Les Français et les décideurs économiques ont une forte attente vis-à-vis des États pour agir contre le changement climatique.
À l’occasion de la COP28, l’ADEME publie la 24ème vague du baromètre sur « Les représentations sociales du changement climatique des Français », avec, cette année, en plus du grand public, un échantillon de décideurs économiques, déjà interrogé en 2018. Depuis la première édition de son baromètre en 2000, l’ADEME souhaite mettre en lumière les représentations des phénomènes liés au changement climatique dans notre société.
Selon les derniers résultats, le sujet de l’environnement et de la transition écologique se maintient dans les principales préoccupations des Français malgré le fossé intergénérationnel qui semble se creuser et un contexte économique et politique pesant. Comme les entreprises, les citoyens attendent beaucoup des États pour agir contre le changement climatique.
Malgré le contexte économique et politique, le sujet de l’environnement se maintient dans le top 3 des préoccupations des Français
Le sujet de l’environnement se maintient ces dernières années en troisième position des principales préoccupations des Français, à égalité cette année avec la sécurité des biens et des personnes (12%) et juste après l’immigration (13%), deux sujets qui remontent dans le haut du classement.
La forte montée de la préoccupation environnementale s’observe depuis 2019. Le chiffre est d’autant plus significatif cette année, qu’il se maintient en dépit de la forte inflation depuis 2022, qui propulse la question de la hausse des prix très largement en tête du classement (28%).
Un fossé intergénérationnel qui se creuse entre des jeunes plus pessimistes face aux conséquences du changement climatique et des aînés plus sceptiques face au discours scientifique
Les jeunes se montrent plus pessimistes quant aux conséquences du changement climatique : seulement 15% des 15-17 ans pensent que la société s'y adaptera sans trop de mal contre 40% des 65 ans et plus. Si comme dans les vagues précédentes les jeunes font preuve d’une préoccupation plus marquée que leurs ainés pour l’environnement, ils se montrent également nettement plus convaincus par le caractère anthropique du changement climatique et font confiance aux scientifiques : cette conviction culmine à 80% parmi les 15-17 ans, contre 59% parmi les 65 ans et plus ; elle atteint 88% pour ceux qui se classent « très à gauche » contre 43% « très à droite ».
Depuis 2011, 3 personnes sur 4 en moyenne estiment que les scientifiques évaluent correctement les risques du changement climatique. Dans cette 24ème vague, cette proportion diminue légèrement. Et le scepticisme vis-à-vis du changement climatique et de ses causes anthropiques concerne presque un tiers des Français : quand 64 % identifient le changement climatique comme résultant des activités humaines, 28% croient à un « phénomène naturel comme la Terre en a toujours connu », 3 % seulement niant la réalité du changement climatique.
Si le changement climatique est aujourd’hui perçu comme une contrainte plus qu’une opportunité pour 58% des Français (+9pts cette année, plus haut niveau jamais atteint), c’est encore plus le cas pour les 65 ans et plus (66%) que pour les jeunes (49% des 18-24 ans).
Alors que plus de 8 Français sur 10 ont le sentiment d’agir à leur échelle, ils sont beaucoup à attendre des États des actions contre le changement climatique
84% des Français estiment déjà fournir des efforts pour réduire leurs émissions. Et de fait, on observe une hausse marquée des personnes qui déclarent : moins consommer (56%, +19pts depuis 2017), limiter leur consommation de viande (52%, +16pts depuis 2014), ne pas prendre l'avion (56%, +20pts depuis 2018), ou encore baisser la température de leur logement (70%, +9pts depuis 2018).
Pourtant, 60% déclarent qu’ils pourraient faire plus. Il y a donc un enjeu à développer les conditions favorables à l’adoption de modes de vie moins émetteurs de gaz à effet de serre.
Une grande majorité des répondants est en attente de plus d’équité dans la transition. En effet, 67% accepteraient des changements importants dans nos modes de vie à condition qu’ils soient partagés de façon juste entre tous les membres de notre société.
À la question « A votre avis, qui serait le plus efficace pour résoudre le problème du changement climatique ? », les répondants classent en premier les États (55%), suivi des citoyens (38%) puis des instances internationales et des entreprises (respectivement 29 et 28%). Mais lorsqu’on leur demande qui agit le plus aujourd’hui, les États arrivent en quatrième position (26%), derrière les citoyens (43%), les associations (33%), les collectivités (27%) et devant les entreprises (18%) et les instances internationales (15%).
Une baisse régulière année après année de la confiance et de la capacité des instances internationales à régler le problème du changement climatique est constatée : seuls 27% des Français jugent les instances internationales efficaces, alors qu’ils étaient 34% en 2016.
A contrario, le rôle accordé aux collectivités a augmenté. De fait, 84% des Français pensent que leur territoire sera obligé de prendre des mesures importantes dans les décennies à venir pour s'adapter. La connaissance des mesures d’adaptation prises dans les territoires progresse nettement cette année (de 50% à 60%), mais les jugements négatifs concernant ces mesures, considérées comme insuffisantes, continuent à dépasser les jugements positifs (38% contre 22%)
Focus sur les décideurs économiques
Plus sensibles que le public à la question du changement climatique, 88% des décideurs économiques se disent favorables à des mesures interventionnistes des pouvoirs publics.
Les dirigeants d'entreprise citent l'environnement loin devant les autres sujets de préoccupation (59% contre 39% pour la hausse des prix et 37% pour l’emploi). Ils se montrent également plus convaincus de la réalité d’un changement climatique d’origine anthropique que le grand public (82% contre 64%) et qu’il y a 5 ans (+8pts).
Ils se sentent plus concernés qu’en 2018 par les enjeux relatifs au changement climatique pour leur activité :
« l’augmentation du coût de l’énergie » est l’enjeu qui témoigne de la plus forte hausse (cité par 77% des répondants, +32 pts), suivi des « modifications climatiques (température, sécheresse) » (40%, +14 pts), ou encore le « développement des énergies renouvelables » (40%, +14pts) et la « réduction des consommations d’énergies fossiles » (40%, +9pts).
88% des décideurs économiques sont favorables à des mesures interventionnistes des pouvoirs publics : si 62% se disent favorables à des aides sans imposer de contraintes, 26% considèrent que les pouvoirs publics devraient prendre des mesures contraignantes pour les entreprises (mise en place d’obligations et de sanctions en cas de non-application).
84% des décideurs économiques se disent par exemple favorables à l’instauration d’un prix élevé du carbone.
Ils jugent également prioritaire de revoir en profondeur le système économique du pays : 78% considèrent que le gouvernement devrait en priorité réorienter en profondeur notre économie en soutenant exclusivement les activités qui préservent l’environnement, la santé et la cohésion sociale (vs. 58% des Français). Alors que pour 22%, la priorité est de relancer l’économie par tous les moyens afin de renouer au plus vite avec l’activité (vs. 40% des Français).
Enfin, alors que 61% d’entre eux considèrent que l’activité de leur entreprise a des impacts sur le climat, et que 72% jugent leur entreprise capable de réduire significativement ses émissions, les décideurs économiques eux-mêmes ne considèrent pas les entreprises comme les acteurs agissant le plus, les situant en 5ème position après les États, les collectivités, la société civile et chacun d’entre nous.