Baromètre Fondation MMA des
Entrepreneurs du Futur & Bpifrance Le Lab « Forme et état d’esprit des
dirigeants de TPE, PME et ETI » Mars 2024 - 10e édition
Interrogés sur leur
rapport à la maladie longue, les dirigeants de TPE PME et ETI lèvent un tabou :
87% choisissent d’en parler au travail
La Fondation
d’entreprise MMA des Entrepreneurs du Futur a interrogé en mars 2024 pour la
10e année consécutive les dirigeants de TPE/PME et ETI sur leur forme physique
et psychologique et s’associe cette année à Bpifrance Le Lab pour une étude
inédite sur les maladies longues. Alors que la maladie reste un sujet
douloureux pour une majorité des Français actifs (51% des actifs pensent
encore qu’il est difficile de révéler son cancer), 87% des dirigeants sondés
ont fait le choix de parler de leurs problèmes de santé à leur entourage
professionnel.
L’enquête, menée auprès
de plus de 1 500 dirigeants entre février et mars 2024, brosse le portrait de
décideurs toujours plus nombreux à se dire en bonne forme physique (90%,
+7pts), tout en confiant leurs difficultés toujours patentes pour maintenir un
bon équilibre pro/perso (37%) et assurer un suivi médical régulier.
Pour Sylvie Bonello,
Déléguée générale de la Fondation MMA Entrepreneurs du Futur : « Depuis
10 ans, la
Fondation des Entrepreneurs du Futur interroge les femmes et les hommes
dirigeants d’entreprises sur leur perception de leur état de santé et comment
ils s’approprient la gestion de leur santé. Bonne nouvelle, 90% de nos sondés
se disent aujourd’hui en bonne forme physique et la forme psychologique se
stabilise à 76%. Des taux qui ne doivent pas faire oublier les réalités du
quotidien de nos dirigeants : maintenir l’équilibre vie pro/perso reste un vrai
défi et il leur est encore souvent difficile d’instaurer un suivi régulier chez
leur médecin. Cette année, nous interrogeons pour la première fois les
décideurs sur leur appréhension de la maladie longue : comment ils la vivent,
comment ils l’anticipent pour eux-mêmes comme pour leur entreprise. »
Élise Tissier,
Directrice du Lab de Bpifrance, poursuit : « La santé des dirigeants de
TPE/PME, souvent propriétaires de leur entreprise, est le premier actif hors
bilan de l’entreprise. D’où l’importance de l’étude réalisée chaque année par
la Fondation MMA Entrepreneurs du Futur. On y voit en 2024 de bonnes nouvelles
: un état de santé des dirigeants globalement bon, aussi bien sur le plan
physique que sur le plan psychologique, une pratique du sport de plus en plus
fréquente qui est même devenue la première pratique de bonne santé devant
l’alimentation, et des dirigeants industriels qui affichent un moral supérieur
à la moyenne ! En revanche, quelques signaux faibles sont à suivre dans le
temps sur la santé psychologique, en particulier pour les plus jeunes
dirigeants. Cette année, le focus sur les maladies longues montre que 4% des
dirigeants souffrent d’une telle maladie, un chiffre dans la moyenne des
Français, alors même que l’âge moyen des dirigeants est plus élevé. Les tabous
semblent être tombés, dans la lignée de ce qui s’observe dans la société dans son
ensemble. »
Depuis la crise
Covid-19, le rapport des dirigeants à leur santé a été bouleversé : la santé
physique s’améliore d’année en année mais la forme psychologique est en dents
de scie.
Ce 10e baromètre révèle
qu’en 2024, 90% des dirigeants se disent en bonne santé physique (+ 7 points
vs. 2023) et 76% s’estiment en bonne santé psychologique.
En 2019, avant que la
crise sanitaire n’émerge, les dirigeants se disaient à 79% en bonne forme
physique et à 86% en bonne forme psychologique. Depuis la crise, les décideurs
sont chaque année plus nombreux à se dire en bonne santé physique tandis que
les indicateurs sur leur état de santé psychologique n’ont jamais retrouvé les
seuils d’avant crise.
En 2024, les jeunes
dirigeants, plus en forme physiquement, sont aussi les plus fragiles sur le
plan psychologique.
Les jeunes dirigeants
sont 96% à se dire en bonne santé physique. Pour autant, ils indiquent une bien
moins bonne forme psychologique que leurs aînés. Les 18/24 ans sont 30% à
évoquer une forme psychologique passable ou mauvaise, contre une moyenne de 24%
pour l’ensemble des dirigeants.
Le moral des dirigeants
reste stable par rapport à 2023, mais il est davantage fragilisé dans les
secteurs des transports, de l’agriculture et de la construction.
76% des décideurs
évoquent une bonne forme psychologique. Un taux stable par rapport à 2023 qui
ne doit pas masquer des réalités contrastées d’un secteur à l’autre. Ainsi,
dans le secteur des transports, 39% des dirigeants affirment avoir une santé
mentale passable ou mauvaise. Ils sont 38% dans l’agriculture et 29% dans la
construction.
