Ainsi, des règles plus strictes pourraient obliger jusqu'à 45% des fonds ISR à céder des sociétés pétrolières et gazières d'une valeur de 7 Mrds€.
Suite à l'annonce de Bruno Lemaire, ministre des Finances concernant la future exclusion des pétrolières et gazières, Hortense Bioy, directrice de la recherche sur le développement durable de Morningstar a analysé les fonds et les actions qui pourront être impactés.
Le label ISR, créé en 2016, est devenu un outil majeur de la finance durable en France, avec près de 1 200 fonds actuellement certifiés, représentant environ 770 Mrds€ d'actifs sous gestion.
Le 7 novembre 2023, le ministre des Finances Bruno Le Maire a annoncé qu'il soutiendrait la proposition du comité de labellisation pour un label plus ambitieux et plus exigeant, et, entre autres, l'élargissement du champ d'exclusion. A partir de 2025, les fonds utilisant le label ISR français ne pourront plus investir dans des entreprises impliquées dans de nouveaux projets liés à l'exploration, l'exploitation et le raffinage de combustibles fossiles, qu'ils soient conventionnels ou non conventionnels. En outre, les entreprises fortement émettrices de carbone seront tenues d'adopter progressivement des plans de transition alignés sur l'Accord de Paris.
Selon Bruno Le Maire, les critères d'éligibilité plus stricts sont "essentiels" pour lutter contre le réchauffement climatique et permettront aux investisseurs axés sur le développement durable de savoir plus facilement ce qu'ils obtiennent réellement.
Principaux enseignements de ces critères
- Sur les quelque 1 200 fonds labellisés ISR identifiés dans Morningstar Direct, 45% ont une certaine exposition au secteur de l'énergie traditionnelle, pour un total d'environ 7 Mrds€ d'actifs.
- Les trois fonds les plus exposés au secteur du pétrole et du gaz en termes de pourcentage sont Tocqueville Value Europe ISR, CM-AM Europe Value et DNCA Invest Archer Mid-Cap Europe, avec des pondérations de 13-14% et des valeurs de participation comprises entre 49 et 62 M€.
- Les trois fonds les plus exposés au pétrole et au gaz en euros sont iShares MSCI USA SRI ETF (324 M€), iShares MSCI World SRI ETF (208 M€) et Eleva European Selection (171 M€).
- Les principales valeurs énergétiques détenues dans les fonds labellisés ISR qui seront affectées par la nouvelle règle d'exclusion des combustibles fossiles sont TotalEnergies, Neste, Eni, Repsol, Galp Energia, BP, Shell et OMV. Il reste à voir si la règle d'exclusion s'étendra d’autres acteurs, y compris les équipements et services pétroliers et gaziers Technip et Gaztransport et Technigaz.
- TotalEnergies est actuellement détenu par 161 fonds labellisés ISR pour une valeur totale d'environ 2,4 Mrds€, ce qui représente 1,6% de la capitalisation boursière de TotalEnergies.
- L'univers des fonds labellisés ISR va probablement se réduire, car les gestionnaires de portefeuille qui trouveront les nouveaux critères trop contraignants abandonneront le label. Il reste à voir si les grands fonds passifs proposés par BlackRock et Amundi s'aligneront sur les nouveaux critères.
Hortense Bioy conclut : « La description donnée par Bruno Le Maire des entreprises concernées par les nouveaux critères d’exclusion est assez vague. Il faudra attendre la publication des critères finaux à la fin du mois pour mieux comprendre l’impact des nouvelles règles sur les portefeuilles existants. Le diable est toujours dans les détails. Quant à l’impact sur les entreprises ciblées, il sera très faible pour certaines, comme BP et Shell, plus important pour TotalEnergies, et potentiellement très important sur d’autres comme Technip si le champ d’exclusion s’étend à tous les acteurs de la chaîne de valeur des hydrocarbures. »