L’UNESCO a approuvé la désignation
de 11 nouvelles réserves de biosphère dans 11 pays, dont la Belgique et la
Gambie désignés pour la première fois, et deux réserves de biosphère
transfrontières. Les autres nouvelles réserves de biosphère sont situées en
Colombie, en Espagne, en Italie, en Mongolie, au Royaume des Pays-Bas, aux
Philippines, en République de Corée, en République dominicaine et en Slovénie.
Avec ces nouvelles réserves, qui représentent une superficie totale de 37 400
km², soit l’équivalent de la taille des Pays-Bas, le Réseau mondial des
réserves de biosphère compte désormais 759 sites dans 136 pays.
« Ces nouvelles
désignations arrivent à un moment crucial pour l’humanité qui se trouve
confrontée à une crise mondiale de la biodiversité et au dérèglement
climatique. À l’heure où la communauté internationale est appelée à accroître
le nombre de zones protégées, ces nouvelles réserves de biosphère jouent un
rôle essentiel pour la préservation à long terme de la biodiversité,
l’amélioration des conditions de vie des populations locales et autochtones, et
l’essor de la recherche scientifique », déclare Audrey Azoulay, Directrice générale
de l’UNESCO.
Ces nouvelles
désignations ont été décidées lors de la 36e session du Conseil international
de coordination, l’organe directeur du Programme de l’UNESCO sur l’Homme et la
biosphère, composé de 34 représentants des États membres de l’UNESCO. Le
Conseil a tenu sa session du 2 au 5 juillet à Agadir, au Maroc, à la suite de
la Conférence de l’UNESCO sur les sols.
Les réserves de
biosphère sont un élément essentiel du mandat de l’UNESCO, Organisation des
Nations Unies pour les Sciences. Chaque réserve de biosphère encourage des
solutions locales innovantes en matière de développement durable, protège la
biodiversité et lutte contre le dérèglement climatique. Ces réserves apportent
également un soutien aux communautés locales et autochtones grâce à des
pratiques telles que l’agroécologie, la gestion de l’eau et la génération de
revenus respectueux de l’environnement.
Les réserves de
biosphère contribuent à atteindre les objectifs que se sont fixés les Etats en
décembre 2022 en adoptant le Cadre mondial de la biodiversité Kunming-Montréal
qui prévoit d’instaurer des zones protégées représentant 30 % de la surface
terrestre et marine de la planète et de restaurer 30% des écosystèmes dégradés
de la planète d’ici à 2030.
Les 11 réserves de
biosphère nouvellement désignées sont les suivantes
Réserve de biosphère
transfrontière de Kempen-Broek (Belgique, Royaume des Pays-Bas)
Sur des terrains plats,
parsemés de zones sablonneuses aux ondulations légères, la région de
Kempen-Broek offre à la vue un paysage pittoresque et un mélange captivant de
curiosités naturelles et de traces de l’Histoire humaine. Si les zones humides
autrefois étendues ont été transformées en terres agricoles au XIXe siècle, la
région en conserve des vestiges sous forme d’étangs, de marais et de forêts de
tourbières.
La région, réputée pour
être l’un des principaux habitats des libellules en Belgique et aux Pays-Bas,
abrite des prairies et des champs dans ses vallées, tandis que les zones
situées en altitude sont principalement dédiées à l’agriculture. Vers le nord, de
vastes étendues de landes et de dunes abritent d’intrigants sites
préhistoriques.
Nichés sur les
hauteurs, villes et villages parsèment cette riche tapisserie, où diverses
espèces d’oiseaux s’épanouissent dans des paysages variés.
D’une superficie de 264
km², la réserve de biosphère compte environ 75 000 habitants. Le tourisme et
l’agriculture sont les piliers de son économie. Il s’agit de la première
réserve de biosphère désignée en Belgique, qui la partage avec le Royaume des
Pays-Bas.
