L’analyse de louis Raynaud de Lage de Bartle, Manager Impact
& RSE au sein du cabinet de conseil Bartle
Malgré des progrès dans
plusieurs pays de l'OCDE, la consommation mondiale de charbon a atteint un
niveau record en 2023, en grande partie tirée par la Chine et l'Inde. Alors que
certaines économies avancées réduisent leur dépendance, les pays émergents continuent
d'augmenter leur demande en électricité. La transition énergétique mondiale,
bien que soutenue par les énergies renouvelables, reste encore loin d'éliminer
totalement le charbon.
Selon Louis Raynaud de
Lage, c’est un symbole lourd de sens : le Royaume-Uni ferme sa dernière
centrale à charbon
Ce geste est d’autant
plus significatif que ce pays a initié, au XIXe siècle, la révolution
industrielle, largement fondée sur le charbon et les énergies fossiles. Comme
l’a bien souligné l’historien
Charles-François Mathis, nous avons vécu sous ce
que l’on pourrait appeler une « civilisation du charbon ». L'abondance et le
faible coût de cette ressource ont été les moteurs d’une industrialisation
massive et d'une croissance sans précédent dans les pays occidentaux, façonnant
notre rapport au monde.
Ne nous méprenons pas :
le monde ne tourne pas encore le dos au charbon.
Si la transition
énergétique est en marche dans plusieurs pays de l’OCDE, cela ne suffit pas. La
consommation mondiale de charbon continue de croître, notamment dans les
économies émergentes. En 2023, elle a atteint un niveau record de 8,5 milliards
de tonnes, et la demande mondiale devrait rester stable jusqu’en 2025 selon
l’Agence Internationale pour l’Energie. La Chine et l’Inde, les deux plus
grands consommateurs, représentent respectivement plus de 50% et 14% de cette
demande selon cette même source.
Une double transition
est impérative.
- Premièrement, il est urgent de découpler l’activité économique de la dépendance aux énergies fossiles. Aujourd’hui, bien que les énergies renouvelables (solaire et éolien) connaissent une croissance rapide, elles ne représentent que 12% de la production mondiale d’énergie. Le nucléaire, bien qu’imparfait, offre une alternative fiable à court terme, avec des émissions faibles en CO₂ et un coût de production qui reste compétitif. Les données montrent que la production mondiale d’énergie nucléaire évite chaque année l’émission de 2,5 gigatonnes de CO₂, soit près de 5% des émissions mondiales.
- Deuxièmement, cette
transition énergétique doit être juste et globale. Si les pays riches peuvent
se permettre d'investir massivement dans des infrastructures bas-carbone, les
pays moins développés, souvent très dépendants du charbon, ne peuvent pas suivre
cette voie sans aide extérieure. Or, beaucoup de ces pays sont utilisés comme
plateformes pour l’externalisation des activités industrielles des pays plus
riches. Plusieurs pays asiatiques concernés par cette délocalisation affichent
des taux de dépendance au charbon supérieurs à 50%
Accélérer les
investissements en faveur de la transition énergétique dans les pays émergents
Il existe des
mécanismes pour contribuer à cette transition juste, tels que le Fonds Vert
pour le Climat, bras armé financier de l’Accord de Paris, qui vise à mobiliser
100 Mrds$ par an des pays les plus avancés vers les pays les plus vulnérables
pour mettre en place des projets combattant les effets des changements
climatiques ou d'adaptation au changement climatique.).
À ce jour, les
engagements financiers sont encore insuffisants, n'atteignant que 83 Mrds$ en
2020 (OCDE, 2022). Il est donc nécessaire de créer un mécanisme contraignant
les grands acteurs de l’énergie et notamment les compagnies pétrolières, ainsi
que les grandes banques, à investir massivement dans la transition énergétique
des pays émergents, là où elle est le plus nécessaire et où elle manque le plus
aujourd’hui.
Ce mécanisme de transition juste doit être validé au niveau mondial, idéalement pas lors de la prochaine COP, et intégrerait à la fois des éléments incitatifs (ex : fiscalité avantageuse) pour les énergies renouvelables et dissuasifs pour les énergies fossiles (ex : une taxe carbone mondiale).