Baromètre In Extenso
Innovation Croissance, l'Essec et France Angels.
Levées
de fonds en 2024 : perfusée à l’IA, jusqu’à quand la French Tech pourra-t-elle
résister ?
Baromètre
des levées de fonds In Extenso Innovation Croissance (une publication signée de
son espace collaboratif In Lab), ESSEC Business School et France Angels – Bilan
de l’année 2024.
En
2024, la contraction du marché du capital-risque s’est poursuivie pour la
deuxième année consécutive par rapport à l’année record 2022 (13,6 Md€),
impactant les start-ups de la Tech française. Les 822 opérations réalisées ont
permis aux start-ups tricolores de collecter 8,1 Md€, des levées en baisse de
10% en valeur et de 18% en volume par rapport à 2023, où les montants financés
avaient atteint 9 Md€. Les montants captés par la French Tech restent cependant
à un niveau largement supérieur à celui enregistré avant la pandémie (4,7 Md€),
reflétant la résilience et le dynamisme de l’écosystème entrepreneurial
français, dans un contexte politique et économique très incertain. Malgré ce
recul, le ticket moyen en France a progressé de 14%, s’établissant à 11,4 M€,
en raison d’une poignée de méga-levées remarquables. Les fonds américains et
asiatiques demeurent actifs dans le financement de la French Tech, en quête de
nouvelles pépites.
Les
trois secteurs les plus financés en 2024 sont le logiciel/software, avec une
hausse de 34% de montants captés par rapport à 2023 notamment grâce à un
engouement pour l’intelligence artificielle (IA) ; l’énergie/Cleantech, malgré
une baisse de 40% en valeur dans un contexte de ralentissement plus prononcé au
second semestre 2024 ; et la fintech, qui revient sur le devant de la scène
avec une augmentation de 57% des financements. Comme en 2023, les financements
à destination des entreprises en stade d’amorçage (
En
Europe, le ralentissement du marché en valeur entre dans sa troisième année
consécutive. Cependant, la diminution de 8% enregistrée en 2024 par rapport à
2023 est moins prononcée que la tendance baissière observée depuis 2021. La
France conserve sa deuxième place dans le classement européen des pays ayant
levé le plus de fonds, après la Grande Bretagne, mais toujours devant
l’Allemagne.
Chiffres
clés et faits marquants en France en 2024
• En 2024, la French Tech a engrangé un
total de 8,1 Md€,
un montant en retrait (-10%) par rapport à 2023 (9 Md€), au cours de 822
opérations, en diminution également de 18% par rapport à 2023 (1010
opérations). Le ticket moyen (11,4 M€) a quant à lui progressé de 14% (vs 10 M€
en 2023). L'écosystème connaît depuis deux ans un ralentissement en matière de
financement.
• Méga-levées ayant marqué l’année
La French
Tech a enregistré un total de 12 méga-levées dépassant 100 M€ en 2024 (un
nombre stable par rapport aux 13 méga-levées de 2023, mais très inférieur aux
28 méga-levées de 2022), représentant 35% des montants captés sur l’année. Ces
opérations majeures reflètent une concentration d’investissements
significatifs, notamment dans les domaines très prometteurs comme l’IA, la
Cleantech et la Spacetech.
o HR Path boucle un tour de table de 500 M€ pour
consolider sa position de leader en transformation RH et intégration de SIRH.
o Poolside AI lève 475 M€ pour sa solution d’IA
générative destinée à accélérer le développement de ses grands modèles de
langage spécialisés dans la génération de code et la réponse automatisée aux
problématiques des développeurs.
o Mistral AI réalise une levée de fonds de 468 M€
pour développer ses solutions d’IA destinées à l’optimisation et à l’analytique
en entreprises et ambitionne de concurrencer frontalement OpenAI avec ses
modèles d’IA générative.
o Electra capte 304 M€ pour étendre son réseau de bornes
de recharge rapide, favorisant ainsi la transition vers la mobilité électrique.
o Hysetco procède à une augmentation de capital de 200
M€ pour financer l’expansion de ses infrastructures dédiées aux véhicules à
hydrogène et aux stations de recharge.
o Le néo-assureur Alan boucle un nouveau tour
de table de 173 M€ pour accélérer sa croissance, renforcer son avance
technologique dans les produits de complémentaire santé et intensifier son
développement international.
o Lockall lève 155 M€ pour accélérer le développement de
ses solutions de stockage pour les particuliers et les professionnels.
