Focus 2024 / Analyse des délais de paiement dans le
secteur public
La situation se tend
particulièrement pour les plus petits acteurs
Le groupe Altares, expert de la data d’entreprise publie le panorama des retards de paiement des entreprises de la France dans l’Europe au 1e semestre 2024. Pour la première fois, Altares livre un décryptage des délais de paiement observés dans le secteur public et le secteur privé.
- Les retards de
paiement des entreprises françaises s’allongent (12,9 jours ; +1 jour sur
1 an)
- Moins d’une
entreprise française sur deux paye ses fournisseurs à l’heure (48,7%)
- Les délais dans le privé atteignent 12,5 jours
et restent au-delà des 13 jours dans le public
- La situation se dégrade pour
les petits entrepreneurs individuels (plus de 13 jours)
- Dans le public, hôpitaux (20,6 j) et services
déconcentrés de l’Etat (19,9 j) les lanternes rouges
- A l’échelle Europe, le Royaume-Uni (12,2 j) fait désormais mieux que la France
Thierry Millon,
directeur des études Altares, rappelle : « Dans une conjoncture qui souffle le chaud
et le froid, l’incertitude gagne du terrain et pèse sur la dynamique des
affaires et les trésoreries des entreprises en cette rentrée. Un contexte
propice au recours accru au crédit fournisseur en complément voire en
substitution du crédit bancaire. Mais cette approche, qui implique un
allongement des délais de paiement, prive fournisseurs ou sous-traitants de
l’indispensable cash pour investir et parfois pour simplement tenir.
Moins d’une
organisation française sur deux (48,7%) paye ses fournisseurs à l’heure et
c’est à peine mieux en Europe (50,5%). Une performance très insuffisante et
régulièrement pointée du doigt que les initiatives européennes ou françaises ne
permettent pas pour le moment d’améliorer.
La question des délais
de paiement empoisonne les relations entre entreprises mais aussi avec les
acteurs publics.
Dans la fonction
publique de santé (hôpitaux), l’administration de l’état, les métropoles ou
encore les régions, les délais dépassent parfois les 20 jours. »
Dans le public,
Hôpitaux et services administratifs de l’Etat lanternes rouges ; Collèges &
lycées, EHPAD et communes meilleurs élèves
A échelle de l’ensemble
du secteur public, les délais de paiement s’améliorent sur le 2e trimestre 2024
pour retrouver en juin un niveau stable par rapport au S1 2023 à 13,3 jours. Un
chiffre qui masque néanmoins de très importantes disparités selon les services
et échelons territoriaux.
Dans les collectivités
territoriales (retard moyen de 12,7 jours au T2 2024 ; en légère baisse sur un
an), on observe des délais moyens de 12,7 jours pour les communes ; 19,7 jours
pour les départements et plus de 23 jours pour les régions.
A échelle des
établissements publics administratifs (délai moyen de 15,1 jours ; en baisse
sur un an), on enregistre au T2 2024 des retards de 14,2 jours pour les
communautés de commune, 18,3 jours pour les communautés d'agglomération et plus
de 20 jours pour les métropoles.
Dans l’enseignement, le
retard moyen se stabilise sous 12 jours (11,4 jours) pour les établissements
publics locaux d'enseignement (collèges et lycées). A échelle des
établissements publics nationaux à caractère scientifique, culturel et
professionnels (universités), il dépasse le seuil des 15 jours (15,3 jours) en
dépit d’une amélioration sensible sur un an.
Le retard dépasse tout
juste 16 jours (16,1 j) dans les EPIC (établissements publics à caractère
industriel ou commercial) et approche 20 jours pour l’administration de l'état
(principalement les services déconcentrés de l'Etat).
Enfin, dans la santé,
les comportements de paiement se sont dégradés très sensiblement à partir de
fin 2023. Les hôpitaux présentent un retard moyen supérieur à 20 jours (20,6
j). Les établissements publics locaux sociaux et médico-sociaux (Maisons de retraite,
Ehpad) contiennent leur retard moyen proche de 12 jours (12,2 jours).
Dans le secteur privé,
les entrepreneurs individuels sous tension
En moyenne globale, le
secteur privé accuse une augmentation du retard moyen de près d’une journée sur
un an et affiche désormais 12,5 jours.
Les entrepreneurs
individuels présentent la dégradation la plus remarquable. Ces structures,
encore ‘meilleures élèves’ il y a un an avec 8,5 jours de retard, sont
désormais les plus retardataires avec
13,4 jours en moyenne. Soit un dérapage
de près de 5 jours en à peine plus d’un an.
Pour les sociétés
commerciales, l’allongement des délais est bien moins rapide et s’affiche à
12,5 jours, légèrement sous la moyenne nationale de 12,9 jours.
Les comportements de
paiement des associations loi 1901 sont plutôt stables avec des retards
légèrement supérieurs à 11 jours. Quant aux sociétés civiles professionnelles
(activités juridiques ou médicales essentiellement), le décalage de paiement se
maintient sous 10 jours.
L’immobilier affiche
les retards les plus longs tandis que la manufacture et la construction sont
les plus vertueuses.
- Au-delà de 20 jours
de retard
La crise de
l’immobilier entraîne une envolée des défaillances mais aussi des retards de
paiement. La promotion immobilière, qui concentre traditionnellement les
retards les plus élevés, approche le seuil des 27 jours. Pour les agences
immobilières, on parle désormais de 22 jours.
Dans les métiers de la
communication, les retards restent importants. C’est notamment le cas pour les
services d’information (agences de presse) qui dérapent à près de 23 jours en
fin de semestre et des activités de films et son (production de films, enregistrement
etc.) où l’on approche des 20 jours sur le
2e trimestre.