Réserve de biosphère de
Darién Norte Chocoano (Colombie)
Au sein de la dynamique
écorégion du Darien, dans le département biogéographique du Chocó, se trouve un
pont de biodiversité qui relie la faune et la flore de l’Amérique du Nord à
celles de l’Amérique du Sud, avec des espèces emblématiques comme le majestueux
aigle harpie (Harpia harpyja) et des grenouilles vénéneuses aux couleurs vives.
Mosaïque tentaculaire d’écosystèmes allant de la luxuriance des forêts
tropicales humides aux zones marines du golfe d’Urabá, la région couvre un
vaste territoire de 3 016 km², dont près de 40% de zones marines.
Son parc archéologique
et son musée sont une destination touristique. Ils racontent comment s’est
établie dans la région l’une des premières zones de peuplement espagnoles sur
le continent américain, la ville de Santa María La Antigua del Darién fondée au
début du XVIe siècle.
La réserve de biosphère
compte une population diversifiée de 24 287 habitants, principalement composée
d’autochtones et de personnes d’origine afro-colombienne. Les communautés
locales, et en particulier les jeunes et les femmes, ont activement participé à
la présentation de la proposition de désignation à l’UNESCO. Les plans de
gestion des zones protégées au sein de la nouvelle réserve de biosphère
prévoient le passage à une agriculture durable, l’amélioration de la chaîne de
commercialisation des produits agricoles et le développement d’un projet
d’écotourisme communautaire.
Réserve de biosphère du
Val d’Aran (Espagne)
Située à la frontière
occidentale des Pyrénées catalanes, la réserve de biosphère du Val d’Aran, qui
s’étend sur environ 632 km2, est la seule vallée de Catalogne orientée au Nord.
Sa position unique de ligne de partage des eaux entre la Méditerranée et l’Atlantique
lui confère une grande diversité de paysages climatiques et biologiques. Elle
est aussi un bastion du patrimoine culturel et linguistique occitan.
Le Val d’Aran, qui
compte 9 983 habitants, a prospéré au cours de l’Histoire grâce à des activités
agricoles, artisanales et commerciales. Récemment, la réintroduction de
spécimens d’ours bruns a suscité des inquiétudes chez les éleveurs locaux.
La désignation de la
zone comme réserve de biosphère a représenté une étape décisive pour
l’amélioration de la protection de la biodiversité et la revitalisation des
pratiques traditionnelles, l’objectif étant d’enrayer le dépeuplement et
d’assurer la transition vers un modèle de développement rural plus résilient.
Le plan de gestion de la réserve de biosphère a été minutieusement conçu avec
les représentants des villages appartenant aux associations locales de
promotion du tourisme et de l’élevage.
Réserve de biosphère
d’Irati (Espagne)
La réserve de biosphère
d’Irati se situe dans la zone de moyenne montagne des Pyrénées occidentales.
Havre de biodiversité, ses vastes forêts sont dominées par les hêtres communs
et les sapins, ce qui en fait la deuxième hêtraie d’Europe par sa taille. Le
site abrite les pittoresques vallées de Salazar et d’Aezkoa, au nord-est de la
Navarre, sa superficie est de 537 km² et sa population de 2 435 habitants.
Activement engagée dans
le processus de nomination depuis 2015, la communauté locale a joué un rôle
central dans l’élaboration de la structure de gestion pour la réserve de
biosphère. Cette structure comprend un conseil d’administration et un conseil
consultatif représentant diverses parties prenantes, alliant associations
culturelles et de conservation et groupes de femmes. Le plan de gestion de la
réserve de biosphère d’Irati témoigne des efforts de conservation menés par la
communauté.
Réserve de biosphère de
Niumi (Gambie)
Le long de la rive nord
du fleuve Gambie, la réserve de biosphère de Niumi côtoie la réserve de
biosphère du Delta du Saloum au Sénégal. À l’intérieur de ses frontières, les
mangroves dominent dans les zones côtières et sur les rives du fleuve, tandis
qu’en aval, des formations de calcaire rouge impressionnantes ponctuent les
forêts tropicales et les zones de savane.
