L’industrie de l’assurance est en mutation accélérée. Bien que positive pour le secteur, la rapide hausse des taux a effacé les plus-values latentes obligataires, au-delà des scénarios. De plus, l’amplitude de la hausse des taux et la volatilité de leurs courbes affectent la solvabilité de certains acteurs.
Selon AllianzGI, le secteur est d’autant plus touché que la rentabilité des assureurs stagne depuis plusieurs années dans un marché en manque de croissance, notamment sur l’assurance vie. Dans ce contexte, les assureurs ont souvent dû puiser dans leurs réserves pour soutenir les taux 2022 et stabiliser les encours... alors qu’ils font face à la concurrence des produits bancaires et des livrets plus agiles pour refléter la hausse. Ce contexte remet en cause de nombreuses règles considérées comme acquises dans les portefeuilles d’actifs des assureurs et les acteurs doivent réinventer leurs modèles, leurs produits et revoir leurs portefeuilles d'actifs.
Amine Benghabrit, Directeur général d’Allianz Global Investors en France, remarque : « Les assureurs revoient leurs investissements, démontrant moins d’intérêt pour les actifs de diversification risqués. On observe des flux significatifs vers les obligations souveraines et le crédit de haute qualité, qui présentent des rendements attractifs et une grande liquidité. En revanche, les sociétés d’assurance éprouvent un besoin toujours plus important de services de conseil, reporting, données, et structures sur-mesure. »
Repoussée à plusieurs reprises, la plus ambitieuse revue du régime prudentiel des assureurs européens devrait voir le jour courant 2023 pour une application graduelle au cours des années suivantes. Bien que visant l‘équilibre, elle vient corriger certains points techniques de Solvabilité II et pourrait inciter les acteurs à modifier leurs portefeuilles ou leur appétit pour certains risques.
C’est le cas par exemple avec l’apparition du risque de transition ou de durabilité dans les exigences de fonds propres : « La publication de l’EIOPA sur l’intégration du risque de soutenabilité est un pas immense vers la création d’incitations puissantes à investir dans des actifs plus verts quand bien même la calibration et la méthodologie sont encore à l’étude. De fait, on assume dorénavant de dévier du cadre de risque traditionnel pour intégrer ce nouveau risque par définition hors normes et sans données historiques. Cela aura un effet majeur et immédiat sur les 10.6 trilliards d’actifs des assureurs européens (dont 2.4 trilliards seulement en France) », explique Hadrien Sag, Directeur assurance chez AllianzGI.
Selon AllianzGI, malgré certains vents contraires, les assureurs devraient continuer de financer les marchés privés. Certes, à court terme, les allocations aux marchés privés d’assureurs se réduisent mécaniquement. Pourtant, dans un contexte de marché volatil et en constante évolution, les marchés privés offrent des opportunités d’investissements qui répondent aux exigences des assureurs. Ils pallient la baisse de liquidité sur les marchés face à des besoins de financement qui restent importants. Leur historique de performance est solide, et ils bénéficient d’un traitement règlementaire favorable notamment sur les investissements en infrastructures. Enfin, ce sont des investissements qui contribuent à soutenir la transformation de l’économie réelle et à financer la transition énergétique mondiale
Gaelle Allet, Spécialiste produit marchés privés, conclut : « Les marchés privés sont le seul segment de financement de l’économie réelle dans lequel les acteurs pourront mettre en œuvre leur politique ESG et à impact. Le Blended finance par exemple est une stratégie de financement mixte qui consiste à combiner des capitaux publics et privés afin de créer des solutions d’investissements dérisquées qui financent les objectifs de développement durable des pays émergents. »