Depuis son entrée en application en mars 2023, le
Régime Pilote peine à se déployer sur le marché malgré l’intérêt croissant des
acteurs. Face à ce constat, l’AMF et la CONSOB formulent des propositions à
destination de la Commission européenne et des colégislateurs européens pour
instaurer un cadre réglementaire plus adapté, permettant une plus grande
expérimentation de la technologie des registres distribués par les
infrastructures de marché en Europe.
Le règlement européen
sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la
technologie des registres distribués (ou « Régime Pilote »), prévoit un cadre
d’exemption réglementaire visant à favoriser l’expérimentation par les
infrastructures de marché de cette technologie pour la négociation
d’instruments financiers, leur livraison et le règlement des transactions.
Ces dernières années,
la technologie de chaine de blocs (blockchain) et les registres distribués
(DLT) ont connu une accélération de leur développement et de leur utilisation
sur les marchés financiers. Mais s’il existe aujourd’hui un relatif consensus pour
dire que la blockchain est une technologie pouvant apporter des avantages
transformateurs et des gains d'efficacité pour les marchés de capitaux,
l’adoption du Régime Pilote reste marginale.
Estimant que l'Union
européenne doit mieux encourager l'innovation et tirer parti des avantages
potentiels de cette technologie, dans le contexte de l'Union de l'épargne et de
l'investissement, l’AMF (Autorité des marchés financiers) et la CONSOB (Commissione
Nazionale per le Società e la Borsa) proposent des pistes pour rendre le Régime
Pilote plus efficient, autour de trois axes :
• Renforcer la flexibilité du Régime
Pilote pour encourager l’expérimentation
Le Régime Pilote doit
jouer un rôle plus important en permettant les expérimentations de la DLT, et
en apportant davantage de flexibilité aux acteurs du marché. Pour cela, il est
essentiel d’introduire une plus grande proportionnalité, en fonction de la taille
et de la nature des projets. En parallèle, renforcer le rôle de l’ESMA
permettra d’assurer la cohérence et la convergence des pratiques au sein de
l’Union européenne. Par ailleurs, l’autorisation d’une utilisation plus large
des jetons de monnaie électronique et des dépôts tokenisés pour le règlement
des transactions devrait être envisagée, tout en soutenant la mise en place dès
que possible d’une solution pour des règlements sûrs et efficaces en monnaie
centrale des actifs financiers émis sur DLT.
• Élargir le champ d’application du
Régime et offrir de la visibilité à long terme
Pour rendre le Régime
plus compétitif, notamment au regard de cadres réglementaires mis en place dans
d’autres places financières, les plafonds d’admission et de capitalisation des
infrastructures pourraient être relevés pour permettre l’expérimentation de
projets de plus grande envergure, tout en conférant à l’ESMA le pouvoir de
revoir ces plafonds afin de s'adapter plus rapidement à l'évolution du marché.
En outre, la liste des actifs éligibles pourrait être élargie pour inclure des
produits financiers plus diversifiés, tels que les obligations structurées et
certains produits dérivés. De plus, l’extension de la durée du Régime Pilote et
la clarification du processus de sortie sont nécessaires pour permettre le
niveau d'investissement requis pour le développement de projets à long terme,
en offrant une plus grande visibilité aux investisseurs.
• Promouvoir l’interopérabilité des
systèmes et mobiliser les acteurs de marché
La réussite de
l’intégration de la technologie DLT dans le secteur financier européen repose
sur l’établissement de passerelles entre les infrastructures DLT et les
systèmes traditionnels. En conséquence, l'établissement de normes communes à
l'échelle européenne constitue une étape cruciale pour garantir
l'interopérabilité des systèmes entre les différents acteurs du marché et
simplifier les processus pour toutes les parties prenantes. Enfin, il est
important d’accroître la sensibilisation des émetteurs et des investisseurs aux
opportunités offertes par l’inscription d’actifs financiers sur la DLT, afin de
stimuler l’adoption de cette technologie par toutes les parties prenantes.
« A l’heure où l’Europe veut développer ses marchés financiers pour faire face à ses besoins de financement, avec le projet d’Union de l’épargne et de l’investissement, il est fondamental de disposer d’un cadre réglementaire compétitif pour favoriser l’innovation, et l’expérimentation sur les marchés de la technologie des registres distribués, afin de mieux en mesurer les potentiels bénéfices », ont déclaré Marie-Anne Barbat-Layani, présidente de l’AMF et Paolo Savona, président de la CONSOB.