o The Exploration Company, pépite de la Space
Tech française, capte 150 M€ en série B pour financer le lancement de la
capsule spatiale Nyx dédiée au transport de marchandises dans l’espace.
o Newcleo, société spécialisée dans les
technologies nucléaires propres, boucle un tour de table de 135 M€ pour
renforcer sa présence européenne et améliorer ses perspectives de croissance.
o Pigment bénéficie d’une levée de 132 M€ pour renforcer
ses outils de planification stratégique et de prévision basés sur l’IA.
o Akur8 lève 109 M€ en série C pour développer la
croissance de sa plateforme actuarielle de nouvelle génération qui révolutionne
la tarification de l’assurance-vie grâce à l’IA.
o Stonal sollicite 100 M€ pour développer ses
logiciels, optimisant ainsi la gestion de données immobilières dans le
résidentiel et le commercial à destination des investisseurs et propriétaires.
15
opérations d’un montant entre 50 et 100 M€ complètent le paysage des
méga-levées (soit 10% des montants captés en 2024), dans des secteurs plus
diversifiés tels que la cybersécurité, le marketing, la finance ou encore la
santé.
o H Company capte 90M€ de fonds pour développer sa
plateforme d’IA, améliorant l’analyse décisionnelle en milieu professionnel.
o Langa International lève 85M€ pour
accélérer le développement de ses projets d'électricité renouvelable.
o Unseenlabs, start-up bretonne, boucle un tour de
table de 85 M€ pour élargir ses capacités de surveillance maritime par
nanosatellites, facilitant ainsi le suivi des activités navales.
o ChapsVision, spécialiste du traitement de la data
enrichie par l’IA, lève 85 M€ pour accélérer sa croissance sur le marché
européen.
o Zama attire 66 M€ de financements pour avancer dans
le développement de ses algorithmes cryptographiques sécurisés, visant à
renforcer la confidentialité des données.
o Onestock plateforme cloud-native, consolide une
levée de 65 M€ en développant une solution BtoB d’optimisation des parcours
clients et d'amélioration des performances commerciales.
o Comet Software sécurise des capitaux
(60 M€) pour améliorer sa suite logicielle, destinée à optimiser les
performances industrielles grâce à des solutions numériques avancées.
o NeoT obtient un appui financier (60 M€) pour
accroître ses solutions en matière d’énergie renouvelable et de stockage
d’énergie, soutenant ainsi la transition énergétique.
o Evergaz, producteur de biogaz, réalise une levée
de 60 M€ pour financer son plan industriel de développement de ses unités de
méthanisation et consolider sa position d'acteur du biogaz en Europe.
o Odaseva, principale plateforme de gestion et
sauvegarde des données d'entreprise pour Salesforce, lève 54 M$ en série C pour
élargir son offre de produits.
o Energy, producteur d’énergie renouvelable avec
stockage ZE, réalise une levée de 54 M€ pour financer son expansion en Europe.
o Sensorion réalise un tour de table de 51 M€ pour
soutenir des programmes de développement de thérapie génique.
o Element capte 50 M€ pour accélérer sa croissance de
production indépendante d’électricité décarbonée.
o Neat, insurtech BtoBtoC spécialisée dans
l’assurance embarquée, lève 50 M€ en série A pour consolider sa présence en
France et de se développer à l’international.
o Green Corp Konnection, spécialiste du
transport décarboné, lève 50 M€ en série B pour industrialiser sa production,
développer la R & D et accélérer à l’international.
• Un soutien toujours stable pour
l’amorçage
Dans le
détail des stades les plus financés, l’amorçage (levées inférieures à 2 M€)
continue à afficher une belle dynamique. En effet, un léger rebond de 7 points
entre le premier et le second semestre 2024 a été constaté, permettant aux
jeunes pousses de capter une part de 42% du flux d’opérations sur l’année. A
noter par ailleurs, que les start-ups ayant moins de 2 ans d’existence sont
parvenues à capter 18% des montants totaux levés en France, un chiffre en
progression de 5 points comparativement à l’année 2023.
