Depuis plus d’un demi-siècle, la science-fiction met en scène des
interactions entre humains et intelligences artificielles, nourrissant notre
imaginaire avec des scénarios futuristes. Mais aujourd’hui, ces fictions ne
sont plus si éloignées de notre quotidien.
Dirigée par Agata
Mirowska, enseignante-chercheuse à NEOMA, cette étude fait le point sur
l’évolution des agents virtuels, ces assistants invisibles qui s’intègrent peu
à peu dans nos vies. Leur développement rapide, porté par les progrès de
l’intelligence artificielle, soulève une question essentielle : à quoi
ressembleront ils demain ?
De HAL 9000 à 2023 :
quand la technologie rattrape la fiction
« Rappelez vous bien
qu’il ne s’agit que de fiction », écrivait Arthur C. Clarke en 1968 dans son
livre 2001 : l’Odyssée de l’espace, une œuvre marquée par l’ordinateur HAL
9000, doté de capacités conversationnelles. Pourtant, aujourd’hui, la réalité a
rattrapé cette vision futuriste. En 2023, des studios de cinéma envisagent de
remplacer des acteurs par des images générées par IA, une prouesse
technologique inimaginable à l’époque. « Ce qui était autrefois une pure
spéculation devient aujourd’hui une réalité tangible », explique Agata
Mirowska. Mais cette réalité dépasse souvent la simple imitation humaine. Les
agents virtuels, définis par l’étude comme des « entités numériques dotées de
capacités cognitives artificielles », sont désormais capables de prendre des
décisions, d'interagir avec des humains et d'accomplir des tâches complexes de
manière autonome. Si HAL 9000 nous semblait encore lointain, des assistants
comme Alexa ou Siri sont déjà bien présents dans nos foyers. « La fiction a
nourri nos attentes, mais les agents virtuels actuels répondent à des besoins
bien réels », poursuit Agata Mirowska.
L’essor des agents
virtuels : une révolution discrète mais incontournable
C’est après 2014 que la
véritable explosion des recherches sur les agents virtuels a eu lieu, en
parallèle des avancées spectaculaires de l’intelligence artificielle. En
quelques années, ces assistants numériques sont passés des laboratoires de
recherche à nos salons et bureaux, sous la forme de chatbots, d’assistants
vocaux ou même d’influenceurs virtuels. « Leur intégration dans nos vies
s’est faite de manière quasi imperceptible », observe Agata Mirowska. «
Aujourd’hui, nous interagissons avec eux au quotidien, parfois sans même nous
en rendre compte. » Ce succès s'explique notamment par l'élargissement du
champ d’étude des agents virtuels. Ils ne sont plus considérés uniquement sous
un angle technologique, mais aussi à travers leurs applications dans la santé,
l’éducation, ou encore l’assistance à domicile. En plus de faciliter des tâches
comme la prise de décision ou la surveillance, ils jouent désormais un rôle
essentiel dans les services aux personnes et l'accompagnement des
professionnels. « Nous observons une véritable révolution dans des secteurs
clés comme la santé, où ces entités permettent des interactions plus rapides et
personnalisées avec les patients », précise Mirowska.
Coexistence et éthique
: des enjeux cruciaux pour demain
Cependant, cette
omniprésence soulève de nouvelles interrogations. Alors que les interactions
avec les agents virtuels se multiplient, souvent de manière non choisie, se
pose la question de leur impact sur la société et la vie privée. L’étude
insiste sur la nécessité d’analyser en profondeur les aspects négatifs
potentiels de ces interactions. « Les agents virtuels peuvent aussi rebuter
les utilisateurs, notamment lorsque des questions d'intimité ou de confiance
entrent en jeu », affirme Agata Mirowska. Il devient donc crucial de mieux
comprendre les caractéristiques qui rendront ces assistants plus acceptables et
crédibles aux yeux du public.
À l’avenir, les chercheurs prédisent une évolution des agents virtuels vers des robots sociaux, dotés d’une intelligence artificielle plus autonome et d’une forme physique plus sophistiquée. « Nous devons dès maintenant anticiper ces évolutions pour encadrer la manière dont ces entités interagiront avec nous », conclut Agata Mirowska. L'éthique, la responsabilité des algorithmes, et la confiance de l’humain envers ces êtres numériques seront des thèmes centraux des recherches futures.