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une nécessité pour réindustrialiser la France en tenant les objectifs de
décarbonation
A la suite de la mise en place du conseil stratégique de la recherche des écoles d’ingénieurs, la CDEFI (Conférence des directeurs des écoles françaises d'ingénieurs) publie un premier travail émanant de celui-ci, fondé sur la recherche scientifique en ingénierie.
Alors que les grandes
puissances industrielles asiatiques et nord-américaines accélèrent, la France
et l’Europe doivent consolider leur positionnement stratégique et accroître
leur compétitivité. Aujourd’hui plus que jamais, toute nation ayant pour
ambition de conserver une influence géopolitique dans l’économie mondialisée se
doit d’affirmer sa capacité à innover tout en tenant compte de l’urgence
climatique.
Or, la souveraineté économique de la France, sans laquelle cette puissance relative ne pourra pas être acquise, nécessite de former des cadres tout en produisant des connaissances scientifiques, ce que les écoles d’ingénieurs savent faire.
C’est un
fait, la France possède un riche héritage en matière d'ingénierie et
d'innovation. Des ingénieurs français ont contribué de manière significative à
des avancées majeures dans divers domaines : aérospatiale, énergie, transports,
technologies de l'information, compréhension du climat, agronomie.
Pour maintenir cette tradition d'excellence française et en faire un moteur de réindustrialisation au bénéfice des grandes transitions, il est essentiel de réinvestir massivement dans la formation des ingénieurs. En effet, au cours des quinze prochaines années, pour relever les défis des transitions énergétique et numérique notamment, l’industrie devrait procéder à environ 100 000 recrutements nets par an en France. Former ces futurs collaborateurs nécessite un investissement massif dans les établissements qui assument cette mission.
Par
ailleurs, cet apport de compétences sur le long terme doit s’appuyer sur
l’assurance d’un vivier massif de jeunes scientifiques. De ce point de vue, les
écoles d’ingénieurs ont déjà alerté les responsables politiques quant à la
baisse significative d’attractivité des carrières scientifiques chez les jeunes.
Plus en amont, l’affaissement général du niveau en mathématiques de nos lycéens
crée une vulnérabilité nationale pour l’avenir.
Pour
permettre aux entreprises d’innover afin de gagner en compétitivité, il est en
outre nécessaire de produire les connaissances scientifiques en ingénierie. L’investissement
dans la recherche en ingénierie constitue un vecteur essentiel mais méconnu et
finalement peu exploité dans le cadre des grandes stratégies nationales.
Précisons
de quoi il s’agit : la recherche en ingénierie est d’abord plurielle,
multifacettes. Elle porte par exemple sur les nanotechnologies et les matériaux
avancés qui ouvrent de nouvelles perspectives d’application grâce à des gains
en compacité, en légèreté, en résistance, gains essentiels aux industries de l’aérospatiale
et des nouvelles mobilités. Dans le domaine des énergies renouvelables, les recherches
en technologies de stockage du carbone permettent de diminuer les impacts
négatifs de la production de nos usines sur l’environnement. En ce qui concerne
le numérique, des technologies quantiques, des outils basés sur l’intelligence
artificielle, des robots sont mobilisés pour transformer et sécuriser notamment
nos outils de production, de calcul et de communication.
Les exemples thématiques sont nombreux et montrent qu’il existe un lien vertueux entre production et connaissance, dès lors que celle-ci est mise en œuvre et valorisée par des ingénieurs au cœur des processus industriels dans nos territoires.
Au-delà
de l’appui essentiel apporté aujourd’hui par le Secrétariat général pour l’investissement
(SGPI) dans la trajectoire nationale de réindustrialisation, il nous semble
particulièrement important de renforcer davantage l’interdisciplinarité,
l’approche systémique et sociétale des grandes transitions. Et c’est ce qui
caractérise la recherche en ingénierie, qui exploite les sciences
fondamentales, les technologies avancées, les sciences humaines et sociales et
les besoins de transformation de la société. La recherche en ingénierie est
pratiquée selon une vision systémique, qui intègre de manière native l'ensemble
du cycle de vie des produits, de leur création jusqu’à leur recyclabilité. La
recherche scientifique en ingénierie est le terreau fertile où naissent les
idées nouvelles et les technologies de rupture qui transforment notre manière
de vivre et de travailler.
Autrement
dit, l’ingénierie comme ensemble disciplinaire constitue le pilier fondamental
de l'innovation technologique et de la compétitivité industrielle. Des
investissements judicieux dans ce domaine ont conduit, conduisent et conduiront
à la création de valeur, de nouvelles industries et de nouveaux emplois.
Les
écoles françaises d'ingénieurs, si particulières au regard des autres types
d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche qui existent à
travers le monde, sont en mesure de jouer un rôle majeur dans cette création de
valeur. Leurs expertises en matière pédagogique et leurs infrastructures de
recherche rendent possibles les avancées des connaissances et les innovations
technologiques.
En lien
avec le processus de formation, les ingénieurs diplômés de nos écoles
représentent 55% des chercheurs employés en entreprise. Les écoles sont aussi
au cœur de la production scientifique académique : deux tiers des
doctorants en sciences et technologies sont encadrés par au moins un enseignant-chercheur
d’une école d’ingénieur. Enfin, dans les classements internationaux, les écoles
d’ingénieurs sont très présentes, notamment eu égard aux objectifs de
développement durable et de transitions.
Par cette
prise de position, nous souhaitons voir émerger une volonté de renforcer le
pouvoir économique de la France, volonté qui se traduit notamment par le soutien
de la recherche produite par les écoles d'ingénieurs, des aspects les plus
fondamentaux de la recherche scientifique jusqu’à la contractualisation avec
les entreprises.
Ainsi,
outre les financements de projets, notamment via les outils de France
2030, il nous semble fondamental d'assurer une présence des écoles
d’ingénieurs autour de la table des prises de décision stratégiques, tant au
niveau des agences de programmes que des comités de filières. Cette présence
est la condition nécessaire pour gagner en cohérence et en efficacité dans la
mise en œuvre des politiques de recherche et d'innovation.
Cet investissement dans l'avenir de notre pays, dans sa capacité à innover, à créer et à prospérer, peut faire de la France une grande puissance mondiale. Il est temps d'agir avec audace pour que la vision française du futur énergétique, technologique, organisationnel, climatique rayonne à travers le monde.