• Podium régional : l’année 2024 est
marquée par les très belles performances de la Nouvelle Aquitaine, de
l’Occitanie et de la Bretagne.
o Top 1 : l’Île-de-France maintient sa 1ère
place au podium régional, avec des montants investis en croissance (+8%) par
rapport à 2023, malgré une baisse significative du flux d’opérations (-24%). La
région draine ainsi 5,7 Md€, soit 70% des financements totaux collectés en France.
o Top 2 : la région Auvergne-Rhône-Alpes demeure la 2ème région
la plus dynamique (avec 96 deals représentant 558 M€), mais accuse une
diminution des opérations tant en valeur (-72% de montants levés par rapport à
2023) qu’en volume (-28 % d’opérations). L’année 2023 avait effectivement été
marquée par les 2 méga-levées de 850 M€ de Verkor et de 130 M€ d’Amolyt Pharma,
qui avaient propulsé les résultats de la région. Seules les levées de 85 M€ de
Langa International et de Green Corp Konnection, toutes deux dans l’énergie,
excèdent 50 M€ en 2024.
o Top 3 : la Nouvelle Aquitaine se positionne au 3ème
rang en valeur avec 525 M€ levés (+89 % par rapport à 2023) et en 3ème place en
volume avec 61 deals (-13% par rapport à 2023), grâce notamment aux levées
réalisées par The Exploration Company (150 M€) et Neat (50 M€ / Fintech).
o Top 4 : l’Occitanie se place à la 4ème
place du podium et réalise une belle progression en valeur avec 432 M€
collectés (+35% par rapport à 2023) comme en volume, avec 51 deals (+9% par
rapport à 2023). La région recense 3 levées majeures : Onestock (65 M€ /
logiciel marketing), Sensorion (51 M€ / santé) et Element (50 M€ / énergie).
o Top 5 : la Bretagne intègre le podium
régional en valeur en occupant la 5ème place, et se positionne à la 6ème marche
en volume. La région démontre un dynamisme sans précédent, avec 242 M€ captés
par 31 entreprises au cours de l’année, une progression de +62% en valeur par
rapport à 2023, grâce notamment à la levée remarquable opérée par Unseenlabs
(85 M€ / spacetech).
o A noter que la Région Sud sort du podium
régional en valeur, mais se positionne en 5ème place en volume grâce à 41
opérations (-25% par rapport à 2023).
Chiffres
clés en Europe et comparatif des pays en 2024
À
l'échelle européenne, les start-ups ont levé 47,4 Md€ en 2024 au cours de 6850
deals. Les montants levés par la tech européenne sont en repli de -8% en
valeur, malgré un nombre d’opérations assez stable (+2%) par rapport à 2023
(6738 deals représentant 51,6 Md€). Le ticket moyen reste stable à 9,5 M€ (vs
9,7 M€ en 2023).
• Podium européen
o Le Royaume-Uni conserve sa première
place dans le classement européen, avec 14,4 Md€ levés en 2024. Les
financements progressent en volume (+7%) mais décrochent en valeur (-8%) par
rapport à 2023. Les 5 levées spectaculaires de Wayve (955 M€ / IA &
transport), Abound (480 M€ / fintech), Zepz (410 M€ / fintech), Monzo Bank (408
M€ / fintech) et Highview Power (360 M€ / énergie) figurent dans le top 10 des
levées en Europe.
o La France s’installe durablement en 2ème place
depuis 2022. Les levées de HR Path, Poolside AI et Mistral AI font partie des
10 plus belles levées européennes de l’année.
o L’Allemagne demeure à la 3ème marche du podium avec
7,1 Md€ levés en 2024, un montant stable par rapport à 2023. Helsing (450 M€ /
sécurité & IA) réalise la 7ème levée la plus importante en Europe.
o Les Pays-Bas se positionnent au 4ème rang du
classement, avec 3,1 Md€ captés en 2024, en hausse de 29% par rapport à 2023,
grâce notamment aux levées de Nebius (667 M€ / IA, deuxième levée la plus
remarquable en Europe) et de Picnic (355 M€ levés au premier semestre).
o La Suisse se classe en 5ème place du podium, avec
2,3 Md€ levés cette année, en progression de 6% par rapport à 2023, avec
notamment des financements à destination du secteur de la santé qui draine près
de 50% des montants totaux alloués.
Podium
sectoriel : le retour en force des secteurs historiques
Les 3
secteurs les plus prisés en Europe sont le logiciel/software qui arrive en pole
position, suivi par la santé et l’énergie/Cleantech. Ces 3 secteurs captent
respectivement 22%, 19% et 17% des montants levés en Europe. Comparativement à
2023, les secteurs qui progressent le plus sont le logiciel (+43%), la Fintech
(+23%) et la santé (+14%).
o Le secteur du logiciel rebondit, après une chute de 53%
des montants levés entre 2021 et 2023, porté par l'essor des solutions SaaS et
de l'IA. Il représente désormais plus de 20% du financement total européen, un
record sur 5 ans, sans pour autant retrouver son niveau d’avant crise.
o Malgré une reprise plus timide de la Fintech
en 2024,
après un repli significatif de 72% entre 2021 et 2023, le secteur reste animé
par des méga-levées comme Abound ou Monzo Bank, sans toutefois retrouver son
niveau de 2020.
o Le secteur de la santé fait preuve de
résilience, avec une progression de 43% des financements sur 5 ans et un retour
en 2024 à des montants proches de 2022, confirmant l’intérêt des investisseurs
pour la santé numérique et la biotech.
