L'usure professionnelle est une problématique de plus en
plus préoccupante dans le monde du travail. Contrairement au burn-out, qui est
un état aigu d'épuisement, l'usure professionnelle est insidieuse et
cumulative. Elle se définit comme un état de fatigue physique, émotionnelle et
mentale, résultant d'une exposition prolongée à des sources de stress chronique
ou à des conditions de travail impactant la santé.
Elle touche tous types
de salariés, indépendamment de leur âge ou de leur poste, et remet en question
les politiques RH des entreprises, ainsi que les conditions de mise en œuvre du
travail. Il est essentiel d'aborder cette question, non seulement pour préserver
la santé des travailleurs, mais aussi pour assurer la durabilité et la
performance économique et sociale de l'entreprise. La Société dans son ensemble
en tirera tous les bénéfices.
Dans ce contexte,
APICIL, 3ème groupe français de protection sociale, et le Groupe JLO, cabinet
de conseil RH et QVCT (Qualité de Vie et des Conditions de Travail) publient un
livre blanc sur le défi crucial que représente l'usure professionnelle pour les
organisations et les salariés, tout en proposant des solutions concrètes pour y
faire face.
Parmi les principaux
enseignements
1/ Des enjeux multiples : l'usure professionnelle se manifeste chez les individus par un sentiment d'épuisement, de dépersonnalisation et une diminution de l'accomplissement personnel au travail. Elle peut également avoir des répercussions sur leur état de santé globale avec la survenue d'accidents, de maladies, de restrictions et/ou d'inaptitudes. Sur le plan organisationnel, l'absentéisme peut mener à une diminution de la performance, de la productivité et de la qualité du travail, ainsi qu'à une augmentation du présentéisme et du turnover.
2/ De nombreuses
actions existent pour prévenir et atténuer les effets de l'usure, et garantir
des environnements plus sains et durables. A titre d'exemple :
- Le recrutement : l'usure
professionnelle débute souvent par une inadéquation entre les attentes et les
capacités du salarié d'une part, et les exigences du poste et les attentes du
collectif, d'autre part. Les politiques de recrutement doivent donc intégrer
une vision à moyen terme pour assurer une meilleure adéquation entre le salarié
et son environnement professionnel.
- La formation des
managers :
ils doivent être formés à reconnaître les signes avant-coureurs, comme les
changements de comportement, la baisse de productivité, une irritabilité
accrue…
- La gestion des
performances :
il est essentiel de promouvoir une culture du feedback régulier et constructif,
tout en valorisant la gestion collective des performances sur le long terme.
- La gestion du temps
de travail :
des horaires flexibles, le télétravail et une organisation souple permettent
aux salariés de récupérer et de maintenir leur productivité.
- Une politique de
santé au travail :
la fonction RH doit développer une politique de santé au travail pour faciliter
la détection précoce et encourager les salariés à prendre soin d'eux-mêmes et
de leurs collègues.
- Des programmes de
prévention
pour les seniors intégrant de dispositifs d'aménagement de fin de carrière
(temps partiel, mentorat).
- Le renforcement des couvertures spécifiques,
en lien avec l'organisme assureur, pour les maladies chroniques et les troubles
musculo-squelettiques. Il est également important d'intégrer des services
d'accompagnement au retour à l'emploi après un arrêt long.
3/ Les différentes
parties prenantes au sein de l'entreprise ont un rôle majeur à jouer dans la
lutte contre l'usure :
- La DRH pour sensibiliser,
élaborer des politiques de prévention et promouvoir une culture
organisationnelle favorable à la santé des salariés.
- Les managers pour détecter les
signes de l'usure chez leurs collaborateurs et mettre en place de mesures
d'accompagnement et de soutien individuel.
- Les représentants du
personnel
pour remonter les problèmes liés à l'usure et pour contribuer à la mise en
place de mesures de prévention et de soutien.
- Les services de
prévention
et de santé au travail apportent conseil, accompagnement et assistance à
l'employeur, aux salariés et à leurs représentants dans la prévention des
risques professionnels.
- Les professionnels de
la prévention
(préventeur, ergonome, psychologue) collaborent avec les services de santé au
travail, les managers, les représentants du personnel et les salariés pour
mettre en œuvre des mesures adaptées.
- Les collaborateurs ont un rôle actif à
jouer dans la gestion de leur propre capital santé au travail en identifiant
leurs besoins, en exprimant leurs préoccupations et en participant aux
programmes de promotion de la santé proposés par leur entreprise.
4/ Il existe un lien direct entre des conditions de travail dégradées et le fait d'appartenir à certaines catégories de salariés. Selon l'Observatoire des inégalités (2023), les immigrés, les personnes en situation de handicap, les seniors et les femmes, qui évoluent dans des conditions de travail plus dégradées que la moyenne, sont plus exposés à l'usure. Les salariés aidants, qui prennent soin au quotidien d'un proche fragilisé en plus de leur travail, constituent également une population à risques.
5/ L'évolution
démographique et l'allongement des carrières posent de nouveaux défis
- Les difficultés
cognitives :
avec l'âge, les capacités de concentration et la fatigabilité peuvent se
détériorer, compliquant l'exécution de certaines tâches impliquant ces
facultés.
- L'augmentation des
responsabilités
peuvent être sources de stress supplémentaire.
- La diminution des
opportunités de carrière peut engendrer une baisse de motivation.
- L'appropriation des
évolutions technologiques constitue également une source de stress.
« L'allongement
constant de l'espérance de vie en bonne santé va conduire à une durée
d'activité plus longue. Que ce soit pour des raisons sociales, économiques, ou
le plus souvent pour les deux, les employeurs ont donc pour enjeu croissant de
permettre à leurs collaborateurs de prolonger leur durée d'activité en bonne
santé. En conséquence, la prévention de l'usure professionnelle, déjà adoptée
par de nombreuses entreprises, va prendre une importance stratégique dans les
politiques RH. En tant que groupe de
protection sociale, APICIL doit accompagner les organisations dans la
prévention et l'atténuation des effets de l'usure, afin de garantir des
environnements de travail plus sains et durables », souligne Damien
Dumas, Directeur Général Adjoint Santé Prévoyance du Groupe APICIL.
« L'usure professionnelle est un défi complexe qui requiert plus que jamais une attention particulière de la part des acteurs RH, ainsi qu'une intégration cohérente avec la stratégie globale de l'entreprise. Les organisations doivent aborder ce phénomène de manière proactive et globale, afin non seulement d'améliorer la santé et le bien-être de leurs collaborateurs, mais aussi de renforcer leur compétitivité, leur attractivité et leur performance à long terme. Il s'agit d'un impératif stratégique pour prospérer dans un environnement économique et social en constante évolution », explique Stéphane Roose, Directeur associé, Pôle Conseil du Groupe JLO.