Le portage salarial est en vogue. Amastène Medjkane, associé Walter France, explique ici les avantages pour les entreprises et pour les consultants.
Le portage salarial est une forme d’exercice à mi-chemin entre le salariat et l’entrepreneuriat. Lorsqu’un salarié veut se mettre à son compte, et qu’il souhaite tester le marché sans créer immédiatement sa structure juridique, il peut se faire « porter » par une société de portage salarial. Dans ce cas, il lui appartient de trouver ses propres missions avec ses propres clients, et c’est lui qui gère sa relation client. La société de portage salarial ne s’immisce pas dans cette relation. Elle est centre de gestion administrative et intermédiaire entre les deux. C’est elle qui facture le client final, selon le montant indiqué par le consultant, et c’est elle qui établit le bulletin de paie au consultant. Ce mode d’exercice est omniprésent dans l’activité informatique mais elle s’étend rapidement à d’autres secteurs d’activité.
> Les consultants gagnent davantage qu’en salariat
Alors qu’au premier abord, on pourrait penser que la société de gestion retenant des frais de gestion, le salarié va gagner moins, c’est tout l’inverse. En effet, cette solution est intéressante pour un consultant porté, qui financièrement, va gagner davantage que s’il était un salarié classique. Sa rémunération peut être jusqu’à 30% supérieure.
La raison est la suivante : lorsqu’une entreprise emploie un salarié « classique », la marge que réalise l’employeur tourne autour de 50% ; ce ne sont donc que 50 à 60% du chiffre d’affaires qui sont transformés en salaire. Compte tenu du fait qu’une société de portage ne « ponctionne » que 5% de frais de gestion, et en prenant en compte les autres frais qu’elle va soustraire, ce sont 90 à 95% du chiffre d’affaires facturé qui sont transformés en salaire.
> Pas de soucis de gestion pour les consultants
Un autre avantage pour les consultants qui n’ont pas tous la fibre administrative : une fois qu’ils ont trouvé un client, c’est la société de portage salarial qui gère tout et qui leur établit un bulletin de salaire. C’est ainsi que ce statut, qui est le plus souvent une passerelle entre le salariat et l’entrepreneuriat, peut devenir, pour certains, un statut plus pérenne.
Ce sont plutôt des consultants expérimentés qui choisissent de se faire « porter », tout simplement parce qu’ils doivent être capables de trouver des clients puis de gérer la relation avec eux, ce qui est plus difficile pour un junior débutant.
> Les sociétés de portage salarial sont de plus en plus nombreuses
Le portage salarial est un marché porteur. Actuellement les sociétés qui décident de se lancer réussissent à passer rapidement, parfois en une seule année, de zéro à une vingtaine de consultants portés. Par voie de conséquence, la concurrence s’accroît et le rapport de force bascule clairement en faveur des consultants.
C’est en 2008 que le portage salarial est né juridiquement en France, par la loi dite de modernisation du marché du travail, et une convention collective des salariés en portage salarial a été conclue en 2017. Aujourd’hui, les sociétés de portage salarial sont confrontées aux mêmes défis que les autres entreprises, c’est-à-dire qu’elles doivent faire des efforts pour attirer et fidéliser les consultants. Pour cela, la Fedep’s, association de défense des salariés en portage salarial, a mis en place un « label zéro frais cachés », gage de transparence.
Pour obtenir ce label et en faire un argument d’attractivité, les sociétés de portage salarial s’engagent à être totalement transparentes dans les frais qu’elles déduisent du chiffre d’affaires réalisé avec le client.
Comment est calculé le salaire d’un consultant porté ?
Chiffre d’affaires facturé au client final |
- Frais de gestion de la société de portage, autour de 5% |
- Autres frais engagés par la société de portage, que le consultant aurait de toute manière à engager s’il était à son compte : assurance, CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises), médecine du travail, etc. Généralement 1,5 à 2% |
- Frais engagés par le salarié et qu’il transmet lui-même à la société de portage : communication, prospection, outils de travail, transport, hébergement, copies, etc. |
= Enveloppe qui reste pour le salaire « chargé » (charges patronales et salariales) |
Certaines vont même jusqu’à faire bénéficier leurs salariés de chèques vacances ou de chèques culture ; en revanche il existe encore un flou juridique autour de l’intéressement et de la participation.
> Le compte d’activité permet de se constituer une cagnotte
Les salariés sont généralement embauchés en CDI avec, dans la plupart des cas, un seul contrat à la fois. Et la convention collective prévoit une certaine souplesse pour les fins de contrats qui n’existe pas pour les autres entreprises. La société de portage salarial peut par exemple licencier un salarié qui ne retrouve pas de nouvelle mission au bout d’un mois.
Les salariés disposent d’un compte d’activité au sein de la société de portage salarial. C’est-à-dire que certains salariés ne perçoivent pas l’ensemble de la rémunération à laquelle ils peuvent prétendre, mais conservent une partie de leurs droits sur ce compte d’activité, ce qui leur permet de provisionner une rémunération pour les périodes d’intercontrats où ils n’ont pas de client.
> Attention au délit de marchandage
Disposer d’un consultant via une société de portage salarial offrira une grande souplesse au client final. Il paiera la facture à la société de portage salarial, généralement basée sur un coût journalier du consultant. Comme toute prestation de services, il n’aura pas à gérer les congés, les arrêts maladie, etc.
Mais attention au délit de marchandage, qui constitue un délit pénal, caractérisé par le transfert du lien de subordination de l’employeur (en l’occurrence la société de portage salarial) au client final. Ce délit a été instauré pour protéger les droits des salariés. Le client final devra veiller à ce qu’il n’y ait pas de lien de subordination entre lui et le consultant, à ne pas lui imposer des dates de congés, etc. C’est pour cette raison que le client final impose généralement des missions courtes et renouvelées.