Les capacités de l’IA ouvrent des potentiels phénoménaux. Comment démystifier l’IA, et comment les dirigeants doivent-ils se l’approprier de manière raisonnée et pragmatique ? Lors d’une récente journée organisée par Walter France et consacrée à l’IA, des pistes ont été ouvertes pour organiser l’articulation entre l’humain et l’IA.
Nous sommes tous entrés
dans l’univers de la science-fiction. Les capacités de l’IA nous dépassent déjà
dans plusieurs domaines. Pour l’apprivoiser, il faut d’abord comprendre les
enjeux qui se jouent actuellement, puis être conscient qu’il n’y a pas d’autre
choix que de se former et de l’utiliser, pour, enfin, élaborer une stratégie
propre à chaque entreprise dans le but d’identifier les complémentarités
possibles et de les optimiser.
> Des
investissements fous pour une quantité infinie d'intelligence gratuite
Les capacités de
l’intelligence artificielle se développent de manière exponentielle, et
beaucoup plus rapidement que prévu. Les investissements sont colossaux. Google,
Facebook et les autres investissent des dizaines de milliards de dollars pour
conserver et renforcer leur position de leaders.
L’IA impacte tous les domaines de notre société. Elle va révolutionner le monde du travail, en supprimant certains métiers et en en créant d’autres. Elle va challenger notre capacité de discernement, entre autres face aux fake news.
Pour les entreprises,
les enjeux ne sont pas seulement organisationnels, mais stratégiques. Comment
intégrer l’IA ? Comme se former pour suivre ces évolutions ?
> Quelle
complémentarité construire entre l'IA et l'humain ?
Trois exemples donnent
à réfléchir. L’avion de chasse F16 est particulièrement compliqué à piloter.
Dans une simulation, les F16 pilotés par l’IA ont facilement remporté la
victoire sur ceux pilotés par les humains. Le projet Neuralink d’Elon Musk, qui
consiste à introduire un implant dans le cerveau humain, pourra à terme aboutir
à un « homme augmenté » en permettant à son cerveau d’interagir avec l’IA. Dans
le domaine médical, une expérience a révélé que l’IA était plus performante
seule qu’en complémentarité avec des médecins.
Une étude réalisée par
Harvard, mentionnée par Dimitri Kassubeck, CEO de Moby Analytics, a montré que
l'utilisation de l'IA peut réduire la performance sur des tâches complexes dans
le consulting. Selon lui, ce problème vient souvent d'un manque de recul et
d'esprit critique chez les consultants moins expérimentés, qui ont donc du mal
à tirer pleinement parti de l'IA. En revanche, les professionnels plus
expérimentés, grâce à leur expertise, utilisent mieux l’IA et en tirent un
grand bénéfice. Par exemple, dans l'informatique, les développeurs expérimentés
qui utilisent l'IA peuvent améliorer leurs performances de plus de 30%.
Ces constats démontrent
de manière évidente que trouver la complémentarité la plus pertinente entre
l’humain et l’IA est devenu un défi actuel et majeur pour toutes les
entreprises.
> L'IA n'est plus
que de la super-information, elle est un élément stratégique
Elle va révolutionner
le monde du travail, mais pour de nombreuses entreprises, les perspectives
restent encore floues. Pour certains métiers, le combat est perdu d’avance. Une
machine pilotée par l’IA qui lave les carreaux sera toujours plus performante
qu’un humain, grâce à sa rapidité, sa précision et aussi… parce que l’IA ne
prend pas de congé, n’est jamais malade et n’a aucune revendication ! Les chefs
d’entreprise qui pourront obtenir des gains de productivité en remplaçant un
salarié par une machine n’hésiteront pas une seconde. Comme pour tout
investissement, il s’agira de construire un business model pour apprécier le
retour sur investissement.
