Le Parquet de Paris, l’Autorité des
marchés financiers (AMF), l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution
(ACPR) et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes (DGCCRF) ont fait le point en fin d'année sur l’évolution des arnaques
financières et leur mobilisation pour lutter contre ce phénomène en forte
hausse.
Un phénomène qui ne
faiblit pas, responsable de lourdes pertes pour les victimes
Les arnaques
financières sont des faits frauduleux qui touchent un large public et prennent
diverses formes : fausses offres de crédits, de livrets d’épargne, de services
de paiement et d’assurance ou encore d’investissements dans des placements
verts ou des crypto-actifs.
Le Parquet de Paris
estime le préjudice global subi par les victimes d’escroqueries financières en
France à au moins 500 millions d’euros par an mais constate une baisse du
nombre des plaintes, susceptible de s’expliquer par le recours à des mécanismes
d’indemnisation civile et par la centralisation des démarches de plainte par
certains cabinets d’avocats.
Le préjudice moyen par
victime observé sur les 3 premiers trimestres de 2024 par l’ACPR s’élève à 69 000€
pour les faux livrets d’épargne et à 19 000€ sur les faux crédits. Depuis
le second semestre 2023, les arnaques sont fortement concentrées sur les
crypto-actifs. Le montant moyen de la perte déclarée auprès de l’AMF, tous
thèmes d’arnaques confondus, se chiffre à fin novembre 2024 à 29 000€.
Selon une enquête BVA
Xsight réalisée pour l’AMF auprès de 5001 personnes de 18 ans et plus
interrogées du 2 au 16 septembre 2024, 3,2% des Français seraient victimes
d’arnaques à l’investissement financier. Cette proportion a pratiquement triplé
en trois ans (1,2% en 2021). Parmi les victimes probables, 45% sont des hommes
de moins de 35 ans, qui semblent être plus réceptifs aux messages incitant à
investir dans des placements prônant l’enrichissement rapide, véhiculés
notamment par les réseaux sociaux. Le sentiment de « s’y connaitre en
matière de placements », le goût pour le risque ou encore la confiance
excessive face à des offres peu réalistes sont certains des traits qui
caractérisent les victimes.
Des escrocs qui
n’hésitent pas à usurper l’identité des autorités et à faire de la publicité
Les autorités observent
de nouvelles tendances dans les modes opératoires des escrocs, qui s’appuient
sur des arguments bien rodés pour faire miroiter à leurs potentielles victimes
de soi-disant placements à rendements élevés garantis permettant de «
devenir riche à tous les coups ».
Les escrocs exercent
une forte pression sur leur victime. L’arnaque au « faux conseiller »
consiste à appeler la victime pour « l’aider » à arrêter une prétendue fraude
sur son compte et à lui faire valider des opérations ou à obtenir ses
identifiants et réaliser ensuite des opérations depuis son espace personnel.
Une nouvelle variante consiste à envoyer un coursier chez la victime afin de
récupérer une carte bancaire soi-disant défectueuse.
L’usurpation d’identité
gagne du terrain, que ce soit celle des autorités et de leurs collaborateurs,
celle des établissements financiers et de leurs conseillers ou encore celle
d’entreprises non financières. Un tiers des arnaques reposant sur des usurpations
signalées à l’AMF utilisent frauduleusement son identité.
Le mode opératoire des
escrocs se perfectionne : des vidéos truquées et de faux articles de presse
détournent ainsi des caractéristiques physiques de célébrités, s’appuyant
parfois sur l’usage de l’intelligence artificielle (IA) : ces personnalités
divulgueraient alors par mégarde la source de leur richesse, obtenue grâce à
une prétendue offre de trading de crypto-actifs, se révélant être une pure
arnaque.
Certains escrocs vont
jusqu’à s’appuyer sur la réputation de certains journaux en insérant de la
publicité ou des publi-communiqués sur de fausses offres d’investissement
usurpant l’identité de sociétés existantes.
