Alors que de nombreux pays peinent à adopter les voitures électriques, la Norvège connaît une croissance sans précédent des immatriculations de véhicules électriques (VE).
Aujourd’hui, 9 voitures neuves sur 10 vendues dans le pays sont
électriques, un chiffre qui surpasse largement la France et d'autres pays
européens. Mais rattraper la Norvège n’est pas une tâche aisée, car son modèle
repose sur une richesse issue du pétrole et du gaz, ainsi que sur l’utilisation
massive des énergies renouvelables.
- Comment la Norvège
parvient-elle à se différencier ?
- La France peut-elle
rattraper la Norvège ?
Les experts de
carVertical répondent ici à ces questions.
La France réduit les
aides à l'achat des véhicules électriques
La France vise une
production annuelle de 2 millions de véhicules électriques d’ici 2030, soutenue
par des investissements massifs dans le cadre de l’initiative France 2030 dont
l’objectif est de porter les ventes de voitures électriques à 66% des nouvelles
immatriculations et d’atteindre une pénétration de 15% des VE dans le parc
automobile global (contre seulement 2% en décembre 2024). Cependant, les coupes
importantes effectuées sur les aides financières pour l’achat de VE combinées
au ralentissement de leurs ventes et aux incertitudes liées aux normes
environnementales (CAFE), pourraient compromettre l’atteinte des objectifs
environnementaux.
En septembre 2024, les
VE représentaient 20,1% des nouvelles immatriculations en France, avec un parc
total d’1,2 million de véhicules, soit 2,2% du parc automobile global en
janvier 2024. Entre 2018 et 2022, plus d’un million d’éco-bonus ont été
distribués, notamment aux ménages ruraux afin de booster les ventes de
véhicules électriques. Les voitures mises à la casse durant cette période
étaient composées à 75 % de modèles diesel et avaient en moyenne 19 ans.
Malgré ces progrès, le gouvernement français a réduit son budget d’aides à l’achat de VE de
1,4
milliard d’euros en 2024 à 700 millions en 2025, un montant aligné sur celui
d’autres pays européens comme l’Allemagne ou l’Italie, qui diminuent également
leurs subventions.
La France peut-elle
rattraper la Norvège ?
Si les véhicules
thermiques sont destinés à disparaître, l’adoption massive des VE reste un défi
pour de nombreux pays. En France, seulement 34% des Français approuvent
l’interdiction de la vente des nouveaux véhicules thermiques d’ici 2035. Et
pour cause, la majorité des Français pensent que les véhicules électriques sont
aussi nocifs pour l’environnement que les thermiques.
La saturation du marché
ainsi que le plafond de verre entre les voitures électriques et thermiques
confortent ces avis négatifs et les attentes en baisse des constructeurs qui
conservent une part de véhicules non-électriques importante. Enfin, malgré les
incitations du gouvernement (revues à la baisse), les tarifs des véhicules
électriques restent bien supérieurs à ceux d’autres voitures diesel ou essence
et n’incite donc pas à leur adoption.
Comme le souligne Matas
Buzelis, expert automobile chez carVertical, « chaque fois qu’un pays introduit
de nouvelles subventions pour les VE, les ventes augmentent. Cependant,
lorsqu’elles sont supprimées, les ventes chutent. Pour l’instant, il semble que
la France ne soit pas prête à adopter massivement les véhicules électriques, et
il faudra des années pour rattraper la Norvège ».
La Norvège soutient
l’adoption des véhicules électriques grâce aux revenus des énergies fossiles
La Norvège, leader
mondial dans l’adoption des véhicules électriques, finance cette transition
grâce aux revenus de son industrie pétrolière et gazière. Avec un fonds
souverain de plus de 1 700 Mrds$, le pays peut offrir des incitations
financières sans craindre une perte de recettes fiscales.
L’énergie électrique en
Norvège est presque entièrement issue de l’hydroélectricité, rendant
l’utilisation des VE à la fois écologique et économique. Les coûts
d’électricité y sont parmi les plus bas en Europe, ce qui garantit une
exploitation abordable pour tous les conducteurs.
Un système fiscal et
des incitations gouvernementales à l’achat des véhicules électriques
Depuis plusieurs
années, la Norvège a mis en place une série de politiques pour inciter les
automobilistes à adopter les VE. Des taxes d’importation et d’immatriculation
élevées sur les véhicules thermiques, combinées à des exonérations pour les VE,
fonctionnent comme des subventions indirectes. En 2021, ces avantages fiscaux
ont été estimés à 30 milliards de couronnes norvégiennes (environ 3 milliards
d’euros).
Les propriétaires de VE
bénéficient également d’autres privilèges : exemption de TVA (25%), frais de
stationnement gratuits dans de nombreuses zones, accès aux voies de bus, et
réductions allant jusqu’à 50% sur les taxes routières et les frais de ferry.
Ces mesures rendent les véhicules thermiques beaucoup moins attractifs,
contribuant à la domination des voitures électriques.
Une infrastructure de
recharge avancée
Les avantages fiscaux seraient peu efficaces sans un réseau de recharge performant. La Norvège dispose de 13 000 points de recharge, dont 1 600 stations rapides, pour une population de
5,5 millions d’habitants. La capitale, Oslo, offre à elle seule 2
000 stations.
De plus, la faible densité de population et la prévalence des maisons individuelles facilitent l’installation de bornes de recharge domestiques, réduisant la dépendance aux infrastructures publiques. En comparaison, la France, bien qu’elle dispose de près de 150 000 bornes de recharge publiques, souffre d’une couverture rurale insuffisante.