Commentaire de Fabrice Cousté, Directeur Général de CMC Markets France
Après un été relativement calme, sans volatilité, mais avec une tendance haussière soutenue, les marchés boursiers risquent d’être plus sensibles aux secousses. Les investisseurs les plus appétant au risque en profitent pour revenir sur quelques actifs délaissés au cours du premier semestre de l’année.
Les tensions géopolitiques actuelles dopent les cours des matières premières. Les cours du pétrole se sont fortement raffermis, à mesure que le scénario de frappes militaires par la coalition occidentale sur le terrain syrien s’est précisé.
Les barils de Brent (Mer du nord) et de WTI (New York) ont vu leurs prix grimper respectivement de +5,6% et +3,9% en une semaine. Ce rebond est d’autant plus remarquable pour le Brent, qui, après avoir trébuché à 97 USD au printemps dernier, retrouve quasiment son niveau du début d’année.
L’autre actif gagnant du moment est évidemment l’or. Alors que la majorité des intervenants des marchés se positionnaient vendeurs sur le métal précieux il n’y a pas si longtemps, le regain de tension au Proche-Orient soutient fermement le cours de l’once d’or. Amorcé il y a un mois en raison du retour de l’inflation dans les pays émergents, le rebond vigoureux de l’or lui permet de repasser au-dessus de la barre des 1 400 USD. Preuve qu’aux yeux des investisseurs, le statut de valeur refuge du métal jaune n’est pas obsolète.
Par corrélation négative à la remontée conjointe du prix de l’or et du pétrole, le cours du dollar américain a tendance à s’éroder face aux autres devises des pays développés. La parité EUR/USD reste par exemple ancrée au-dessus de 1,32. Un tel niveau pour l’euro protège l’Union monétaire de « l’inflation importée », c’est-à-dire du renchérissement des matières premières. En revanche, il risque de pénaliser les exportations des pays membres et donc de peser sur la timide reprise de l’activité européenne.
Autre grande incertitude, la conjoncture des pays émergents. Le ralentissement économique observé dans des pays tels que la Chine ou le Brésil depuis plusieurs trimestres impacte fortement leurs balances des paiements. Très excédentaires il y a quelques années, elles sont aujourd’hui déficitaires pour certains des pays émergents. Et les capitaux fuient les marchés émergents. En annonçant le scénario d’un resserrement monétaire à venir, par conséquent la perspective d’une meilleure rémunération du loyer de l’argent, la Réserve Fédérale américaine a suscité la panique.
L’anticipation d’une remontée des taux d’emprunt américains a encouragé les investisseurs à rapatrier les avoirs qu’ils avaient placés sur les marchés financiers émergents. En somme, un arbitrage en vue de bénéficier d’un meilleur couple rendement-risque. Les devises de l’Inde, du Brésil, de l’Indonésie ou de la Turquie ont donc connu une véritable débâcle ces dernières semaines. Les cambistes sanctionnent sévèrement le ralentissement de ces économies et l’affaiblissement des monnaies accentue davantage les poussées inflationnistes, un problème déjà endémique en ce qui concerne l’Inde ou le Brésil.
Si les marchés occidentaux ont été préservés, la tourmente des émergents pourrait bien altérer la croissance économique mondiale. N’oublions pas que l’activité économique des États-Unis ou des pays européens dépend en bonne partie de la demande des pays émergents. Un risque supplémentaire qui complique la tâche des banques centrales, en particulier de la Fed. Il faudra une diminution très graduelle du « quantitative easing », pour ne pas saper la croissance américaine.
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