Des chiffres à mettre
en regard avec les tensions observées dans ces secteurs où les défaillances
d’entreprises ont bondi en 2023 (+ 40,7% pour la construction, + 30,7% dans les
transports et + 7% pour l’agriculture).
A l’inverse, les
dirigeants de l’industrie affichent un bon moral avec seulement 16 % indiquant
une santé mentale passable ou mauvaise, soit 8 points en dessous de la moyenne
de 24%.
Le mal de dos, les
douleurs articulaires et les troubles du sommeil restent les douleurs les plus
fréquemment citées.
Signe d’une forme de
rapport paradoxal à leur santé physique, les dirigeants – de plus en plus
nombreux à se dire en bonne santé – sont 71% à évoquer des troubles physiques
récurrents. Un taux qui reste stable comparé à 2023.
Le mal de dos, cité à
47% ; les douleurs articulaires, citées à 38% ; et les troubles du sommeil,
cités à 36% restent de loin les troubles plus fréquemment évoqués.
Vous arrive-t-il de
ressentir les douleurs physiques suivantes ?
(Plusieurs réponses
possible, total supérieur à 100%)
L’importance croissante
du sport et d’une bonne hygiène de vie dans le quotidien des chefs d’entreprise
pour se prémunir contre la maladie.
Des dirigeants en
meilleure forme grâce au sport ? Pour prévenir la maladie, les dirigeants sont
54 % à indiquer avoir repris une activité physique régulière. Un pourcentage
qui dépasse l'attention accordée à une alimentation plus saine (48 %), qui
arrivait historiquement en tête des ‘bonnes pratiques’ évoquées lors des
baromètres précédents.
Cet attrait pour
l’activité physique est tout particulièrement important pour les dirigeants les
plus jeunes et les plus âgés : 74 % des dirigeants de 18/24 ans et 65 % des
dirigeants des plus de 65 ans affirment avoir repris une activité physique
régulière pour prévenir l’apparition de la maladie grave.
Mais un suivi médical
qui reste insuffisant, en particulier pour les décideurs des secteurs les plus
fragilisés économiquement. Les chiffres sur le renoncement aux soins ne
s’améliorent pas d’année en année.
Le renoncement aux
soins reste un phénomène patent chez les dirigeants. 32% des sondés confient
avoir renoncé à aller voir un médecin dans les 12 derniers mois, dont 15% à
plusieurs reprises. Des indicateurs stables par rapport à l’an passé. Les
dirigeants évoquent à 60% un manque de temps et la nécessité de privilégier
leur activité.
10% des décideurs
admettent ne jamais consulter de médecin. Un taux qui augmente dans les
secteurs en difficulté sur le plan économique. Ils sont 15% dans la
construction et 22% dans les transports.
Enfin, sur le plan de
la prévention, 2/3 des dirigeants ne vont chez le médecin qu’en cas de problème
(63%), un taux en légère hausse par rapport à 2023 (59%) et ils sont 27 % à
avoir instauré un checkup médical régulier.
37% des dirigeants
rencontrent encore des difficultés à concilier leur vie professionnelle et leur
vie personnelle.
Interrogés sur leur
équilibre vie professionnelle et personnelle, 37% des dirigeants confient leurs
difficultés à concilier les deux sphères. Un taux qui reste stable depuis cinq
ans. Les agriculteurs sont tout particulièrement concernés puisqu’ils sont 57%
à éprouver des difficultés pour équilibrer vie professionnelle et personnelle.
Focus 2024 – Les dirigeants
face à la maladie
4% des dirigeants
interrogés sont ou ont été touchés par une maladie longue, évoquant en majorité
le cancer.
Le cancer est la
première maladie citée par les dirigeants (35%), suivie des maladies chroniques
telles que le diabète, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin et
la sclérose en plaque (25%) et des maladies cardio-vasculaires (13%).
La maladie longue
touche davantage les plus de 65 ans (12%) et les dirigeants d’entreprises de
1
à 5 salariés.
Une grande majorité des
chefs d’entreprise a choisi d’évoquer ses problèmes de santé auprès de son
entourage professionnel (87%).
Les dirigeants sont 38
% à informer en priorité leurs équipes et leurs conseils (avocats,
experts-comptables, consultants) et 35% mentionnent leur banquier. Alors que la
maladie reste un sujet tabou pour une majorité des actifs (51% des actifs
pensent encore qu’il est difficile de révéler son cancer, selon le Baromètre
Cancer@Work 2021), les chefs d’entreprise sont 87% à avoir choisi d’en parler
dans leur entourage professionnel.
19% des dirigeants ont
même choisi de communiquer publiquement sur leur état de santé via messages
internes et/ou mails clients.
Dans votre
environnement professionnel, qui avez-vous informé de vos problèmes de santé ?
(Plusieurs réponses
possible, total supérieur à 100%)
44% des dirigeants ont
craint pour l’avenir de leur entreprise à cause de leurs problèmes de santé et 21%
ont constaté une baisse de leur chiffre d’affaires dans ce contexte.
