AEW, l’un des acteurs mondiaux du conseil en investissement et de la gestion d’actifs immobiliers, publie sa nouvelle étude sur le marché du financement de l’immobilier d’entreprise en Europe.
L’étude montre que le déficit de financement est estimé à 86 Mrds€ sur
la période 2025-2027, soit une baisse de 13% par rapport aux 99 Mrds€ estimés
pour 2024-2026 dans la dernière publication d’avril 2024. Ce déficit de
financement représente la différence entre le montant initial de dette octroyée
entre 2016 et 2023 et le montant disponible au refinancement à l’échéance des
prêts sur les trois prochaines années dans 20 pays en Europe.
Hans Vrensen,
Responsable Recherche & Stratégie Europe chez AEW, commente : « Notre dernière
estimation affinée du déficit de financement de 86 milliards d’euros en
immobilier en Europe confirme que les problématiques de refinancement
persistent. Cependant, les conditions s’améliorent, grâce notamment aux baisses
des taux directeurs des banques centrales qui se sont répercutées sur les taux
d’emprunt d’Etat, les taux swap et les coûts d’emprunt. Avec la hausse des taux
de rendement immobiliers ces deux dernières années, la baisse des coûts
d’emprunt permet à la dette de devenir à nouveau relutive pour les
investisseurs. Cela devrait encourager une amélioration de la liquidité sur le
marché de l’investissement et soutenir le rebond des valeurs vénales des
sous-jacents immobiliers des prêts existants – entraînant une dynamique vertueuse
du refinancement ».
Les conditions de
financement s’améliorent à mesure que le déficit de financement baisse
Les marges et les coûts
d’emprunt tout compris sont orientés à la baisse mais avec des différences
entre secteurs immobiliers. Ainsi, les marges bancaires pour des prêts adossés
à des actifs de bureaux continuent d’augmenter tandis que les marges pour ses
sous-jacents en logistique et en résidentiel ont baissé. Des premiers signaux
indiquent que les ratios de « loan to value » (LTV) augmentent à nouveau et que
les covenants financiers s’assouplissent. En effet, les prêteurs cherchent à
accroître leur activité et la concurrence se fait ressentir, notamment sur les
taux. Malgré ces améliorations des conditions de financement pour les
emprunteurs en immobilier, les enjeux de refinancement persistent pour les
prêts existants du fait de la dépréciation des valeurs vénales des collatéraux
immobiliers.
L’estimation d’AEW du
déficit de financement à 86 Mrds€ implique que près de 13% des prêts en
immobilier en Europe (en pourcentage des prêts octroyés entre 2016 et 2023)
arrivant à échéance pourraient rencontrer des difficultés de refinancement.
Cette estimation de 13% est inférieure à celle d’avril 2024 de 17% pour
2024-2026 et reflète l’assouplissement des conditions de refinancement en
Europe. Elle prend aussi en compte des données plus précises sur les échéances,
les ratios de LTV à l’émission et les extensions de prêts.
L’Allemagne et la
France restent confrontées à un déficit de financement plus important, avec
respectivement 19% et 18% des prêts octroyés entre 2016-23 concernés, et les
pays les plus exposés parmi les 20 marchés couverts. Le Royaume-Uni reste dans
la fourchette basse à 6%, tandis que l’Italie et l’Espagne sont juste
en-dessous de la moyenne européenne à 12%. D’autre part, l’étude indique que,
outre les injections de capitaux propres, le recours à la « dette sur dette » a
également été utilisé plus largement pour combler le déficit de financement.
Des banques et des fonds opportunistes américains commencent aussi à fournir
des financements par emprunt non garanti aux prêteurs non bancaires disposés à
refinancer des prêts existants arrivant à échéance avec des ratios de LTV
élevés.
Pour autant, tous les
prêts difficiles à refinancer ne donneront pas lieu à une défaillance de
l’emprunteur ou à une perte pour le prêteur. L’impact sur les différents
secteurs dépend du timing précis, de la situation des collatéraux et des taux
dans chaque pays et pour chacun des millésimes entre 2016 et 2023.
Les pertes sur les
prêts en immobilier restent bien inférieures aux pertes subies par les CMBS
pendant la crise financière mondiale
Selon l’analyse d’AEW,
7,1% des de 700 Mrds€ de prêts en immobilier octroyés entre 2016 et 2023 sont
estimés en risque de défaut, comparé à l’estimation de 7,5% de février 2024.
Les pertes associées sont projetées à 1,8% (inférieures aux estimations
précédentes de 2,5% d’avril 2024) et au 2,3% de pertes des CMBS en Europe
pendant la crise financière mondiale.
Au niveau sectoriel,
les pertes estimées pour les prêts adossés à des actifs de commerce pour les
exercices 2016-23 s’élèvent à 6% des prêts octroyés en commerces – plus de
trois fois la moyenne tous secteurs, déclenchées par les dépréciations plus
importantes et plus précoces du sous-jacent depuis 2018. Les pertes adossées à
des collatéraux de bureaux sont estimées à 1,7%, soit juste en dessous de la
moyenne. Tous les autres secteurs affichent des pertes estimées inférieures à 1%.
La part des prêts non
performants (NPL) par rapport au total des prêts bancaires en immobilier
d’entreprise est en augmentation
Les données de
l’Autorité Bancaire Européenne à fin 2023 sont mitigées quant à la capacité des
prêteurs à absorber les pertes potentielles. Un des aspects positifs est que
seuls 11% des prêts en immobilier d’entreprise octroyés par les banques de
l’Union européenne se situent dans la catégorie +100% de ratio de LTV. Il faut
relever que les banques sont mieux capitalisées et régulées que lors de la
période précédant la crise financière mondiale. Le taux de NPL sur les prêts en
immobilier d’entreprise des banques européennes est ainsi orienté à la baisse,
passant de plus de 8% en 2020 à 4% début 2023 en raison des dépréciations et
des ventes de prêts non-performants hérités de la crise financière mondiale.
Cependant, le taux de NPL a commencé à augmenter à partir du 2ème trimestre 2023 pour atteindre 4,5% au 4ème trimestre 2023 du fait de la baisse des valeurs vénales induite par la hausse des taux d’intérêts. Cela peut s'expliquer en partie par l’exposition des banques européennes au marché immobilier américain. Au final, le ratio relativement bas de prêts non performants et le taux de couverture élevé des banques européennes s’avèrent plus favorables aux emprunteurs en termes de conditions de financement. Cela devrait soutenir le rebond des valeurs vénales et de l’investissement en Europe au cours des prochains trimestres.