La réserve de biosphère
abrite certaines des dernières forêts de mangroves vierges d’Afrique de
l’Ouest, ainsi que la réserve de la zone humide de Bao Bolong et diverses
forêts domaniales. Elle englobe également une zone humide concernée par la
Convention de Ramsar et l’île Kunta Kinteh, classée au patrimoine mondial de
l’UNESCO, lieu historique où étaient détenues les personnes réduites en
esclavage avant leur transport vers les Amériques, aux XVIe et XVIIe siècles.
D’une superficie de 1
937 km², la réserve de biosphère abrite environ 178 000 habitants, qui vivent
principalement de l’agriculture et de la pêche. Il s’agit de la première
réserve de biosphère désignée en Gambie.
Réserve de biosphère
des Colli Euganei (Italie)
Ce paysage pittoresque
de la région de Vénétie, au nord-est de l’Italie, est constitué de pas moins de
81 collines volcaniques, dont l’imposant Monte Venda, qui s’élève au milieu de
stations thermales et de plaines verdoyantes plantées d’oliveraies et de
vignobles.
La région, qui englobe
15 municipalités, offre un riche patrimoine naturel et culturel. Son histoire
volcanique et ses eaux thermales contribuent à son attrait, et font d’elle le
plus grand bassin thermal d’Europe. D’une superficie totale de 341 km², la
réserve de biosphère abrite une population de
111 368 habitants.
La flore et la faune
variées et endémiques de la plaine de Vénétie sont présentes dans la réserve de
biosphère, qui a noué des partenariats avec des universités et élaboré un cadre
de gestion étoffé. Les collines Euganéennes (Colli Euganei) sont d’origine
volcanique. La région encourage l’agriculture durable et l’écotourisme dans le
cadre d’une gouvernance participative, afin de poser les bases d’une
coexistence harmonieuse entre les activités économiques humaines et la
préservation de l’environnement.
Réserve de biosphère
transfrontière des Alpes Juliennes (Italie, Slovénie)
Cette réserve de
biosphère transfrontalière est le résultat de la fusion de deux réserves de
biosphère, l’une slovène désignée en 2003 et l’autre italienne désignée en
2019. Elle couvre une superficie de
2 671 km², qui comprend des aires centrales
de 735 km², des zones tampons de 438 km2 ainsi que des aires de transition
d’une superficie totale de 1 497 km², où vivent 109 060 habitants répartis dans
20 municipalités.
La région présente une
mosaïque de montagnes alpines et de plateaux karstiques parsemés de cascades et
de lacs aux eaux cristallines. Des ours bruns, des lynx, des loutres et des
chats sauvages composent sa riche biodiversité.
La proposition
d’inscription de ce site transfrontalier a été minutieusement élaborée dans le
cadre d’un processus de planification participatif, dans lequel se sont
engagées 176 institutions et organisations des deux pays, ainsi que des
étudiants, des groupes de recherche et des acteurs de l’industrie du tourisme.
Réserve de biosphère du
lac Khar-Us (Mongolie)
Située dans les vastes
étendus occidentales de la Mongolie, la réserve de biosphère du lac Khar Us
occupe une large dépression du bassin des Grands Lacs, qui s’étend sur 14 153
km², dans la province de Khovd. Ses divers écosystèmes englobent des domaines
aquatiques, des déserts, des terres de haute montagne et des paysages de
steppe, dont chacun contribue à la richesse écologique de la région.
La réserve de biosphère
se compose d’une aire centrale de 703 km², d’une zone tampon de 7 800 km² et
d’une aire de transition de 5 650 km². Elle est régie par le droit mongol, qui
garantit un équilibre entre la conservation de la nature et le développement
durable. Refuge pour des espèces rares et menacées, elle l’est aussi pour le
patrimoine culturel, car elle abrite différents groupes ethniques qui assurent
leur subsistance grâce à une forme durable d’élevage.
