Comme tous les ans, le docteur Leber, fondateur et associé d’Acatis* et une partie de son équipe sont partis en pèlerinage à l’assemblée générale de Berkshire Hattaway.
Résumé de cette manifestation unique qui réunit chaque année dans un stade à Omaha dans le Nebraska les actionnaires du fonds d’investissement dirigé par Warren Buffet. Ce dernier, 82 ans, et Charles Munger, 89 ans, ont répondu, durant 5 heures aux 68 questions des actionnaires, comme toujours avec vitalité et le sens de la répartie. Aucun souci à se faire pour leur santé, l’investissement «value» maintient jeune ! Les questions posées étaient de bien meilleure qualité que les années précédentes, les réponses pas toujours. Le petit esquif agile est devenu un gros navire qui n'a plus la même souplesse qu'autrefois.
Quelques constations et interprétations personnelles
- Ajit Jain pourrait être le successeur de Buffett : ce dernier a répondu avec tant de circonvolutions à une question précise sur le sujet qu’on ne peut arriver qu'à cette conclusion.
- Berkshire entreprend une forte offensive dans le secteur de l’assurance directe. Plusieurs dirigeants de AIG ont été embauchés et dotés de capital et Berkshire gagne automatiquement, par voie contractuelle, 7,5% des encours générés par Lloyds à Londres.
- Le caractère de Berkshire est en train de changer. En capitalisation boursière, c’est désormais le 5ème plus grand groupe au monde. La «boutique» d’actions value s’est transformée en une grande valeur «père de famille» stable et anticyclique, mais moins rentable. Buffett a reconnu avoir dû payer un peu plus que voulu pour Heinz. La reprise d’entreprises à faible coût perd en importance, la profondeur des analyses diminue et Buffett ne comprend plus tous les modèles d'entreprise, comme il l'a lui-même avoué pour IBM. Pour la première fois, il se pourrait que Berkshire ne surperforme pas l’indice de référence S&P 500 sur 5 ans. Mais : en cas de dévissage du marché et de débordement de panique, Berkshire, avec sa trésorerie de 49 Mds€, sera prêt à saisir les opportunités offertes par ceux qui plongent sans savoir nager. Cette stratégie ralentira certes la croissance mais restera nettement meilleure et fondamentalement plus stable que la moyenne.
- Buffett qualifie la politique actuelle de la Fed de grande expérimentation, de territoire vierge, ou encore de film dont on ne connaît pas la fin. Il estime qu’il sera difficile de mettre fin au programme d’achat d’obligations. S’agissant de la crise financière, Charlie Munger estime que: « If you are not confused you don't understand it » et que les conséquences de la politique de taux bas sont brutales pour le secteur de l’assurance et touchent des millions de personnes. Munger: « Cela devait bien faire mal à quelqu’un » (It had to hurt somebody).
- Les coûts du système de santé sont, aux dires de Buffett, un des principaux handicaps de l’Amérique. 17% du PIB sont dépensés pour la santé, contre 11% au niveau international. Ces coûts affaiblissement la compétitivité des produits américains.
- Le résultat intermédiaire, à 5 ans, d’un pari sur 10 ans consistant à savoir qui performe le mieux : des hedgefonds ou de l'indice boursier, est intéressant. Actuellement l’indice S&P 500 présente une performance annualisée de 8,7%, tandis que celle du portefeuille de hedgefonds de Protégé Partners est à 0,3%. Sur quatre des cinq années, l’indice boursier a mieux performé que le fonds.
- L’énergéticien MidAmerican Energy n’annoncera pas d’objectif de réduction des émissions de CO2. C’est ce qui a été décidé à l’AG, alors même que le site Internet du groupe affiche son ambition dans ce domaine. Malheureusement, d’année en année, les offensives de ce type initiées par des actionnaires sont réduites à néant ; qu’il s’agisse de mesures contre les algues bleues toxiques, contre les conditions de travail indignes dans les usines textile ou contre les investissements dans des sociétés ne respectant pas les droits de l'homme. Sur ce plan, Berkshire Hathaway a encore beaucoup à apprendre. Bien que les entreprises de l’empire Berkshire aient sûrement des comportements corrects, nous souhaiterions, en tant qu’investisseurs, une plus grande sensibilité à ces problématiques.
- Les aspects macroéconomiques ne jouent aucun rôle pour les investissements de Buffett. Les facteurs macroéconomiques, qui échappent aux pronostics, ne doivent pas être plus significatifs que les considérations d'entreprise qui sont aisément appréciables.
- Concernant l’Europe : comme toujours, l’Europe réussira à sortir son épingle du jeu. L’euro est une monnaie synchronisée dans un environnement non synchronisé. Mais l’Europe ne disparaîtra pas et Buffett aimerait y faire une grande acquisition (et la payer comptant !).
* ACATIS Investment GmbH, dont le siège principal à Francfort sur le Main, conseille les clients particuliers et institutionnels en matière d'investissements. ACATIS propose des fonds ouverts au public et une gestion de portefeuilles de type value. La gamme de produits d'ACATIS comprend des fonds d'actions focalisés sur le marché international, européen ou allemand.
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