Le
logiciel, l’énergie et la Fintech sont les 3 secteurs d’activité les plus
financés en France, captant respectivement 30%, 20% et 15% des financements. A noter l’inversion
des secteurs de l’énergie et du logiciel sur le podium cette année par rapport
à 2023, du fait des méga-rounds plus nombreux sur les dossiers d’IA notamment.
Comparativement à 2023, les secteurs qui connaissent les plus fortes progressions
sont la Spacetech (+181%), la Fintech (+57%) et le logiciel (+35%).
Les
secteurs privilégiés, à savoir les logiciels avec notamment l’IA, ainsi que la
transition écologique, témoignent de la très forte sélectivité des
investisseurs pour projets stratégiques pour l’avenir et porteurs de sens.
o Le logiciel reprend des couleurs en 2024, notamment grâce à
l’essor des solutions SaaS et IA, après un fort recul de 58% entre 2022 et
2023. Avec 2,5 Md€ levés, en progression de plus de 170% sur les 5 dernières
années, il retrouve un niveau de financement proche de celui de 2021 (2,7 Md€).
o Côté énergie, alors même que le
premier semestre 2024 semblait annoncer une stabilisation des montants totaux
levés (1 Md€, +2% vs le premier semestre 2023), le second semestre illustre une
diminution globale du financement du secteur, avec une baisse de 40% en valeur
et de 15% en volume comparativement à l‘année 2023. Par ailleurs, nous
observons certaines opérations de refinancement opérées par des fonds
infrastructure / financement de projet (en dehors du périmètre de ce baromètre
capital risque), mais qui traduit la scalabilité de ces “anciennes” start-ups
qui grandissent.
o La Fintech avait connu une baisse marquée en
2023 (-70%),
avec seulement 753 M€ levés. Bien que les 1,2 Md€ levés en 2024 représentent
une hausse de 57%, le secteur peine à retrouver son niveau record, restant
porté par des opérations emblématiques comme celle d’Alan.
Focus
sur la Deeptech en France
2024 a
confirmé la robustesse de la Deeptech française, grâce à la montée en puissance
de nouvelles pépites en IA. Le volume d'opérations progresse de près de 6% au
global, et l'IA représente plus de 45% du nombre d’opérations de la Deeptech.
Les start-ups Deeptech ont ainsi capté plus de 42% des montants levés en
France, malgré une diminution de 24% des montants levés par rapport à 2023.
Bpifrance soutient largement la Deeptech française, apportant sa contribution
dans près de 17% des opérations.
Un
engouement confirmé pour l’Intelligence Artificielle
Les
opérations à destination de start-ups développant ou utilisant des technologies
d’IA affichent une réelle effervescence cette année, avec plus de 133 deals
recensés, représentant une hausse de 58% comparativement à l’année 2023. Les
montants totaux levés ont quant à eux doublé (+113%), atteignant plus de 2 Md€,
soit un quart du financement global annuel en France. Une telle performance
témoigne de l’attractivité croissante pour l’IA tant à l’échelle française
qu’européenne (+ 95% d’opérations en volume et 81% en valeur comparativement à
2023) et la volonté de miser sur des technologies avancées pour renforcer la
compétitivité à l’échelle internationale.
En
complément des méga-tours réalisés par Poolside AI, Mistral AI, Akur8, H
Company, ChapsVision, Zama, Photoroom et Flexai ; OpenAirlines, Aqemia, Quantev
et Jus Mundi attirent également les investisseurs ce semestre :
o OpenAirlines (45 M€), Cleantech française, leader
mondial des solutions logicielles dédiées à l’éco-pilotage aérien, intégrant
l’IA et permettant déjà de réduire la consommation de carburant de l’ordre de
5% par vol.
o Aqemia (nouvelle levée de 38 M€ en cette fin d’année
après une première levée de 30 M€ sur le S1 2024), cette start-up vise à
accélérer le processus de découverte de médicaments en tirant parti d'une
technologie combinant mécanique quantique et statistique pour alimenter une IA
générative.
o Quantev (30 M€) développe une plateforme d’aide à la
décision dédiée aux assureurs santé, basée sur l’IA.
o Jus Mundi réalise une seconde levée de fonds (20
M€) en propulsant son assistant juridique international avec l’IA générative.
