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[Etudes] A l’ère de l’IA, la pseudonymisation s’est imposée comme un instrument majeur de la protection des données personnelles

Conclusions de l’étude du Professeur Théodore Christakis, rendue publique

 

Dans la course mondiale au leadership en IA, le législateur et plusieurs agences européennes, ainsi que plusieurs acteurs économiques de premier plan, se sont saisis de la pseudonymisation comme technique de protection des données. En facilitant le traitement des données à caractère personnel tout en offrant de solides garanties pour leur protection, une pseudonymisation robuste, combinée à d’autres mesures de protection des données, est un levier d’innovation et de compétitivité puissant pour de nombreux secteurs économiques.

 

A la demande du cabinet Samman, cabinet d’avocat spécialisé en affaires publiques, Théodore Christakis, Professeur de droit international, de droit européen et de droit du numérique à l’Université de Grenoble Alpes, a réalisé une étude exhaustive et d’ampleur sur l’importance de la pseudonymisation en droit positif à l’ère de l’Intelligence artificielle.

 

Le RGPD et plusieurs autres textes fondamentaux de l’Union Européenne reconnaissent la grande utilité de la pseudonymisation

 

La pseudonymisation est une technique de dé-identification particulièrement prisée dans les domaines de recherche scientifique, historique ou statistique, car elle réduit les risques d'identification pour les personnes dont les données sont utilisées. Cette technique remplace toute caractéristique d'identification des données par un pseudonyme ou une valeur qui ne permet pas d'identifier directement la personne concernée.

 

Elle est considérée par le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD), le Règlement sur la gouvernance des données, le Règlement sur les données, le Règlement sur les services numériques et l’ensemble des textes législatifs qui constituent les piliers de la stratégie européenne en la matière comme une technique de protection des données et d’atténuation des risques liés au traitement des données.

 

Par exemple, selon le RGPD, qui ne lui consacre pas moins de 15 références, la pseudonymisation permet notamment de renforcer la sécurité des données à caractère personnel, de protéger les données dès la conception, de favoriser la conformité avec plusieurs principes cardinaux de protection des données, et d’atténuer les conséquences d’une violation de données à caractère personnel.

 

Les jurisprudences de l’UE et de plusieurs pays européens reconnaissent l’utilité de la pseudonymisation

 

Le débat juridique sur la pseudonymisation se concentre traditionnellement sur deux approches juridiques : l'approche relative, qui considère le statut des données en fonction de la capacité réelle de réidentification par une partie spécifique ; et l'approche absolue, qui se base sur la possibilité abstraite de réidentification, indépendamment de qui détient les données. Les juridictions européennes n'ont pas encore tranché définitivement ce débat, mais mettent l'accent sur la probabilité pratique de réidentification. Certaines autorités de protection des données adoptent néanmoins une position stricte, privilégiant une approche du "tout ou rien" : soit les données sont anonymisés de façon irréversible auquel cas le RGPD ne s’applique pas (« rien ») ; soit une possibilité abstraite de réidentification existe auquel cas les données sont personnelles et le RGPD s’applique pleinement, la pseudonymisation n’offrant alors aucune « exonération » à son auteur (« tout »).

 

Tout en reconnaissant que les autorités de protection des données ont raison d’insister sur la distinction entre pseudonymisation et anonymisation, l’étude du Professeur Christakis montre que la pseudonymisation est largement reconnue au niveau européen comme une technique efficace pour atténuer les risques liés au traitement des données personnelles.

 

En France, en référé, le Conseil d’État, tout en prenant soin de souligner que l’efficacité des mesures de pseudonymisation devrait être vérifiée par la CNIL, a en 2020 eu l’occasion de souligner que la pseudonymisation, qui réduit le risque d'identification des personnes concernées, par la suppression des informations directement identifiantes, contribue à garantir le droit au respect de la vie privée.

 

Alors que l’intelligence artificielle ouvre la voie à des avancées révolutionnaires dans tous les secteurs de notre société, l’Union Européenne est très clairement en 2024 à la croisée des chemins.

 

Plusieurs agences européennes préconisent de façon constante le recours à la pseudonymisation. L’ENISA (Agence de l’Union Européenne de Cybersécurité) affirme depuis 2019 que la pseudonymisation devient de plus en plus essentielle pour faciliter le traitement des données à caractère personnel, tout en offrant des garanties solides pour leur protection.

 

Le succès des espaces européens communs de données, au premier rang desquels l'Espace européen des données de santé (EHDS), pourrait en fin de compte dépendre d’une approche équilibrée et pratique de la pseudonymisation. Cette dernière pourrait également jouer un rôle important dans la constitution des bases de données d’apprentissage afin d’entrainer les modèles d’IA générative.

 

« La pseudonymisation est une solution pragmatique pour faciliter le partage sécurisé des données au sein des espaces européens communs de données, notamment dans le domaine de la santé, et pour le développement responsable de l'IA. Elle permet de maintenir l'utilité des données tout en offrant, sous certaines conditions, une protection significative, contribuant ainsi à concilier l'innovation technologique avec le respect des droits individuels.  Il est pertinent alors de dépasser le débat binaire entre les approches « relative » et « absolue » pour considérer la pseudonymisation comme une composante essentielle d'une stratégie globale de protection des données. En adoptant une approche équilibrée et pragmatique, il est possible de promouvoir une utilisation responsable des données qui respecte les droits des individus tout en soutenant l'innovation », commente Professeur Théodore Christakis, Professeur de droit international, de droit européen et de droit du numérique, Chaire AI Regulation, à l’Université de Grenoble Alpes

 

« L’étude réalisée par le Professeur Christakis, la première de cette ampleur, est utile car elle permet aux décideurs publics, aux régulateurs et aux acteurs concernés de travailler ensemble de façon pragmatique pour identifier les solutions techniques qui respectent les principes de droit de l’UE et accompagnent les acteurs européens de l’IA », conclut Thaima Samman, Associée fondatrice du cabinet Samman.

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