Connexion
/ Inscription
Mon espace
Tribunes & Témoignages
ABONNÉS
Partager par Linked-In
Partager par Xing
Partager par Facebook
Partager par email
Suivez-nous sur feedly

[Témoignage] « J’ai été juré d’un concours de jeunes entreprises »

Témoignage de Valdimir Kolla, codirecteur général de Patrowl, société éditrice de la solution d’Offensive Security-as-a-Service éponyme.

Les concours de startups et de jeunes entreprises sont des terrains d’expérimentation. Il s’y côtoie toute la variété du monde des affaires. S’il ne devait exister qu’un endroit pour apprendre à « mordre la poussière », ce serait là, dans ces concours, avant de sauter une fois pour toutes dans le grand bain.

Toutes les expériences sont bonnes à prendre

Dirigeant de société, je suis devenu membre d’un jury de concours pour jeunes entreprises, le temps de quelques journées. Première surprise, ce n’est pas si courant. Beaucoup de mes pairs représentaient leurs collectivités et leurs institutions, étaient soutien financier et logistique de l’évènement ou élus locaux. J’ai fait cette démarche par curiosité, éventuellement pour dénicher quelques astuces à employer et surtout pour en retirer des enseignements que je livre ici pêle-mêle.  

Je connais bien le concours dont je suis devenu juré. Made in 92 en est à sa 8e édition. J’ai observé ses catégories évoluer au fil du temps et de la conjoncture. Mon entreprise avait obtenu le prix de la croissance réussie en 2021. Cette catégorie n’existe plus, ce qui ne laisse pas de me surprendre, d’autant que j’y aurais volontiers vu concourir tous ces candidats dont la trésorerie solide rassure les banques.

J’ignore s’il faut tirer une conclusion particulière de cette disparition (certains diraient qu’en effet il y a une conclusion peu réjouissante à laquelle aboutir compte tenu des indicateurs économiques mondiaux). En revanche, j’étais ravi de voir apparaître le prix de la transition énergétique ou celui de l’innovation éducative. Les concours de startups sont un reflet assez fidèle de la transformation de nos économies. Ils représentent des laboratoires des nouvelles dynamiques de marché qu’il est instructif de fréquenter.

De zéro à plusieurs millions de CA et tous logés à la même enseigne

J’ai écouté près d’une centaine de jeunes et moins jeunes dirigeants et dirigeantes m’exposer leur projet avec autant d’enthousiasme que de stress (dissimulé). Une idée à peine déposée et une structure commerciale boostée aux hormones de croissance peuvent s’affronter dans une même catégorie. Il y a de quoi être perplexe. Comment comparer de tels écarts ?

C’est d’ailleurs avec les représentants du secteur bancaire que j’ai le plus débattu. Si vous en doutiez encore, même dans un concours destiné à soutenir l’entrepreneuriat débutant, la robustesse financière de la structure en lice aura toujours la préférence des banques. Et comment leur reprocher ? Mais trente personnes d’horizons divers formaient le jury, et ça change tout.

Les organisateurs du Made in 92 sont guidés par leur estime pour la création d’entreprise, et leurs jurés, comme ceux des collectivités, ont à cœur de valoriser ce qui ne se monnaye pas immédiatement. Aussi, le premier enseignement à retirer de cette expérience, en qualité de candidat (et peut-être en tant que juré), est de ne pas se laisser impressionner par des concurrents qui réussissent vite et bien. Dans un concours, rien ne se joue sur un unique chiffre d’affaires. Il faut en profiter.

Beaucoup de préparation et un peu de hasard

Autre changement majeur cette année, les concurrents dorénavant sont coachés. Je l’ignorais d’ailleurs, au point de m’étonner de leur aisance sur scène. C’est une bonne chose de les avoir préparés à l’exercice. J’ai apprécié cet effort des organisateurs de rétablir un certain équilibre des chances et, reconnaissons-le, de conserver l’attention du jury jusqu’au bout.

Pour autant, l’arbitrage est difficile et malgré l’existence de catégories par secteur d’activité, la diversité des sujets et des porteurs de projets donne le vertige. Puériculture, récupération de chaleur, inclusivité dans l’emploi, artisanat, casiers réfrigérés, mesure du CO2, fauteuil roulant (en bois !), etc. J’y ai même croisé mon boulanger. Et tous ne disposaient que de quelques minutes pour nous intéresser, nous séduire et nous rassurer.

Les organisateurs n’ont imposé de grille de critères qu’en fin de parcours, pour nous laisser, je l’imagine, plus de liberté dans notre appréciation des mérites de chacun. Je n’ai pas toujours voté pour ceux que j’avais le mieux notés, parce qu’évaluer dans ce type de concours est aussi une question d’affinités ou d’inclination pour un thème plutôt qu’un autre. C’est pourquoi maintenir une distribution la plus variée possible des membres du jury reste de rigueur.

Choisir un concours qualitatif

Pour avoir participé à quelques-uns, je sais que tous les concours ne se valent pas. Certains, pour se distinguer, plongent les candidats dans des situations franchement inconfortables. J’ai le douloureux souvenir d’un ring de boxe en manière d’estrade et dont je déconseille l’expérience. Made in 92 n’est pas de ceux-là. Au contraire, pour son accompagnement et la bienveillance de ses organisateurs, je le comparerais volontiers au niveau des concours de l’accélérateur Hexatrust. Toutefois, les jurés ne sont pas des enfants de chœur et certaines questions peuvent déstabiliser et interroger sérieusement la pérennité d’un modèle. C’est déroutant, je le reconnais, mais autrement plus pertinent que l’exposition de sa personne dans une parodie de compétition sportive. Cela dit, aucun membre du jury n’est omniscient et chacun de nous a pu se tromper.

Il faut savoir entendre tous les avis et accepter les doutes raisonnables, comme mesurer les critiques et les compliments. Le regard extérieur est toujours une richesse mais s’il ne devait subsister qu’un conseil à donner, ce serait de ne jamais rien lâcher. Quelle différence y a-t-il entre la persévérance et l’obstination ? Je l’ignore car mes partenaires et moi avons certainement oscillé entre les deux les premières années d’existence de notre société. Reste que les concours de jeunes entreprises sont d’abord là pour mesurer un potentiel, il n’y a donc pas lieu de s’en priver. Le stress subsistera mais l’expérience et le recul qu’on y acquiert serviront de longues années.

Lire la suite...


Articles en relation