Le
décollage de la Spacetech
La
Spacetech explose, passant de 0 levée en 2020 et 2021 à une petite vingtaine en
2024. Ce secteur dynamise ainsi la Deeptech, avec plus 325 M€ de montants levés
en 2024, en progression significative de 182% par rapport à 2023. A noter que
le financement de la Spacetech sur les 5 dernières années totalise 465 M€,
démontrant une récente montée en puissance des acteurs du New Space français.
Les
opérations majeures sont réalisées par :
o The Exploration Company (150 M€), pépite du
secteur spatial européen avec sa capsule spatiale réutilisable Nyx,
o Unseenlabs (85 M€), flotte de nanosatellite à
Rennes,
o Latitude (27 M€), concepteur de fusée à Reims,
o Infinite Orbits (12 M€), navigation
autonome des satellites souhaitant prolonger leur durée de vie de 5 ans.
L’écosystème
français est solide et structuré, autour d’industriels donneurs d’ordre
(Airbus, Thalès...), organismes de recherche (CNES), constituant un terreau
favorable au développement de la filière sur des projets orientés optimisation
de coûts, nanosatellites ou encore data (avec des projets en convergence avec
la Tech et l’IA). Les financements publics structurants contribuent à rendre ce
secteur attractif. A noter que la Spacetech a le potentiel de transformer
certaines industries clés comme la défense (avec la montée en puissance d’un
secteur DefenseTech), l’agriculture et les télécommunications.
Les
fonds nord-américains et asiatiques à l’affut des pépites de la French Tech
Les fonds
nord-américains renforcent leur présence dans l’écosystème français de
l’innovation. Malgré un ralentissement en 2023 lié à une conjoncture
macroéconomique tendue, ils montrent une reprise progressive et conservent un
fort intérêt pour des investissements stratégiques. En effet, en 2024, ils ont
été impliqués dans 17% des opérations réalisées, un chiffre presque doublé par
rapport aux 9% de 2020, témoignant d'un engouement renforcé pour les pépites de
la French Tech par les investisseurs outre-Atlantique. Cette montée en
puissance s'est matérialisée par des participations dans des méga-levées
emblématiques, telles que celles de Mistral AI, Poolside AI, Alan et The
Exploration Company.
En
parallèle, les fonds asiatiques continuent de se positionner stratégiquement
sur le marché français. Leurs interventions ont progressé de 50% ces 5
dernières années, traduisant une ambition croissante en faveur des start-ups
françaises. Ils ont alterné entre des stratégies très offensives (2021-2022) et
une phase de prudence en 2023. Cependant, la remontée des tickets moyens en
2024 laisse entrevoir une nouvelle phase d’expansion sélective, potentiellement
guidée par des levées ciblées dans l’IA et l’espace.
Les éclairages
des experts sur le contexte français et international
Nicolas
Forey, Président - Associé, In Extenso Innovation Croissance :
« La
contraction globale du secteur du capital risque se poursuit sur 2024, dans la
continuité de l’année précédente, aussi bien en montants levés qu’en nombre
d’opérations, illustrant clairement une tendance de fond depuis deux ans.
Pour
autant la France conserve sa deuxième place sur le podium européen, témoignant
d’une certaine résilience de la French Tech avec 8,1 Md€ (bien au-dessus des 4
Md€ avant la pandémie), portée par des secteurs spécifiques comme les logiciels
(dopés par l’IA) et l’énergie/Cleantech, représentant à eux deux la moitié des
investissements réalisés sur la période.
