L’analyse d’Eric Houdet, Fondateur de
Homapi.
Nous avons fermé les
yeux trop longtemps. Nous avons bâti des vies entières, investi nos économies,
et parié sur l’avenir sans même poser les bonnes questions. Comment peut-on
acheter le toit sous lequel nous vivrons, élèverons nos enfants, vieillirons, sans
même connaître ses fondations ni ses risques ?
Et pourtant, les signes d’alerte sont partout. La canicule de 2003 en France, qui a coûté des milliers de vies, nous avait prévenus. L’effondrement tragique du pont de Gênes en Italie en 2018 a révélé les failles de nos infrastructures face au temps et aux changements climatiques. Et aujourd’hui, les inondations récentes à Valence, en Espagne, nous rappellent brutalement l’urgence de la situation.
Ces événements
ne sont pas des anomalies. Ce sont les conséquences directes de notre
négligence collective, amplifiées par des décennies d’inaction climatique.
Aujourd'hui, le secteur immobilier, loin d’être un simple spectateur, est au cœur du problème.
Il est
responsable de 25% des émissions de gaz à effet de serre et consomme 40% de
l’énergie mondiale.
Chaque maison, chaque immeuble construit ou rénové, est un choix qui pèse lourd
sur la planète et sur l’avenir. Pourtant, les acheteurs, souvent mal informés,
continuent de signer des actes de propriété sans savoir si leur bien est exposé
à des risques climatiques : inondations, sécheresses, éboulements…
Prenons l’exemple des
inondations à Valence. Les pluies torrentielles, amplifiées par le réchauffement
climatique, ont transformé des quartiers entiers en champs de boue, détruisant
des habitations et laissant des familles démunies. Combien de ces propriétaires
savaient que leur maison était située dans une zone à risque ? Combien avaient
été prévenus que les sols de leur région, fragilisés par des années de
sécheresse, ne pourraient plus absorber les excès de pluie ?
Cette ignorance est
coupable.
Elle est entretenue par un système où les annonces immobilières se contentent
souvent d’inclure un lien vers des plateformes comme Géorisques, insuffisantes
pour appréhender réellement l’exposition d’un bien. Mais refuser de voir les
dangers ne les fait pas disparaître.
Le prix de cette
inaction est exorbitant. Un prix humain, comme en France lors de la canicule ou à
Valence lors des inondations. Un prix financier, car chaque catastrophe dévalue
les biens et détruit des années d’économies. Et un prix écologique, car
l’immobilier, au lieu de s’adapter, reste largement ancré dans des modèles
énergivores et polluants.
Pourtant, nous pouvons
agir.
La décarbonation de ce secteur doit devenir une priorité. Il ne s’agit pas
seulement de construire des bâtiments plus écologiques, mais de transformer
notre manière de penser l’immobilier : en considérant ses impacts sur la
planète et en intégrant la transparence comme un impératif. Chaque maison,
chaque immeuble, doit être conçu pour durer et s’adapter à un climat en pleine
mutation.
Mais le problème ne se
limite pas à l’immobilier. L’exploitation massive des ressources naturelles, pétrole,
gaz, terres rares, continue de détruire nos écosystèmes. Quelques-uns prélèvent
80% des ressources sur 3% du territoire, tandis que nous en payons tous les
conséquences. La solution passe par une taxation des prélèvements destructeurs,
pour inciter à des choix plus responsables.
L’immobilier n’est pas qu’un toit, c’est un patrimoine, une transmission. Mais transmettre un logement sans tenir compte des risques climatiques, c’est léguer des problèmes au lieu d’un refuge.
Les catastrophes comme la canicule en France,
l’effondrement du pont de Gênes ou les inondations à Valence ne sont pas des
avertissements lointains : elles sont déjà notre réalité.
Il est temps d’ouvrir les yeux et d’agir, pour nous, pour nos enfants, et pour la Terre.