Des efforts sont
actuellement entrepris pour développer un écotourisme durable, en accord avec
l’accent mis par la province de Khovd sur le tourisme patrimonial pour sa
diversification économique. Les éleveurs locaux ont formé des organisations
communautaires pour sauvegarder leurs pâturages et leur faune, ce qui est un
signe de leur engagement en faveur de la conservation et des moyens de
subsistance durables.
Réserve de biosphère
d’yApayaos (Philippines)
La réserve de biosphère
de la province d’Apayao se divise en deux régions distinctes : le Haut Apayao,
qui présente un relief accidenté de sommets, de plateaux et de vallées, et le
Bas Apayao, qui se caractérise par des plaines surplombées de collines et de
plateaux. Longue de 180 km, la majestueuse rivière Apayao joue le rôle de
bassin versant vital, alimentant 18 affluents dans la province.
Le vocable yApayao
désigne à la fois les populations humaines et la flore et la faune diverses qui
vivent dans la région. Celle-ci abrite plusieurs groupes ethnolinguistiques et
10 communautés culturelles autochtones, dont les traditions et les lois sont
profondément liées à la terre et à ses ressources. La communauté Isnag/Isneg
représente notamment 30% de la population ; elle fonctionne selon le système du
Lapat, une pratique coutumière singulière qui régit l’utilisation des
ressources naturelles et protège l’environnement.
Reconnue pour son
importance écologique, la région abrite la forêt des basses terres d’Apayao,
une zone de biodiversité essentielle, qui présente des niveaux élevés
d’endémisme et offre un refuge à des espèces extrêmement menacées telles que le
pithécophage des Philippines ou aigle des singes (Pithecophaga jefferyi).
Sa population de 124
366 habitants vit principalement de la culture du riz et du maïs. Cependant,
l’écotourisme progresse dans la province. La réserve de biosphère occupe une
superficie de 3 960 km².
Réserve de biosphère de
Changnyeong (République de Corée)
Située dans la région
centrale de la province de Gyeongsangnam-do, la réserve de biosphère de
Changnyeong forme une mosaïque de biodiversité et de patrimoine culturel.
Sur une superficie de
531 km², elle offre au regard une diversité de paysages qui vont des forêts
luxuriantes du mont Hwawang à la vaste zone humide d’Upo, en passant par des
terres agricoles. Elle offre un sanctuaire à plusieurs espèces et parvient à
atteindre un équilibre délicat entre les écosystèmes d’eau douce, les forêts
débordantes de vie et l’agriculture durable. La zone humide d’Upo, notamment,
atteste de la réussite des efforts de conservation, puisque l’ibis japonais à
crête (Nipponia nippon), une espèce menacée, y a fait sa réapparition en 2008.
En 2018, le district de Changnyeong-gun a été reconnu comme ville de zone
humide selon la Convention de Ramsar.
Avec une population
majoritairement établie dans la zone de transition et la zone tampon, la région
fait figure de pionnière en matière de diversification agricole grâce à la
culture des spécialités locales telles que les oignons et l’ail, associée à des
activités d’écotourisme.
Réserve de biosphère de
Madre de las Aguas (République dominicaine)
Au cœur de la
République dominicaine, la réserve de biosphère de Madre de las Aguas est un
vaste territoire qui englobe 11 provinces et 35 municipalités ; elle abrite une
population de 472 526 habitants et couvre une superficie de 9 374 km².
Elle se caractérise par
une topographie variée, sculptée par la Cordillère centrale. Un éventail de
merveilles naturelles, allant des hauts plateaux aux chutes d’eau en cascade,
forme le tissu complexe de ses paysages. Cette réserve de biosphère comprend
quatre écosystèmes distincts qui abritent
88 espèces aviaires, dont 20 sont
endémiques et 17 menacées. C’est le cas de la buse de Ridgway (Buteo ridgwayi),
considérée comme étant en danger critique d’extinction par l’Union
internationale pour la conservation de la nature.
Pour les acteurs locaux, la désignation de la région comme réserve de biosphère aura un effet positif sur les conflits actuels liés à la terre en offrant des possibilités de dialogue et de développement durable, principalement par le biais de l’écotourisme et de l’agriculture.