Premier constat : une mesure « non conventionnelle » exceptionnelle qui rassure autant qu’elle inquiète.
Alors que Mario Draghi se montre inflexible sur le rachat de dettes souveraines, l’opération de refinancement à trois ans menée par la BCE prouve que l’institut francfortois est néanmoins prêt à utiliser des mesures non conventionnelles pour voler au secours des banques et éviter un « credit crunch ». Cette opération de refinancement de long terme (LTRO pour Long Term Refinancing Operation), permet de prêter sur une durée inédite de 36 mois. Or les montants de la dernière opération menée en juin 2009 d’une durée de 12 mois qui avait permis de prêter 442 milliards ont été largement dépassés. Ce qui a eu pour effet d’inquiéter les marchés. En effet les besoins semblent énormes au vu des montants empruntés. C’est dire que le mal est profond et que les banques, ne se faisant plus confiance entre elles, préfèrent aller massivement emprunter à la seule institution encore fiable, la banque des banques !
Deuxième constat : de l’argent recyclé qui va servir en priorité aux banques plutôt qu’à l’économie réelle
Ces liquidités sont bienvenues pour les banques de la zone euro, qui auront de gros besoins de refinancement l'année prochaine, et peinent à trouver des fonds alors que les investisseurs ne leur font plus confiance. Or ces mêmes banques font face à un double danger. Tout d’abord la récession va mécaniquement provoquer une montée des risques de défaut qu’il leur faut provisionner. Ensuite elles vont devoir faire face à de très lourdes échéances. Pas moins de 600 milliards d'euros de dette bancaire arrivent à maturité en 2012, dont 230 milliards pour le seul premier trimestre. Il est donc peu étonnant qu’une nouvelle opération soit programmée le 29 février 2012.
Pour résumer si le spectre de faillites d'institutions financières à cause de problèmes de liquidités semble s’éloigner, cette manne sera d’abord et avant tout utilisé à rembourser des tombées de dette et à reconstituer un matelas de sécurité en prévision d’une aggravation de la crise.
Pour ce qui est du financement des Etats, le problème reste entier. « Chat échaudé craint l’eau froide » : même avec des liquidités en quantité illimité à taux plancher, on peut imaginer que les banquiers resteront durablement à l’écart de la dette souveraine qu’ils continuent à liquider pour éviter le risque d’un scénario « à la grecque » où ils avaient approuvé une décote « consentie » de 50% de la dette.
Fabrice Cousté, DG de CMC Markets France