La gérante Elena Shaftan (Jupiter AM)
s'est récemment rendue en Russie.
Elle nous livre ici son analyse et ses interrogations.
Alors que nous demandions à un DG d’une entreprise du secteur des biens de consommation de réfléchir au risque d’augmentation des charges sociales, ce dernier a répondu : «Nous n’avons jamais eu la vie aussi facile ! Nous vivons dans une ville qui est maintenant plus propre que Londres ou New-York. Nous n’avons plus à verser des pots de vin. Nous pouvons nous offrir tout ce que nous souhaitons, et dire tout haut ce que nous pensons, dans la limite du raisonnable. Nous gérons quelques-unes des entreprises les plus rentables du monde. Et nous payons 13% d’impôts. Cela peut difficilement être mieux ! Si les impôts augmentent un peu, cela ne va pas nous impacter tant que cela. »
Cette opinion est à mille lieues de la perception que le monde occidental a de la Russie. Et cela nous a donné à réfléchir. Il avait raison : Moscou est effectivement propre, mais le plus surprenant, et malgré une température de plus de 30°, l’air n’était pas oppressant. Nous avons aussi été surpris de voir beaucoup de papillons, aussi bien sur les routes que sur la terrasse de l’hôtel au 12ème étage. Et ça, c’était quelque chose de nouveau.
La richesse croissante des consommateurs s’est traduite par un parc automobile modernisé, combiné à des améliorations dans le raffinage pour augmenter la qualité moyenne de l’essence, le tout aboutissant à une meilleure qualité de l’air.
La politique anti-corruption de Poutine a pris de l’ampleur dans les six derniers mois faisant tomber les têtes de nombreux hauts responsables et les poursuites pour corruption ont augmenté de 83%.
Les détaillants, les opérateurs de téléphones mobiles, les entreprises internet et des technologies de l’information russes génèrent des marges parmi les plus importantes au niveau mondial. Le niveau des dividendes est passé au-dessus de 4%, un des plus hauts niveaux des marchés émergents.
L’activité en Russie souffre encore de l’interventionnisme de l’Etat et les pratiques de gouvernance d’entreprise laissent encore à désirer, semblables en cela aux autres pays émergents. Mais si la Russie est pénalisée si durement, c’est parce qu’elle est censée être « européenne » et est donc jugée à l’aune des standards européens.
Elena Shaftan, gérante du fonds Jupiter GF New Europe chez Jupiter AM.
Le dossier
Voyage en Russie (1/8) : l’occasion de revisiter les fondamentaux de cette économie
Voyage en Russie (2/8) : Grand écart entre les idées reçues et la réalité
Voyage en Russie (3/8) : Une position ambivalente sur la croissance économique
Voyage en Russie (4/8) : Les réformes, enfin
Voyage en Russie (5/8) : La corruption, la gouvernance d’entreprise et l’interventionnisme étatique
Voyage en Russie (6/8) : Le retour des cerveaux
Voyage en Russie (7/8) : Quelques sociétés d’intérêt
Voyage en Russie (8/8) : En conclusion
Notre lettre mensuelle Fréquences Boursières présente chaque mois les grandes tendances en matière d'investissement, sur l'ensemble des classes d'actifs et pour des périodes de court et moyen terme.