Interrogés sur le lien
entre leurs problèmes de santé et leur activité, 44% des dirigeants confient
avoir craint pour l’avenir de leur entreprise. 1 décideur sur 5 (21%) a même
constaté une baisse de son chiffre d’affaires et la perte de clients.
A noter que les
dirigeants possédant des entreprises de plus grande taille - de 6 à 49 salariés
- sont moins inquiets face à la maladie : 75% déclarent qu’ils n’ont pas craint
pour l’avenir de l’entreprise.
Concernant leur
quotidien au travail, 29% des chefs d’entreprises ont réorganisé leurs
activités, quand 22% indiquent avoir été contraints de mettre en pause voire de
stopper leurs activités.
Questionnés sur les
conséquences de leur maladie sur leurs collaborateurs, 62% des dirigeants
disent n’avoir constaté aucun impact. Lorsque c’est le cas, pour 24%, cette
situation a développé l’esprit d’équipe au sein de l’entreprise.
Confrontés à la
maladie, les dirigeants restent combatifs et attachés à leur fonction. Ils sont
84% à déclarer n’avoir pas revu leur fonction de dirigeant suite à leur
situation de santé.
Quels impacts la
maladie a-t-elle ou a-t-elle eu sur votre entreprise ?
(Plusieurs réponses
possible, total supérieur à 100%)
Chez les dirigeants qui
n’ont pas été touchés par la maladie, la prévention prime sur la prévoyance.
Interrogés sur leur appréhension de la maladie longue, les dirigeants qui n’ont pas été touchés par des problèmes de santé démontrent qu’ils privilégient largement la prévention santé aux actions de prévoyance.
S’ils sont 82% à avoir
instauré des pratiques de prévention santé au quotidien (sport, hygiène de vie,
etc.), ils sont ‘seulement’ 49% à avoir pris des dispositions de prévoyance
pour être couvert, accompagné dans le cas de la survenue d’une maladie grave et
invalidante. 17% des décideurs interrogés ont réfléchi à un ‘plan d’action’
(personne de confiance identifiée, réflexion sur l’aménagement de
l’organisation).
A noter enfin qu’ils sont 53% à estimer qu’ils envisageraient de se faire remplacer partiellement ou totalement si un grave problème de santé devait arriver.
Lorsqu’on « ne rentre pas dans les cases* » :
un casse-tête administratif Christine
Patoux Gavaudan, psychologue du travail et chargée de mission Caire 13 :
« Le
sentiment de ne pas rentrer dans les cases est subjectif mais correspond
à un vécu difficile. En parallèle du parcours de soin et dans un état de
santé physique et mentale dégradé, les démarches administratives pour
maintenir l'entreprise et les revenus se révèlent particulièrement lourdes
pour les dirigeants. S'ajoutent à cela des complexités administratives, des
interlocuteurs multiples ou encore la non-attribution de certaines
aides sur lesquelles ils pensaient pouvoir s’appuyer. » « Vous passez un temps infini à
essayer de comprendre ce qu’on veut de vous, à poser des questions, se
documenter, refaire des dossiers, des photocopies… » « Tout le monde me donnait des
réponses toutes prêtes qui ne correspondaient pas à mon cas. Sur certains
dossiers, ça ne fonctionnait pas parce que j’étais en création, ou à cause de
nos revenus, ou autre chose. » Faire face à l’annonce du diagnostic « C’est comme se prendre un 33 tonnes. » « J’ai toujours été très active, je continuais de tout mener de
front, de me maquiller, de maintenir l’apparence, et peut-être à cause de ça,
on ne me prenait pas au sérieux. Pendant 2 ans et demi, on m’a dit que
c’était psychosomatique, que j’avais une dépression, alors que j’avais un
cancer ORL. » Poursuivre ou cesser son activité : une décision
difficile « Je dois faire des recherches sur mon traitement à la place des
médecins, sinon je ne m’en sortirais pas, et alors que j’ai tous les effets
secondaires de la chimio, je passe des heures au téléphone pour les dossiers
d’aide. Je suis obligée d’arrêter. » « Je suis passée en société pour pouvoir sous-traiter et
payer des charges, et passer plus de temps en prospection. » Continuer à travailler avec la maladie « Il fallait changer les plannings de toute façon, pour
faire rentrer la chirurgie et la chimio » « [Mes salariés] se sont
satisfaits d’avoir été un peu plus responsabilisés, d’avoir géré les affaires
courantes, mais j’ai été assez déçu, et conscient des limites à ce moment-là.
» « La solidarité dont les clients ont fait preuve ne
m’offrait qu’un droit à l’erreur très relatif. » « Mon conjoint m’aidait, mais il ne comprenait pas. Il me
fallait 2 heures pour rédiger un paragraphe. » Et après… « Quand j’étais en chimio, je n’avais plus besoin de faire
les activités les plus physiques au garage, comme le pointage des pièces ou
le grand ménage du vendredi, mais maintenant c’est comme avant. » « [Suite à ma maladie], on a décidé de proposer un
collectif d'agence pour pouvoir travailler d'une manière plus fluide, moins
stressante et quand il y en a un qui est malade, en vacances ou quoi que ce
soit, on peut récupérer le projet et le travail. » |