Comment s’effectue la veille au sein des services de l’Etat ? Gros plan sur les actions menées au sein de la Direction Générale de l’Enseignement Supérieur et de l’Insertion Professionnelle.
Par Prunelle Charvet, Responsable de la veille, Direction Générale de l’Enseignement Supérieur et de l’Insertion Professionnelle et Arnaud Marquant, Directeur des opérations, KB Crawl SAS
En cette période de rentrée universitaire, près de 3 millions d'étudiants rejoignent les établissements d'enseignement supérieur. Ces chiffres s'accompagnent de problématiques spécifiques. Parmi celles-ci, on peut citer la démographie, l'égalité des chances, la précarité, le logement, et bien d'autres. La société française est confrontée à une multitude de phénomènes, et il est crucial de rester attentif aux signaux faibles qui pourraient avoir un impact sur l'enseignement supérieur.
Une veille d’abord éditoriale
Cette action passe nécessairement par un travail quotidien d’observation. Au sein de la Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP) du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, une activité de veille a été instaurée en 2013, il y a tout juste dix ans. L’objectif initial consiste à fournir une information globale destinée aux différentes sous-directions, sur des sujets à la fois transverses et spécifiques à chacune.
- Quelles sont les politiques publiques impactant l’enseignement supérieur ?
- Où se situe la France dans les différentes comparaisons internationales ?
- Quelles sont les attentes des étudiants vis-à-vis de l’enseignement supérieur ?
À cette époque, le travail à effectuer par les services de l’Etat relève surtout d’une veille éditoriale. Signalement de ressources, repérage de rapports et de travaux de recherche… La veille de la DGESIP s’appuie sur des outils gratuits et une approche pragmatique. Ce fonctionnement fera ses preuves jusqu’à ce que de nouvelles nécessités se fassent sentir…
Faire face à l’infobésité grâce à une veille collaborative et un outil de veille performant
Car en cette fin des années 2010 la veille fait de plus en plus face à une profusion exponentielle des informations à synthétiser ainsi qu’à une extension des périmètres à couvrir. Au sein des services spécialisés dans l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle, de nouvelles thématiques émergent, liées aux défis sociétaux et environnementaux auxquels l'enseignement supérieur est confronté : égalité des chances, numérisation de l'enseignement, emplois de demain ou encore crise du logement. Quant aux services de l’Etat, ils se trouvent de plus en plus confrontés au phénomène de l’infobésité, amplifiée par la montée en puissance des réseaux sociaux.
Nous sommes en 2018 : c’est alors que la DGESIP décide de s’attacher les services d’une plateforme de veille à haute valeur ajoutée technique. Outre sa capacité à aller surveiller des ressources multiples et variées, la plateforme doit pouvoir favoriser la collaboration de la communauté des veilleurs eux-mêmes. C’est autour de ce nouvel outil que va se formaliser la mise en place d’une veille collaborative avec d’autres services du ministère tels que l’Inspection générale de l'Éducation, du Sport et de la Recherche et la Direction du numérique pour l’éducation. Editorialisation de contenus, outil personnalisable et surveillance des sources : plus de 1500 personnes ont accès à un moteur de recherches puissant et professionnel.
2023 : un recours à l’IA qui permet une veille véritablement stratégique
Cinq années plus tard, une nouvelle étape se dessine. L’automatisation des tâches rend désormais de précieux services aux veilleurs. Les nouvelles plateformes, spécifiquement développées par des éditeurs spécialisés, s’accompagnent de paramétrages de plus en plus fins. Elles permettent de réaliser une veille plus proactive et stratégique, loin des standards qui étaient demandés il y a de cela dix ans. Les temps ont changé : en 2023, il ne s’agit plus tant de produire un état des lieux des ressources disponibles que de déployer une vision à 360° des problématiques et de « pousser » l’information auprès des utilisateurs. Avec le développement sans précédent des réseaux sociaux, des blogs, des vlogs ou encore des podcasts, les professionnels de l’action publique ont plus que jamais besoin d’une veille organisée, structurée et synthétique. Pour cela, l’intelligence artificielle (IA) constitue une précieuse ressource dont les promesses sont pour le moins séduisantes.
Désormais embarquées dans les plateformes de veille, les IA conversationnelles sont sur le point de permettre au veilleur de réaliser la synthèse de dizaines de documents en quelques secondes à peine. Grâce à elles, la mutation du métier de veilleur se poursuit. En permettant la reformulation, le résumé et la synthèse, l'intelligence artificielle conversationnelle libère le spécialiste de la veille de tâches chronophages pour se concentrer sur l'aspect fondamental de son travail : la veille stratégique.
Cette technologie rétablit l'importance de la valeur ajoutée apportée par les professionnels, marquant ainsi une avancée qualitative significative dans le domaine de la veille. Elle répond parfaitement aux attentes de la Direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, où la veille requiert de plus en plus une analyse stratégique des données, plutôt qu'une simple compilation synthétique.
Face à la complexité croissante du monde, il est indéniable que le métier de veilleur continuera à jouer un rôle essentiel dans les années à venir.