Les questions
stratégiques qui se poseront seront : où met-on le curseur, en termes
d’investissement, de productivité, de positionnement face aux concurrents,
voire « d’éthique » (par exemple, quel pourcentage d’emplois est-on prêt à
supprimer ?). Cette révolution entraînant des questions sociétales
totalement nouvelles, entre autres sur le devenir de certains salariés, et sur
la manière de former les jeunes générations à l’esprit critique.
> Les « chief
cognitive officers » seront les hommes forts de l’entreprise
Selon certains experts,
dans les entreprises, la fonction de « chief cognitive officer » va devenir
cruciale. Le manager qui comprendra, analysera et saura définir les moyens
d’exploiter l’IA fusionnera les fonctions de DRH – directeur des ressources humaines
– et de DSI – directeur des systèmes d’information –.
Le véritable enjeu
consiste à étudier quelle est la meilleure complémentarité Humain / IA, et quel
est le bon rythme d’adaptation, compte tenu du fait que, d’ores et déjà, les
capacités de l’IA évoluent à une vitesse exponentielle.
A ce jour, personne n’a
véritablement idée de tous les nouveaux métiers qui vont apparaître. Une chose
est sûre : il est vital pour les entreprises de monter dans le train de
l’IA. Pour certaines, ce sera le TGV, pour d’autres le TER, mais rester à quai
signifie être vouées à disparaître tôt ou tard. Car dans un même secteur
d’activité, il y aura toujours des entrepreneurs qui se lanceront plus vite et
mieux que d’autres.
> Les différents
types d’outils IA
L’AI générative
signifie qu’elle peut « générer » du contenu texte, image, audio ou video.
Pour
Dimitri Kassubeck, il existe quatre grandes catégories d’IA :
- les assistants
généralistes,
type ChatGPT ou Mistral (français) qui permet d’obtenir en quelques secondes
des réponses à tout type de question ;
- les assistants
spécialisés,
qui sont des applications spécifiquement développées pour répondre à des
besoins métiers spécifiques. C’est ce qu’on appelle le RAG pour Retrieval
augmented generation (génération augmentée par la recherche). On fournit à l’IA
des bases de données spécialisées d’information dans tel ou tel secteur ;
- les agents, qui sont capables
d’exécuter des tâches de manière autonome, type « Claude » ;
- les outils IA de
productivité,
qui permettent par exemple d’automatiser des tâches répétitives, de générer des
comptes-rendus de réunion, etc.
> 7 conseils pour
les PME sur la manière de s'approprier l'IA
L’enjeu est de prendre
le train de l’IA, et de monter en puissance de manière la plus structurée
possible.
1 – Se former en tant que
dirigeant a minima dans un premier temps pour connaître les possibilités de
l’IA et ses évolutions.
2 – Si possible mutualiser
la veille – au sein d’un groupement d’employeurs, d’un syndicat professionnel,
par secteur d’activité – pour étudier les applications les plus pertinentes
dans son entreprise.
3 – Organiser des
formations à l’IA au sein de l’entreprise pour démystifier cet outil et donner
envie aux équipes d’essayer.
4 – Identifier 3 ou 4
utilisations simples et utiles au sein de l’entreprise (par exemple rédaction
des comptes rendus de réunions) qui font gagner du temps aux équipes, et faire
en sorte que l’utilisation soit effective.
5 – Réfléchir aux
utilisations possibles plus fondamentales pour l’entreprise, et surtout à la
complémentarité qui peut être organisée entre les collaborateurs humains et
l’IA, de manière à ce que la combinaison IA et humain génère un résultat
supérieur à l’humain seul.
6 – Porter une attention
particulière aux jeunes générations afin de développer leur esprit critique. Il
appartient à chaque dirigeant de veiller à ce que cet esprit critique, cette
capacité à utiliser l’IA comme un assistant, une complémentarité, et non pas
comme un remplaçant, soient nourris et entretenus en permanence.
7 – Savoir adapter le bon rythme des changements à instaurer au sein de l’entreprise, entre les capacités exponentielles de l’IA, et la capacité d’adaptation des équipes.