Malgré
une conjoncture politico-économique toujours aussi incertaine, le maintien de
la dynamique des opérations d’amorçage ainsi que la constitution de nouveaux
fonds de capital-risque sur la période apportent des perspectives positives
pour 2025. »
Nicolas
Landrin, Executive Director, Center for Entrepreneurship & Innovation,
ESSEC Business School : « Dans un contexte géopolitique tendu et face à
une concurrence mondiale accrue, les enjeux de souveraineté technologique et
économique de la France et de l’Europe ont pris une ampleur inédite. Les
Deeptech, en particulier l’intelligence artificielle, et le secteur de la
Cleantech sont au cœur de cette concurrence mondiale féroce. Dans le même
temps, l'écosystème français de l'entrepreneuriat et de l'innovation subit une
pression intense. Après une période d'euphorie, l'activité d'investissement est
entrée dans une phase de ralentissement naturel, ce dont témoigne à nouveau le
baromètre des levées de fonds. Il est donc impératif de revitaliser
vigoureusement la chaîne de valeur de création et de financement des start-ups
ainsi que de renforcer leur compétitivité afin d’éviter que ce trou d’air ne
compromette les capacités d'innovation de l'économie française. »
Jacques
Meler, Co-Président de France Angels : « Le premier semestre
était encourageant avec un maintien du niveau d’investissements de l’année
précédente dans nos start-ups. En revanche le second semestre marque un
tassement très net sans aller au « décrochage ». Nos investisseurs Business
Angels se sont montrés plus prudents et plus sélectifs sur les premiers tours.
Ils maintiennent leur soutien pour leurs participations lors des
refinancements. Un signe plus préoccupant est la recrudescence des
défaillances. »
Pierre
Carli, Président, Capitole Angels : « Comme pour beaucoup, 2024 a été très
contrastée avec un très bon premier semestre, et un second en retrait, malgré
un fort nombre d'adhésions de nouveaux Business Angels, qui conduit à un nombre
de 80 membres jamais atteint depuis la création de Capitole Angels. Au total,
une année en retrait sur les investissements, pour deux raisons principales :
• l'attentisme
des Business Angels dû au contexte économique et aux incertitudes politiques,
• le
retard sur le closing de 4 opérations, reportées sur le T1 2025.
2025
devrait donc démarrer avec une base solide... ! »
Philippe
Rase, Président, Grenoble Angels : « Après un premier semestre 2024
encourageant, le contexte de ce second semestre 2024 plutôt morose du
financement a pour conséquence la recherche de la sécurisation du portefeuille
pour les Business Angels investisseurs de proximité en AURA comme ailleurs. Ces
derniers ont besoin de se projeter de façon claire et pragmatique, tant sur le
développement de la société que dans les perspectives de sortie du capital
proposées. Concrètement, cela se traduit par moins d’investissement dans des
projets avec des visions de développement longues (ex : Medtech, Biotech) et
des attentes plus fortes en termes de traction marché et donc de chiffre
d’affaires mais également de gestion de la trésorerie par la société demandant
à être accompagnée. »
Christophe
Baralotto, Président, Provence Angels : « Une année 2024 à deux visages. Un
premier semestre complexe avec des start-ups rencontrant des difficultés à
boucler leur opération de levée de fonds. Nous avons vu pas mal d'opérations
qui ont dû effectuer plusieurs tranches d’investissement. Au second semestre,
les levées de fond se bouclent enfin. On observe néanmoins une baisse de la
qualité du deal flow et de nombreux porteurs de projet se tournent vers les
Business Angels pour du financement en pre-seed ce qui est parfois délicat
compte tenu de l'incertitude économique que nous traversons. Le réseau, ses
membres et les partenaires restent plus que jamais soudés et présents pour
soutenir les futures pépites qui feront face aux enjeux de demain. »
Laurent
Dumas, Président, Epopée Gestion : « Chez Epopée Gestion, acteur régional de
l’Arc Atlantique, nous ressentons aussi les difficultés de l’investissement VC
en ce moment : dealflow moindre en quantité et en qualité, difficulté à
refinancer les entreprises en portefeuille, cessions poussives. La machine
semble s’être grippée.
Aussi,
nous nous recentrons sur nos fondamentaux : faire le dos rond sur les
entreprises qui prennent plus de temps que prévu, mettre l’accent sur les
entreprises qui marchent, passer encore plus de temps à aider chacune d’elles à
se développer à son rythme grâce à notre équipe « Accélération ». Il est vrai
que le fait d’être un acteur régional nous aide aussi : valorisations d’entrée
moindres, plans de développement plus réalistes. »
Rémi
Spagnol, Directeur d’investissement, Supernova Invest : « Les années
2021-2022 marquaient une période exceptionnelle, mais anormale en termes de
deals et de valorisations, suivie d’une baisse significative en 2022.
Le marché est désormais plus prudent et sélectif, avec des liquidités plus limitées, favorisant les entreprises de premier plan ou évoluant dans des thématiques très attractives, telles que l'IA ou la santé digitale, avec un recentrage sur le growth. »