Voilà un mois que la loi de finances rectificative pour 2013 et les lois de financement de la sécurité sociale et de finances pour 2014 ont été publiées. Juliana Kovac, avocat associé au sein du cabinet Flichy Grangé Avocats, présente ici les principaux changements pour les entreprises.
Par Juliana Kovac, avocat associé, Flichy Grangé Avocats, Pôle Protection sociale
1. La protection sociale complémentaire
Il s’agit là des mesures les plus importantes.
Après l’Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 et la loi relative à la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, le législateur poursuit son objectif de « modernisation de la protection sociale » (exposé des motifs, loi n°2013-1203 du 23 décembre 2013) avec :
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la possibilité, à compter du 1er janvier 2014, pour les branches professionnelles, de recommander aux entreprises d’adhérer à un ou plusieurs organismes de prévoyance, supprimant ainsi les clauses de désignation qui, depuis 1994, permettaient aux partenaires sociaux d’imposer aux entreprises de s’affilier à un organisme déterminé. Depuis le mois de juin 2013, le Conseil constitutionnel avait, au demeurant, déjà remis en cause leur validité sur le fondement de la liberté contractuelle et de la liberté d’entreprendre (décision n°2013-672 du 13 juin 2013) ;
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l’obligation, à compter du 1er janvier 2015, pour les organismes de prévoyance, de modifier leurs garanties pour prendre en charge, en tout ou partie, le ticket modérateur, le forfait hospitalier et certaines dépenses de santé, notamment dans le domaine optique et dentaire. C’est, ainsi, la définition des contrats responsables qui est modifiée et, par voie de conséquence, les conditions dans lesquelles les contributions patronales peuvent être exonérées du paiement des charges sociales. A noter, toutefois, que, dès le 1er janvier 2014, la taxe spéciale sur les contrats d’assurance passe de 9 % à 14 % pour les contrats non responsables ;
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l’assujettissement à l’impôt sur le revenu de la contribution patronale destinée au financement des garanties qui assurent le remboursement ou l’indemnisation des frais liés à la maladie, la maternité ou un accident. La mesure s’applique aux contributions versées en 2013. Compte tenu de la date de publication de la loi de finances pour 2014, la plupart des bulletins de paie du mois de décembre 2013 sont, donc, faux ! Ils mentionnent un salaire imposable qui ne tient pas compte du montant des contributions versées par les entreprises en 2013 au titre de la complémentaire Frais de santé. Les entreprises doivent, donc, procéder aux rectifications nécessaires sur la DADS, avant le 12 février 2014, et en informer leurs salariés avant qu’ils ne reçoivent leurs déclarations d’impôts.
L’année 2014 sera également marquée par la nécessité pour les entreprises de se conformer, avant le 30 juin, au décret du 9 janvier 2012 et à la circulaire du 25 septembre 2013 concernant le caractère collectif et obligatoire des régimes de retraite supplémentaire et de prévoyance complémentaire. A noter, toutefois, que cet allongement du délai de mise en conformité au 30 juin 2014 (au lieu du 31 décembre 2013) ne concerne, pour l’essentiel, que les entreprises qui bénéficiaient d’un dispositif conforme aux règles anciennes.
A cela, s’ajoute l’entrée en vigueur, le 1er juin 2014, du nouvel article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale concernant la portabilité de couverture complémentaire Frais de santé pour les chômeurs. Les entreprises doivent sans tarder renégocier leurs régimes en révisant leurs contrats d’assurance ainsi que leurs accords collectifs (ou leurs décisions unilatérales, ou encore les régimes mis en place par référendum) sans oublier de consulter préalablement leur comité d’entreprise et d’informer leurs salariés de ces modifications (en respectant un délai de prévenance de trois mois en cas de recours à une compagnie d’assurance).
A compter du 1er juillet 2014, en cas d’échec des négociations engagées par les branches professionnelles, les entreprises devront, par ailleurs, engager des négociations en vue de généraliser la prévoyance à l’ensemble de leurs salariés, conformément aux dispositions de l’article 1er de la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
2. Les autres mesures prévues par la loi de financement de la sécurité sociale
Dans la loi de financement de la sécurité sociale, plusieurs dispositions tendent à simplifier les formalités administratives pesant sur les entreprises. L’essentiel se caractérise par la généralisation du recours à l’électronique pour faire les déclarations, ainsi que les paiements.
Signalons, par ailleurs, l’entrée en vigueur, à compter du 1er janvier 2014, du décret du n°2013-1107 relatif aux redressements des cotisations et contributions sociales en cas de constat de travail dissimulé ou d’absence de mise en conformité. La mesure figurait dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. On attendait son décret d’application. Le texte impose aux entreprises de se conformer aux observations faites par l’Urssaf au cours des cinq dernières années sous peine de subir, en cas de contrôle, une majoration de retard de 10 % du montant du redressement résultant du non-respect de celles-ci.
3. Les autres mesures prévues par la loi de finances
Dans la loi de finances, il faut noter l’adoption de la taxe sur les hautes rémunérations. En 2013 et 2014, les entreprises devront verser une taxe de 50 % sur la part des rémunérations qui excède un million d’euros (dans la limite toutefois de 5 % de leurs chiffres d’affaires).
On peut citer, encore, la suppression de la taxe sur les salaires sur la plus value d’acquisition issue de la levée de stock-options ou de l’acquisition définitive d’actions gratuites, la réforme de la LODEOM, ou encore la suppression de la journée de carence des fonctionnaires.
S’agissant de la réserve spéciale de participation, le Conseil constitutionnel a annulé la mesure qui tendait à prendre en compte, dans le calcul du bénéfice, les crédits d’impôts. Ce faisant, le gouvernement avait souhaité reprendre une ancienne doctrine administrative que le Conseil d’Etat a annulée le 13 mars 2013. Le Conseil constitutionnel a annulé cette disposition qualifiée de « cavalier législatif ». On en reste donc à l’arrêt du Conseil d’Etat : les crédits d’impôt ne doivent pas être pris en compte. Il en résulte une diminution de la réserve spéciale de participation calculée sur la base de la formule légale.
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