Début 2013, les valeurs de croissance atteignent des niveaux de valorisation significativement supérieurs à leur moyenne historique et sont reléguées au second plan au profit des valeurs dites « value ». Le rallye des valeurs cycliques, très violent, conserve-t-il du momentum ? La faible performance des valeurs de croissance associée à des primes de valorisation qui se sont dégonflées créent à nouveau des opportunités. Mais la sélectivité reste de mise pour identifier les sociétés à même de générer une croissance robuste.
Explications de Frédéric Ponchon, gérant du fonds Sycomore European Growth.
En 2011 et 2012, les valeurs de croissance ont été largement plébiscitées en qualité de valeur refuge. Or, depuis début 2013, elles connaissent un véritable désintérêt de la part des investisseurs : niveaux de valorisation élevés, politiques monétaires accommodantes, reprise, même faible, de la croissance économique, diminution des risques extrêmes, autant de facteurs qui ont plaidé en faveur des valeurs cycliques et de moindre qualité, notamment les valeurs domestiques.
Aujourd’hui, la reprise cyclique a été anticipée par les marchés ; nous avons assisté à une convergence des valorisations (réduction des écarts intersectoriels). La croissance des résultats devrait constituer le prochain vecteur de performance à court-moyen terme. Certaines valeurs de croissance visible et de qualité pourraient générer une croissance bénéficiaire de 8 à 10% par an sur les 2 à 3 années à venir, même dans un contexte de croissance économique atone. Par ailleurs, si les taux de change se maintiennent, elles devraient profiter, au second semestre, d’un effet de base positif sur les devises émergentes, aujourd’hui mieux orientées.
Les émergents, véritable vecteur de croissance. Utopie ou réalité ?
Si les pays émergents ont connu un passage particulièrement difficile en 2013, ils déploient des efforts significatifs d’amélioration structurelle pour résorber leurs déséquilibres. Même si la croissance des économies émergentes a fléchi, elle reste supérieure à celle des pays avancés et contribue à hauteur de deux tiers à la croissance mondiale. Le nombre de ménages accédant à la classe moyenne ne cesse de croître et la volonté de cette dernière d’adopter un modèle de consommation à l’occidental, notamment en Asie, est un véritable vecteur de croissance pour les valeurs européennes. Cette tendance de fond n’a pas vocation à s’inverser.
On observe également des sources de croissance structurelle de long terme communes aux pays émergents et aux pays développés, à savoir le vieillissement de la population, les besoins en infrastructure, l’externalisation et le renforcement des exigences de sécurité.
Le retour des M&A : une source de croissance complémentaire ?
La reprise du cycle des fusions-acquisitions est bénéfique au marché d’actions européen et se matérialise plus particulièrement dans le secteur de la santé. On observe à la fois un mouvement de consolidation - AbbVie cherche à mettre la main sur Shire, Pfizer sur AstraZeneca - et un mouvement de recentrages d’activités visant à améliorer les marges et les profils de croissance - Novartis et GlaxoSmithKline ont procédé à des échanges d’actifs. Dans le domaine des maisons de retraite, Orpéa a acquis le groupe Silver Care en Allemagne, Medica et Korian ont fusionné pour devenir un leader européen du secteur. Cette impulsion est loin d’être terminée.
Dans l’ensemble, les sociétés européennes ont atteint les limites du « cost cutting ». Les acquisitions constituent un moyen efficace de continuer à réduire leurs coûts par synergies.
Cette reprise est bénéfique pour les petites et moyennes valeurs. Pourquoi ?
L’intérêt des industriels pour les petites et moyennes valeurs spécialisées sur des marchés de niche, souvent plus dynamiques, est manifeste. Elles représentent un vivier d’entreprises qui disposent d’avantages compétitifs incontestables. Prenons l’exemple de R. Stahl, société peu couverte par les analystes et peu connue des investisseurs qui est un leader mondial sur les produits antidéflagrants. Les qualités intrinsèques détectées chez ce spécialiste - positionnement de leader sur un secteur de niche peu cyclique, récurrence des ventes, fortes barrières à l’entrée, …- lui confèrent un statut de cible potentielle. D’ailleurs, elle a récemment fait l’objet d’une offre de rachat avec une prime de près de 50%.
Vous gérez le fonds Sycomore European Growth.
En quoi son positionnement actuel profite-t-il de cette dynamique ?
Nous nous intéressons aux valeurs de croissance visible et de qualité européennes qui profitent de tendances structurelles de long terme ou génèrent de la croissance grâce à des initiatives propres : innovation, croissance externe, expansion internationale, stratégie marketing différenciante. Elles doivent cependant offrir un potentiel d’appréciation important, sans quoi elles n’intègrent pas notre univers de recherche.
Depuis le début de l’année, le fonds enregistre une performance de 7% - en ligne avec les marchés, malgré un intérêt marqué des investisseurs pour la value- qui valide l’intérêt d’investir sur toutes les tailles de capitalisations et d’avoir une discipline stricte sur les valorisations.
Convaincus que les pays émergents constituent un vecteur de croissance significatif sur le long terme, et en raison de la stabilisation des fondamentaux, nous revenons progressivement vers de sociétés européennes plus largement exposées à ces économies : Unilever, L’Oréal, Heineken.
Le fonds profite par ailleurs du retour des opérations de fusions-acquisitions du fait d’un positionnement marqué sur le secteur de la santé d’une part et d’un biais petites et moyennes valeurs d’autre part. Aujourd’hui, les valeurs de santé représentent plus d’un tiers du portefeuille ; les petites et moyennes valeurs comptent pour un tiers également. Notre approche ne vise toutefois pas à sélectionner les petites et moyennes valeurs pour leur attrait spéculatif, mais à investir dans des entreprises avec une bonne dynamique de croissance et un positionnement concurrentiel solide. C’est également ce qui intéresse les industriels et qui explique leur statut de cible potentielle.
Enfin, nous nous intéressons de près aux « challengers » - sociétés avec un solide business model qui opèrent sur des secteurs à forte visibilité - qui peuvent avoir connu des difficultés passagères mais qui sont aujourd’hui équipées pour réduire, en partie, l’écart en termes de rentabilité et de valorisation avec le leader du secteur. Nous pouvons citer Heineken, second derrière AB Inbev ou encore Safilo, seule vraie alternative à Luxottica.
Depuis sa création, le fonds affiche une performance de 91,3% contre 77% pour le l’Euro Stoxx TR2.
Document d'informations disponible via www.sycomore-am.com
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