Par Olivier Rull, cofondateur de Caravel.
À l’heure où les
discussions autour du budget 2025 se poursuivent et où l’abrogation de la
réforme des retraites fait débat, le Plan d'Épargne Retraite (PER) s’est imposé
comme l’outil d’épargne incontournable pour préparer sa retraite. Depuis son
lancement en 2019, il a séduit plus de 10 millions de Français, témoignant de
l’intérêt croissant pour ce dispositif. Pourtant, malgré son succès et ses
atouts, le PER ne profite pas équitablement à tous les contribuables. Il
devient donc crucial de repenser son cadre fiscal afin de garantir un accès
véritablement inclusif et équitable à tous les Français, quels que soient leurs
revenus.
Un dispositif inégal pour les Français à revenus modestes
Le PER promet non seulement de compléter les revenus au moment de la retraite, mais il est aussi plébiscité pour ses avantages fiscaux. Aujourd’hui, la réduction d’impôt liée aux versements sur un PER est directement proportionnelle à la tranche marginale d’imposition (TMI) de chaque contribuable. Plus le contribuable est fortement imposé, plus l’avantage fiscal est important, créant une véritable distorsion. Un salarié dans une tranche d’imposition élevée verra son investissement dans le PER largement subventionné par l’État, tandis qu’un travailleur à faible revenu, souvent imposé à un taux bas voire non imposable, ne tirera que peu ou aucun avantage fiscal du même effort d’épargne. Ce déséquilibre engendre une situation où les ménages les plus modestes, pourtant parmi les plus vulnérables face aux aléas de la vie, sont peu incités à se tourner vers le PER.
Les chiffres parlent
d’eux-mêmes : selon l’INSEE, 34% des cadres et professions intellectuelles
supérieures ont souscrit à un PER, contre seulement 16% des ménages les plus
modestes. Ces chiffres révèlent une fracture sociale dans l’accès à l’épargne
retraite, laissant un large segment de la population française en marge d’un
dispositif pourtant essentiel à la préparation de leur retraite. À défaut
d’ajustements, cette situation pourrait fragiliser le système à long terme en
creusant les inégalités, au détriment des objectifs de cohésion sociale.
Vers un crédit d’impôt uniforme pour un PER accessible à tous
Pour pallier ces disparités, une réforme du cadre fiscal du PER est devenue indispensable. Parmi les solutions, l’instauration d’un crédit d’impôt uniforme à taux fixe, par exemple de 30%, pourrait représenter une solution pour créer un système d’épargne retraite véritablement accessible à tous. Concrètement, ce crédit d’impôt fonctionnerait pour les foyers imposables comme une déduction fiscale classique et, pour les foyers non-imposables, prendrait la forme d’un remboursement direct des sommes investies sur un PER. Ainsi, il garantirait une incitation forte pour tous les Français, quel que soit leur niveau de revenu, et encouragerait un plus grand nombre de ménages à investir dans leur retraite.
Le crédit d’impôt uniforme aurait de nombreux effets positifs. Il simplifierait d’abord le dispositif, le rendant plus compréhensible et attractif pour tous, et éviterait que des publics non-avertis se sentent exclus des mécanismes fiscaux en vigueur. Il pourrait également favoriser une dynamique vertueuse, en instaurant une réelle justice fiscale dans l’accès aux produits d’épargne, au bénéfice des générations actuelles et futures.
Un enjeu de société au cœur de notre modèle social
Face au vieillissement
démographique, aux incertitudes économiques et à la fragilité croissante du
système de retraite par répartition, l’épargne retraite est aujourd’hui plus
qu’un simple complément, elle représente un pilier essentiel de notre modèle social.
Ce modèle a longtemps reposé sur la solidarité et le partage des contributions
entre les générations actives et retraitées. Mais, pour que cette solidarité
continue de fonctionner, il est nécessaire d’adapter les dispositifs actuels
aux défis du XXIe siècle. En promouvant un cadre fiscal pour le PER, qui soit
juste et bénéfique à tous, nous assurons à chaque Français la possibilité de
préparer sereinement sa retraite sans distinction de revenus.
La réforme du cadre fiscal du PER s’inscrit donc dans une vision plus large de justice sociale, un impératif pour une société où chacun doit pouvoir bénéficier des mêmes chances de bien préparer sa retraite. Les solutions existent, et il appartient aux législateurs de les porter pour renforcer la cohésion sociale et réduire les inégalités.