L'analyse de Michel Ponsard, associé
chez UGGC Avocats spécialisé en Droit de la Concurrence
Le secteur automobile
est en train de vivre une véritable révolution. L’arrivée des véhicules
électriques (VE) bouleverse en profondeur le modèle économique traditionnel.
- D’une part,
l’émergence de nombreux nouveaux constructeurs, notamment chinois, modifie le
paysage concurrentiel avec des modèles de distribution innovants et souvent
soutenus par des subventions domestiques qui risquent de fausser la
concurrence.
- D’autre part, les VE
posent des problèmes majeurs en matière d’accès aux matières premières,
particulièrement les batteries, et de développement du réseau de recharge.
L’essor des véhicules
hybrides et rechargeables est notable. Ils représentaient 18% des immatriculations en
2021 et ont atteint 25,7% en 2023, selon l’Autorité de la Concurrence (ADLC).
Cependant, cet essor s’accompagne de défis significatifs concernant les
infrastructures de recharge. Le 30 mai 2024, l’ADLC a rendu un avis crucial sur
ces infrastructures, mettant en lumière les problèmes persistants et offrant
des recommandations pour les surmonter.
Les acteurs du secteur
de la recharge électrique sont nombreux et variés : opérateurs de
recharge, opérateurs de mobilité et plateformes d’interopérabilité. Ces acteurs
interagissent avec une multitude d’entités, telles que l’État, les
concessionnaires, les collectivités territoriales, les établissements publics
et les propriétaires de terrains privés accessibles au public. Cette complexité
relationnelle entraîne une grande disparité sur le territoire national quant à
l’existence et la fiabilité du réseau de recharge, élément essentiel pour le
succès des VE.
La principale
difficulté réside dans le manque de coordination entre les différents
intervenants.
Cela conduit à une couverture inégale, laissant certaines zones très mal
desservies. Cette disparité est un frein majeur au développement des VE, car
l’accessibilité et la fiabilité des infrastructures de recharge sont des
conditions sine qua non pour encourager les utilisateurs à adopter ces
nouvelles technologies.
En outre, l’information
sur les coûts et les systèmes de recharge reste largement insuffisante. Les
utilisateurs potentiels des VE se heurtent à un manque de transparence qui
complique leur prise de décision. L’avis de l’ADLC propose de nombreuses recommandations
pour améliorer l’efficacité de la mise en place et de l’utilisation de ces
infrastructures.
Parmi les
recommandations, l’ADLC souligne la nécessité d’une meilleure coordination
entre les différents acteurs pour garantir une couverture homogène du
territoire. Cela implique une collaboration renforcée entre les opérateurs de
recharge, les collectivités territoriales et les autorités publiques pour
planifier et développer un réseau cohérent et fiable.
L'ADLC préconise
également une amélioration de l'information fournie aux utilisateurs, tant sur
les coûts que sur les modalités de recharge. Une transparence accrue
permettrait aux consommateurs de mieux comprendre les avantages et les coûts
associés à l’utilisation des VE, et de faire des choix éclairés.
Enfin, l’ADLC insiste
sur l’importance de soutenir l’innovation dans le secteur des infrastructures
de recharge. Cela passe par des investissements dans la recherche et le
développement pour améliorer les technologies de recharge rapide et augmenter
la capacité des batteries, ce qui représente un frein majeur aujourd’hui pour
l’attractivité des VE. Une innovation continue est essentielle pour répondre
aux besoins croissants des utilisateurs et pour maintenir la compétitivité du
secteur automobile européen face à la concurrence internationale.
En conclusion, la transition vers les véhicules électriques représente une opportunité majeure pour transformer le secteur automobile vers un modèle plus durable et innovant. Cependant, cette transition ne peut réussir sans une coordination efficace des acteurs et une amélioration significative des infrastructures de recharge.
Les recommandations de l’ADLC offrent une feuille de route précieuse pour surmonter ces défis et favoriser l’essor des véhicules électriques en France. Il est essentiel que tous les acteurs concernés, des entreprises aux autorités publiques, travaillent ensemble pour bâtir un avenir où la mobilité électrique soit accessible à tous, fiable et économiquement viable.