Enfin, une nouvelle
technique, que l’on pourrait qualifier de « fraude au carré ou d’arnaque sur
l’arnaque », se développe. Après s’être fait arnaquer une première fois sur un
site frauduleux proposant des crypto-actifs, l’épargnant qui a perdu ses fonds
est contacté par un inconnu. Ce dernier prétend alors être mandaté par une
autorité publique pour l’aider à récupérer son argent, sous réserve… de lui
régler un certain montant.
Ces arnaques prennent
le plus souvent naissance sur les réseaux sociaux qui jouent le rôle de caisse
de résonance. Des influenceurs peuvent ainsi se retrouver au cœur des schémas
des fraudes, en faisant la promotion auprès de leurs communautés d’offres non
autorisées promettant « la liberté financière sans effort ».
Une coopération active
des autorités pour détecter, prévenir et sanctionner
Depuis le 1er janvier
2022, l’AMF et l’ACPR ont inscrit sur leurs listes noires, près de 5 000
acteurs ou offres non autorisés.
La prévention demeure
le moyen le plus efficace pour lutter contre les arnaques et susciter les bons
réflexes. Durant l’été 2024, l’AMF et la
DGCCRF ont ainsi posté sur les réseaux sociaux les plus utilisés par les 18-35
ans, des vidéos thématiques de sensibilisation reprenant les codes qui parlent
aux plus jeunes. En novembre dernier, l’AMF et l’ACPR ont diffusé « Arnaque
ou pas ? », une campagne pour aider le public à repérer les arnaques aux
placements financiers, mobilisant 190 médias. Enfin, l’AMF lance en cette fin
d’année une campagne de vigilance intitulée « Arnaques : il n’est jamais
urgent de perdre son argent ! », afin d’inciter les particuliers à ne pas céder
aux sirènes de l’argent facile proposé par les fraudeurs.
Enfin, sur le volet
répressif, en 2024, le Parquet de Paris a ouvert ou poursuivi des enquêtes
d’ampleur internationale (OMEGA PRO, JUICY FIELDS, etc.) confiées à la section
financière J2 du parquet JUNALCO (juridiction nationale de lutte contre la
criminalité organisée). Depuis sa création en 2020, la section J2 a saisi plus
de 645 M€ d’avoirs criminels, dont 268 M€ pour la seule année 2024.
Dans sa lutte contre la
promotion des produits financiers risqués, la DGCCRF a contrôlé, à date en
2024, près de 30 opérateurs. Sur signalements de l’AMF en septembre dernier, la
DGCCRF a récemment enjoint 10 influenceurs faisant la promotion d’une plateforme
placée sur liste noire par l’AMF, de cesser cette publicité. 8 d’entre eux se
sont mis rapidement en conformité. Les procédures se poursuivent s’agissant des
deux autres influenceurs.
En parallèle, l’AMF
utilise sa compétence lui permettant de saisir la justice pour demander le
blocage de l’accès à des sites frauduleux. Depuis 2022, les procédures engagées
par l’AMF ont permis d’obtenir le blocage de près de 350 adresses internet.
Les autorités réitèrent
leur appel à la vigilance. Face au phénomène des arnaques, il est impératif
d’adopter quelques bons réflexes :
• faire attention aux discours trop beaux pour
être vrais ; face à des offres présentant des rendements élevés et minorant les
risques,
• consulter les registres des autorités (Regafi
pour les établissements de crédit, Refassu pour les assureurs, ORIAS s’agissant
des intermédiaires), et vérifier les listes blanches des acteurs et offres
autorisés (site AMF),
• pour vérifier que la banque n’est pas
usurpée, effectuer un contre-appel au siège de la société à partir d’un numéro
de téléphone trouvé par vos propres moyens,
• vérifier les listes noires des autorités qui
répertorient les acteurs non autorisés,
• bien se renseigner avant d’investir en
s’appuyant sur plusieurs sources,
• protéger ses données personnelles, mêmes non
bancaires,
• au moindre doute, contacter les autorités : AMF : +33(0) 1 53 45 62 00 ; Assurance Banque Epargne Info Service : 34 14 ; SignalConso : pour signaler un problème rencontré avec un professionnel.