes. Après une double récession en 2009 et 2011 en zone euro, l’environnement économique a retrouvé une orientation favorable. « Depuis près d’un an, l’indice PMI composite de l’union monétaire est en territoire d’expansion, tandis que les balances courantes des pays dits périphériques se sont considérablement redressées, renouant avec l’excédent. Celui-ci atteint d’ailleurs un niveau record (400 Mds€) à l’échelle de la zone euro » constate-t-il. « La perception des marchés est trop pessimiste, elle n’intègre pas encore le rebond de ces indicateurs d’activité ».
Quant à la problématique de la déflation en Europe, Philippe Chaumel, Co-Responsable de la Gestion, juge le risque exagéré : « Il est vrai que l’inflation semble actuellement basse, mais on ne peut pas parler de scénario déflationniste. On peut raisonnablement penser que la pression sur les prix va se détendre dans les mois à venir avec l’amélioration des indices d’activité. Au centre des débats, le niveau actuel de l’euro n’est pas surévalué. La monnaie unique s’est légèrement dépréciée par rapport au dollar américain depuis le début de l’année 2007 et reste très sous-évaluée par rapport à de nombreuses devises émergentes ».
Renouveau du cycle d’investissement et de croissance bénéficiaire en 2014 et 2015
Sur le plan microéconomique, les résultats d’entreprises en Europe n’ont pas contribué au rally boursier des dernières années, contrairement à la progression des multiples de valorisation. Le niveau des bénéfices s’est dégradé par rapport à 2007, les bénéfices par action ont chuté de 20% en France et 50% en Espagne et en Italie. « Ce reflux a été excessif et le scénario le plus crédible est désormais celui d’un rebond significatif des résultats, à partir des points bas atteints. L’inversion des prévisions bénéficiaires offre un fort potentiel de rattrapage pour les actions européennes, en particulier pour les valeurs des pays du sud de l’Europe. On observe une reconvergence de ces marchés actions après sept ans de sous-performance. Depuis le début de l’année, les actions italiennes surperforment significativement l’indice DJ Stoxx 600 (+8%), quand les actions allemandes sous performent l’indice ».
Autre signal positif, les investissements sont en voie de redémarrage, comme les opérations de fusions acquisitions. « Les entreprises profitent de leur faible endettement (le ratio dette/fonds propres est au plus bas depuis 20 ans) et de liquidités abondantes pour envisager des rapprochements immédiatement positifs pour leur rentabilité, compte tenu des coûts de financement historiquement bas et des faibles niveaux de valorisation des cibles. Le secteur des télécoms est un bon exemple, avec, en plus, une tendance à la concentration qui permet une amélioration des marges bénéficiaires de l’ensemble des acteurs » ajoute Philippe Chaumel.
Les valeurs de « retournement » pour jouer le rattrapage boursier européen
Didier Bouvignies conclut en exprimant ses choix de stock-picking. Les thèmes des sociétés en retournement et des financières européennes sont selon lui les plus prometteurs : « la sélection des titres ne doit pas répondre à des biais sectoriels, mais plutôt à des convictions thématiques. De ce point de vue, nous préférons les actions décotées, d’entreprises ayant initié un cycle de restructuration, aux actions de croissance dont la prime de risque est aujourd’hui très modeste au regard de leur niveau de risque ».
L’ajustement des coûts et des activités réalisé par les entreprises en retournement représente un catalyseur boursier vigoureux, dont il faudra encore profiter dans les dix-huit à vingt-quatre mois. Des titres comme STMicroelectronics, Air France, Peugeot, Saint-Gobain ou HeidelbergCement sont quelques exemples de profils ‘value’ appréciés par l’équipe de gestion. « Nous apprécions aussi certaines financières espagnoles ou italiennes injustement pénalisées par le risque pays ces dernières années. C’est le cas d’Intesa Sanpaolo, dont la baisse des provisions à venir offre des perspectives de ROE (Return on Equity) et de rattrapage boursier très attrayantes ».
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