Une analyse de Edmond de Rothschild AM.
Avec une croissance du PIB supérieure à 2% en moyenne par an depuis 2009, la reprise économique se consolide aux Etats-Unis. En effet, des signaux forts indiquent que des mutations structurelles majeures sont à l’œuvre actuellement. Eclipsées par les « falaise fiscale », « plafond de la dette » et autres « séquestration », les entreprises américaines peuvent désormais s’appuyer sur une meilleure compétitivité, une visibilité de long terme et une reprise des crédits bancaires pour se développer, investir, embaucher et ainsi introduire un cercle vertueux de consommation et de croissance.
Une compétitivité en nette amélioration. « Compétitivité » : le mot est sur toutes les lèvres en Europe. Mais plus que d’en parler, les Etats-Unisl’ont déjà mise en œuvre.
La compétitivité du pays en termes de coût du travail est déjà une réalité. Avec les tensions sur le marché de l’emploi, le coût unitaire du travail n’a que très faiblement progressé et est redevenu particulièrement attractif. Cela est particulièrement vrai au regard de la Chine, longtemps considéré comme un vivier de main d’œuvre low-cost. En effet, les évolutions sociales du pays tendent à augmenter les salaires moyens, qui ont été multipliés par quatre en 10 ans.
On constate ainsi un phénomène de re-shoring, à l’image de General Electric qui a relocalisé une partie de sa production sur le territoire national. En effet, le coût réduit du travail délocalisé ne compense plus les inconvénients liés à la délocalisation : logistique et coût du transport, productivité, maîtrise des processus et de la qualité de la production, souplesse de la proximité, risques juridiques…
La renaissance industrielle
L’un des moteurs à long terme de la croissance américaine est l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste. Les Etats-Unis en sont très riches, à tel point qu’ils pourraient devenir énergétiquement indépendants en 2050. Cela a un impact immédiat sur les prix, qui se situent désormais bien en-deçà des niveaux internationaux. Le gaz américain se traite actuellement autour de 3,5 dollars par MBTU (million de British Thermal Unit), contre 12 dollars en Europe et 18 dollars au Japon.
De nombreux secteurs industriels bénéficient de ces faibles coûts, comme la pétrochimie où ils peuvent représenter jusqu’à 30% des coûts de production. Mais de manière générale, tous les secteurs gourmands en énergie ou en gaz, comme la métallurgie, le ciment ou le verre, se verront assortis d’un avantage compétitif indéniable sur les marchés internationaux.
Cette renaissance industrielle devrait largement contribuer au PIB, mais également à la résorption du chômage américain. On estime que 500 000 emplois ont déjà été créés en 2 ans grâce au gaz et pétrole de schiste. Et on estime que pour chaque nouvel emploi, 3 ou 4 autres sont créés de manière indirecte. Au final, le Boston Conlsulting Group prévoit 2,5 à 3 millions de postes industriels créés d’ici à 2020.
Confiance et visibilité avec la reprise du marché immobilier
Signe s’il en est de la consolidation économique du pays, l’immobilier repart à la hausse. L’indice NAHB a retrouvé ses niveaux pré-2007, signe du regain de confiance des professionnels du secteur.
Et pour cause : le secteur de la construction, en plein marasme après la crise des subprimes, affiche depuis plusieurs mois une saine vitalité. Avec un stock de maisons au plus bas historique, les mises en chantier et les permis de construire ont bondi.
L’immobilier est par définition un cycle long. Cette reprise est donc de très bon augure pour l’économie américaine. Les promoteurs ont confiance, ce qui est excellent pour les emplois, et les ménages également. Le sentiment de richesse lié à la propriété immobilière quand le marché est sain incite les ménages à diriger leur épargne de précaution vers la consommation. Et les conditions de crédit sont particulièrement attractives actuellement.
Des crédits bon marché, une reprise des investissements
De leur côté, les établissements de crédit se sont restructurés et ont assaini leurs bilans. Moins d’actifs toxiques, plus de fonds propres, un marché interbancaire liquide et un retour de la confiance…les conditions sont réunies pour ne plus restreindre le canal du crédit. L’immobilier en bénéficie, mais également l’investissement privé. Ce dernier est encore au-deçà de sa moyenne historique, mais la tendance est à la hausse.
Un cocktail gagnant pour les entreprises américaines… avec un retour aux fondamentaux
La crise financière a donné lieu à des comportements irrationnels de la part des investisseurs, qui ont réagi de manière épidermique au risque. En ce qui concerne les entreprises, ils se sont massivement tournés vers les actions à faible volatilité, quitte à payer des multiples très élevés pour ces valeurs « défensives ». Inversement, les valorisations des secteurs cycliques sont à leurs plus bas. Pourtant, leurs fondamentaux sont bons et, on l’a vu, les investissements repartent à la hausse. Mais tout est une affaire de visibilité. Et la visibilité, tout comme la perception du risque, est en train de changer.
Ainsi, l’assainissement du tissu économique américain pourrait fort bien orienter les anticipations de croissance à la hausse et enfin permettre le rattrapage de ces actions sous-valorisées. Lassés d’acheter des Bons du Trésor à rendement quasi nul alors que la recherche de valeur refuge n’est plus une priorité, les investisseurs devraient enfin rechercher des instruments à rendement / risque intéressant. 2013 pourrait ainsi s’avérer une année très intéressante pour une approche Value.