61% des chargeurs estiment que le TRM français n’atteindra pas l’objectif de neutralité carbone fixé à 2050 par la SNBC !
Sightness, Frenchtech dédiée à l’optimisation de la performance transport, publie les résultats de sa dernière étude, réalisée avec bp2r, cabinet de conseil en Supply Chain spécialiste du transport de marchandises qui a récemment rejoint le réseau PwC, et Carbone 4, premier cabinet de conseil indépendant spécialisé dans la stratégie bas carbone et l’adaptation au changement climatique.
Cette nouvelle édition, intitulée « Enquête 2023 - (Ré)concilier transport de marchandises et décarbonation », lève le voile sur la manière dont les acteurs du secteur perçoivent cet enjeu et mettent en œuvre les divers leviers à leur disposition pour réduire leurs émissions de GES.
Si la prise de conscience a été longue, la décarbonation du transport s’impose désormais au rang de ses enjeux clés. Pourtant, force est de constater que les choses ne vont pas assez vite, pas assez loin. À rebours des objectifs fixés en 2015 par l’ADEME en marge des accords de Paris (qui visent la neutralité totale d’ici l’année 2050), et à l’opposé de tous les autres secteurs d’activité, les émissions de GES liées au transport de marchandises continuent d’augmenter.
- Alors comment ce challenge grandissant se traduit-il concrètement dans les organisations des chargeurs ?
- Comment appréhendent-ils les défis de la décarbonation du transport de marchandises ?
- Quels leviers choisissent-ils de déployer pour se faire ?
- Quelles sont leurs réactions vis-à-vis des actualités et des échéances réglementaires sur le sujet ?
Pour cette étude, 114 professionnels francophones du transport de marchandises, en poste au sein du service transport, achats indirects ou encore supply chain d’une entreprise donneuse d’ordres, ont été interrogés entre le 1er et le 15 juin 2023.
Quelques-uns des grands enseignements de l’étude
- 61% des donneurs d’ordres estiment que le TRM français n’atteindra pas l’objectif de neutralité carbone fixé à 2050 par la SNBC. Les objectifs sont très ambitieux et, au regard de l’urgence, doivent l’être. Le temps passe et les donneurs d’ordres, de plus en plus informés sur le sujet, constatent clairement le retard pris et les efforts considérables à déployer pour atteindre les objectifs dans le temps imparti.
- 71% affirment avoir déjà ou être en train d’élaborer un plan d’action de réduction des émissions de GES dédié spécifiquement au transport de marchandises dans leur entreprise. Autrement dit, malgré leur pessimisme face aux objectifs, leurs ambitions se concrétisent davantage en plans d’action.
- Pour 36% des entreprises, les enjeux de décarbonation sont directement portés par leur Direction Générale vs 49% en 2022. Étonnamment, malgré le caractère stratégique de l’enjeu de décarbonation pour les entreprises, le poids des porteurs choisis pour les incarner semble diminuer. En revanche, l’enjeu est désormais incarné par une direction RSE présente au CODIR pour 30% des répondants, en hausse de 6 points. Le sujet est donc davantage porté par des « experts », positionnés au cœur de la direction. D’ailleurs, 28% des cadres ont ou vont avoir des objectifs liés à la décarbonation dans leur feuille de route. Une proportion qui a presque doublé en 2 ans.
- Bien que l’enjeu de la décarbonation s’ancre de plus en plus fermement au cœur des organisations, seuls 17% des répondants font part d’une réelle collaboration entre les équipes en charge de la décarbonation et le(s) département(s) de transport, logistique et supply chain, tandis que la collaboration reste un facteur clé de succès.
- Parmi les moyens dont disposent les entreprises pour travailler sur l'impact carbone du transport de marchandises, on note peu de changements. Cependant, 86% déclarent que leur entreprise mesure les émissions de GES issues du fret. Et parmi eux, 54% déclarent désormais calculer les émissions sur l’intégralité des flux vs 36% en 2022. Des chiffres encourageant car c’est un élément fondamental de toute démarche de décarbonation et sa fiabilité va venir conditionner à la fois la pertinence des objectifs et des pistes explorées comme la capacité à suivre et piloter les effets des plans d’actions.
- La grande majorité des répondants (63%) pointent tout de même l’absence totale de budget dédié. De plus, l’ensemble des leviers applicables à l’activité transport des entreprises accuse une forte baisse par rapport à 2022.
- En 2023, l’inflation généralisée est venue bouleverser nombre de stratégies chez les chargeurs, à commencer par celle du coût des énergies. 74% des répondants déclarent que cette hausse des prix les pousse à accélérer le recours aux énergies alternatives.
« L'enquête démontre que le sujet de la décarbonation du fret prend en maturité chez les chargeurs. Cela se traduit par des progrès notables, sur la précision du calcul, sur l'adaptation des organisations. On observe également des signaux frustrants sur les leviers de transformation, probablement reflets d'une montée en compétences et donc d'un certain réalisme. Nous sommes à la croisée des chemins : l'importance de l'enjeu est bien comprise, les obstacles également. Il s'agit maintenant d'avancer malgré ces derniers », commente Xavier Villetard, partner chez bp2r.
« Cependant, le calcul des émissions est de mieux en mieux appréhendé par les donneurs d’ordres, mais ils doivent encore gagner en maturité pour atteindre des résultats plus fiables et acquérir des bases saines pour leurs projets de décarbonation. Données, méthodologie, outillage, sont capitaux dans cette démarche », poursuit Clément Mallet, chef de projet chez Carbone 4.
« Si un pessimisme généralisé stagne en toile de fond vis-à-vis des objectifs globaux liés aux accords de Paris, les enjeux de décarbonation sont de plus en plus présents au sein des organisations. L’adaptation aux risques qui accompagnent le réchauffement climatique semble déjà préoccuper un certain nombre de chargeurs. Nul doute que c’est un sujet qui prendra de l’ampleur au fil des années », conclut Florence Mazaud, responsable RSE de Sightness.