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[Etudes] ESCP - Décrypter les engagements climatiques

Comment la linguistique computationnelle révèle les tendances cachées des CDN à l’échelle mondiale.

 

Alors que les pays préparent leurs prochaines Contributions Déterminées au Niveau National (CDN) dans le cadre de l’Accord de Paris, une nouvelle étude menée par ESCP Business School et l’Universitat Autónoma de Barcelona, publiée dans Nature Sustainability, révèle que ces engagements climatiques reflètent non seulement des objectifs de réduction des émissions, mais aussi des priorités économiques, technologiques et politiques plus larges - avec des variations significatives en matière d’ambition et de transparence.

 

En utilisant la linguistique computationnelle, les chercheurs ont analysé plus de 300 CDN et identifié 21 groupes thématiques, regroupés en sept grandes catégories. Leurs conclusions mettent en évidence les arbitrages et les facteurs sous-jacents qui façonnent les stratégies climatiques nationales - ainsi que les lacunes qui pourraient compromettre leur mise en œuvre.

 

Principaux enseignements : comment les pays définissent leurs engagements climatiques

 

•   Les économies développées (ex. : États-Unis, Union Européenne, Japon) mettent l’accent sur des objectifs chiffrés de réduction des émissions, mais fournissent souvent peu de détails sur les mécanismes politiques et les engagements financiers. Les premières CDN des pays à hauts revenus étaient souvent succinctes, se limitant principalement à des objectifs plutôt qu'à des stratégies concrètes.

•   Les pays en développement intègrent l’action climatique dans les ODD (Objectifs de développement durable), articulant leurs CDN autour de la croissance économique, de la réduction de la pauvreté et de la résilience climatique. Cela reflète des priorités nationales plus larges et les arbitrages entre réduction des émissions et développement socio-économique.

•   Les économies dépendantes des ressources (ex. : Brésil, Russie, certains pays de l’OPEP) mettent fréquemment en avant les risques économiques liés aux efforts mondiaux d’atténuation, en particulier les perturbations potentielles pour les économies dépendantes des énergies fossiles. Cependant, certains reconnaissent également les opportunités qu’offre une transition vers des économies plus diversifiées et circulaires.

•   Les pays vulnérables au climat (ex. : Petits États insulaires en développement, certaines régions d’Afrique subsaharienne) consacrent une part importante de leurs CDN à l’adaptation au changement climatique, soulignant leur contribution historique négligeable aux émissions mondiales et appelant à un soutien international renforcé.

 

Comment les engagements climatiques ont évolué

 

Les CDN varient considérablement en longueur - de 96 mots (première CDN du Kazakhstan) à 76 275 mots (CDN mise à jour du Venezuela) - mais leur focus thématique a évolué. Les premières soumissions des pays les plus riches étaient souvent brèves et axées sur les objectifs, tandis que les pays en développement adoptaient une approche plus large, intégrant des enjeux de développement. Au fil du temps, les mises à jour se sont orientées vers des objectifs d’atténuation plus détaillés et une comptabilisation structurée des émissions de gaz à effet de serre.

 

Toutefois, une lacune majeure persiste : de nombreux engagements manquent encore de transparence, en particulier sur les financements et la mise en œuvre. Comme l’explique Ivan Savin, Professeur associé à ESCP Business School et auteur principal de l’étude : « Cette étude met en lumière une fracture dans les engagements climatiques : les pays les plus riches se concentrent sur des objectifs chiffrés mais sans détails concrets sur les politiques, tandis que les pays en développement intègrent l’action climatique dans leurs priorités économiques et sociales. Pourtant, des lacunes persistent, notamment en matière de transparence sur le financement et les politiques spécifiques. Sans des engagements plus clairs et redevables, les objectifs de l’Accord de Paris risquent de rester lettre morte ».

 

Pourquoi ces conclusions sont essentielles et ce qui doit changer

 

Cette recherche révèle un écart important dans la mise en œuvre des politiques climatiques à l’échelle mondiale. Bien que de nombreuses CDN soient devenues plus détaillées, elles restent très hétérogènes, rendant difficile la comparaison des engagements et la responsabilisation des États.

 

Pour garantir de réels progrès, l’étude souligne la nécessité des :

• Formats de reporting standardisés pour une transparence et une comparabilité accrue.

• Mécanismes de responsabilisation renforcés pour suivre les progrès au-delà des seuls objectifs de réduction des émissions.

•Engagements financiers plus clairs pour traduire les promesses en actions concrètes, en particulier dans les pays en développement.

 

 

Sans ces améliorations, l’Accord de Paris risque de rester une simple déclaration d’intentions plutôt qu’un cadre réel de réduction des émissions. Cette étude apporte une perspective fondée sur les données quant à la manière dont les pays communiquent leurs priorités climatiques - et ce qui doit évoluer pour rendre ces engagements plus efficaces.

 

Figure 1. Regroupement des parties à l’Accord de Paris et prévalence des thématiques.

(A) Dendrogramme radial classant les parties selon la prévalence des thématiques dans leurs CDN.

(B) Carte représentant neuf clusters de parties à l’Accord de Paris.

(C) Prévalence moyenne de chacun des groupes thématiques parmi les clusters identifiés. À noter : les échelles des axes y des sept graphiques sont différentes. Les lignes en pointillés indiquent la moyenne pour chaque groupe thématique à travers les neuf clusters. Les couleurs sont cohérentes entre les trois sous-figures.


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