Pour Bernard Cohen-Hadad*, Président
fondateur du think tank Étienne Marcel, l'un des principaux héritages des jeux
sera immatériel : la croyance collective selon laquelle c'est lorsque les
Français sont rassemblés qu'ils écrivent les plus belles pages de l'histoire de
France.
Les Jeux Olympiques de
Paris ont été une réussite sportive, et au-delà, incontestable. Quelques
acteurs économiques locaux ont perdu, mais à court terme. Il faut maintenant
transformer l'essai de sorte que la parenthèse enchantée devienne une étape
utile.
Incontestable réussite
Première de l'histoire
olympique à se tenir hors d'un stade, la performance inédite de la cérémonie
d'ouverture, malgré quelques maladresses, avait d'emblée donné le
"la" en offrant aux Français et au monde un spectacle inoubliable
depuis la Seine. Au terme de la cérémonie de clôture, la France est devenue une
véritable nation sportive avec une moisson exceptionnelle de médailles lui
permettant d'arriver 5e dans le classement des médailles. Entre-temps, la
quinzaine des épreuves a apporté entière satisfaction à l'ensemble des parties
prenantes : organisateurs privés et publics, athlètes, spectateurs, touristes,
téléspectateurs. Nul doute qu'il en aille de même pour les prochains jeux
paralympiques.
Mis à part quelques
contrastes relevant d’un inévitable effet vitrine, le pari olympique a été
gagné sur les principaux indicateurs de performance d’un tel événement sportif
international : épreuves sans accroc, sécurité garantie, transports
fluides, ferveur populaire sans précédent. Les organisateurs méritent d’autant
plus d’être salués que ces jeux feront date dans l’histoire olympique pour leur
intégration exceptionnelle du « in » et du « off » des
épreuves au cœur même de la ville hôte.
Gagnants demain
Certains acteurs
économiques locaux ont cependant dû faire le gros dos. La semaine précédant la
cérémonie d'ouverture a été difficile pour les hôtels, cafés et restaurants
localisés dans les périmètres de sécurité et de circulation entourant les sites
de l'événement. Les deux semaines suivantes ont également été laborieuses mais
cette fois pour les établissements situés loin de ces périmètres. Les taxis ont
quant à eux souffert tout au long des jeux du fait des restrictions de
circulation. Si les professionnels du tourisme savaient que ce serait difficile
pendant les jeux, ils ne s'attendaient pas à de telles pertes de chiffre
d'affaires. Quoique l'activité économique se fût ensuite globalement redressée
pendant la quinzaine des épreuves, un mal a été fait. Les commerçants parisiens
qui s'estiment "perdants" comptent désormais sur le bon
fonctionnement de la commission d'indemnisation ad hoc.
Comme Londres et Tokyo
l’ont déjà expérimenté, le gain d’attractivité escompté des jeux pour Paris, la
Seine-Saint-Denis, l’Île-de-France et plus largement le pays, lequel entraînera
enfin des retombées significatives pour les professionnels du tourisme, devrait
être légèrement différé dans le temps. Mais, d’ores et déjà, la Banque de France
anticipe que les jeux devraient assurer un surcroît de croissance de 0,25
points au 3e trimestre.
De l’impact à l’héritage
Il faut maintenant
transformer l'essai olympique pour que l'impact favorable immédiat des jeux
devienne un héritage positif durable. Cet héritage ne saurait être réduit aux
emblèmes de la vasque, des statues et des anneaux olympiques. Il doit aller
au-delà des sites de baignade dans la Seine qui vont dans le sens de l'histoire
urbaine et dont les Franciliens devraient bénéficier dès l'été 2025.
Paris et l’Ile-de-France
doivent devenir plus propres, sûres, fluides et attractives toute l’année, pas
seulement 4 semaines… par siècle ! Ainsi faut-il pérenniser plusieurs des
mesures provisoires permises par la loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux
Olympiques et Paralympiques. Il faut notamment continuer les bonnes pratiques
économiques mises en place en faveur des TPE-PME, les efforts consentis pour
une économie plus humaine, verte et responsable, l'ouverture des magasins le
dimanche, l'usage de la vidéoprotection intelligente ou encore les scanners
corporels à l'entrée des stades. Et s'il faut maintenir la ponctualité et
l'efficacité des transports en commun franciliens, il faut aller beaucoup plus
loin pour améliorer leur accessibilité à toutes les personnes en situation de handicap.
Les jeux paralympiques devront contribuer à faire évoluer les mentalités de
sorte que relever le défi de l'accessibilité dans les dix prochaines années
soit enfin la priorité des priorités dans le domaine des transports.
Last but not least,
c'est un héritage moins tangible et plus immatériel qu'il faut à tout prix
pérenniser : la croyance collective selon laquelle c'est lorsque les Français
sont rassemblés qu'ils écrivent les plus belles pages de l'histoire de leur
pays, celles qui font que le souhaitable devient enfin possible.
*Bernard Cohen-Hadad, Président fondateur du think tank Étienne Marcel et de la CPME Paris Île-de-France, auteur de "L'avenir appartient aux PME" (Dunod, 2024).