Le secteur des
coiffeurs et soins de beauté est également au-dessus de 21 jours de retard, un
délai qui reste globalement stable sur un an.
- Entre 15 et 20 jours
Entre 15 et 20 jours de
retard, figurent le commerce de gros (B2B) de textile & habillement, les
activités de logiciels, transport, voyage, nettoyage de bâtiments, la
restauration ou les activités culturelles ou sportives.
- Sous le seuil des 10 jours
A l’inverse, la
manufacture présente des comportements plus vertueux. Les retards de paiement
sont inférieurs à 10 jours dans les activités de réparation industrielle,
caoutchouc-plastique, métallurgie-mécanique ou encore matériaux de
construction.
La construction figure
encore dans le top 5 des secteurs où les retards sont les plus faibles. Les
délais observés dans le bâtiment restent sous le seuil des 10 jours.
Les retards sont
également contenus sous 10 jours dans le commerce de détail pour les magasins
multi-rayons, le bricolage et l’équipement du foyer.
Les petites entreprises
en panne de trésorerie ; les plus grandes concentrent les retards les plus
longs mais améliorent leurs pratiques.
Traditionnellement, les
TPE françaises présentent des retards de paiement peu importants et homogènes.
Mais depuis un peu plus d’un an, un clivage se dessine. Depuis le printemps
2023, la situation se tend fortement pour les entreprises de moins de 3 salariés.
Début 2023, elles présentaient encore des délais sous le seuil des 12 jours.
Mais depuis, les délais ne cessent de s’allonger pour atteindre 14 jours à
l’issue du S1 2024.
Les structures de 4 à
49 salariés parviennent à contenir leurs retards sous la barre des 12 jours en
dépit de tensions en fin de semestre.
Les PME de 50 à 199
salariés stabilisent les délais sous la moyenne globale (12,7 jours). Les
structures de 200 à 999 salariés repassent nettement sous le seuil des 15 jours
mais présentent des retards (14,5 j) encore bien supérieurs à la moyenne.
Au-delà de 1000
salariés, les comportements de paiement s’améliorent très sensiblement sur le
2e trimestre (-1 jour) mais le retard moyen demeure très élevé (17,8 jours).
La France se rapproche
de la moyenne européenne de 13,5 jours
La crise sanitaire
avait porté les retards de paiement en France comme en Europe au-delà de 14
jours. La situation s’était ensuite progressivement détendue. En 2022 et 2023,
les retards moyens retombaient à 12 jours pour la France et 13 jours pour
l’Europe.
Mais depuis l’été 2023,
les comportements de paiement se dégradent plus vite en France qu’en Europe.
A
l’issue du S1 2024, les retards s’allongent de 0,6 j pour la France contre 0,2
j à échelle Europe.
Pays-Bas et Allemagne,
tandem des bons élèves
Les Pays-Bas accentuent
leur leadership avec désormais à peine plus de 3 jours de retard (3,3 jours).
Plus de 80% des entreprises néerlandaises payent leurs fournisseurs à l’heure.
L’Allemagne conserve son fauteuil de challenger mais les conditions de paiement
se tendent et la part des très bons payeurs est ramenée à 60% pour un retard
moyen de 6,6 jours.
Derrière la Belgique,
l’Irlande et désormais le Royaume-Uni, la France ferme le peloton des élèves
moyens
La France ferme la
marche d’un groupe aux performances moyennes aux côtés de la Belgique
(12,3
jours), l’Irlande et le Royaume-Uni (12,2 jours). Si la moitié des entreprises
belges décalent leurs règlements de 1 à 30 jours, leurs homologues britanniques
sont bien plus vertueuses. Ces dernières s’inscrivent dans une amélioration
constante de leurs comportements de paiement depuis plusieurs années. Elles
étaient moins de quatre sur dix à respecter les dates d’échéances au printemps
2022 ; elles sont près de six sur dix (57%) désormais.
Les comportements se
dégradent dans les pays du Sud
Les trois pays du sud – Italie, Portugal et Espagne - accusent une dégradation de leurs conditions de paiement. L’Espagne repasse au-dessus de 15 jours de retard (15,3 j), l’Italie franchit la barre des
17 jours (17,1 j) et le Portugal retrouve un retard moyen
de plus de 24 jours (24,3 j).
Thierry Millon conclut : « Les retards de paiement fragilisent sévèrement les trésoreries des entreprises. Le rapport 2023 de l’Observatoire des délais de paiement évalue à 15 milliards d’euros le montant de trésorerie qui pourrait être transféré aux TPME en l’absence de retards de paiement. Chaque jour de retard représente une somme colossale qu’il faut financer. Parfois impossible à couvrir, ce besoin de financement peut précipiter le créancier vers la défaillance. Des travaux de recherche ont montré que l’existence de retards de règlement des clients augmente la probabilité de défaillance du fournisseur de 25 % et même 40 % lorsque les retards sont supérieurs à 30 jours. La lutte contre les retards de paiement demeure donc un enjeu essentiel de compétitivité et de survie pour les entreprises. Les textes plafonnent les délais à 60 jours dans le privé, à 30 jours pour les collectivités locales et l’État, et à 50 jours pour les établissements hospitaliers. Des plafonds trop souvent dépassés notamment faute d’une bonne organisation de la chaine de facturation ou de paiement mais aussi du fait de délais cachés ou de désaccords sur la date de commencement du délai. Depuis ce printemps, les délais de paiement de certaines collectivités sont disponibles en open data. Une démarche visant à apaiser les relations d’affaires et éclairer les décisions. Connaitre les habitudes de paiement de son client qu’il soit public ou privé, français ou international, comme le propose Altares au travers de la plateforme collaborative internationale DunTrade®, est en effet essentiel pour gérer sa prise de risque et piloter son cash. »