Le Lab RH, PageGroup, Renault Group et AXA Climate publieront conjointement en avril 2023 un rapport intitulé “La transition écologique, défi du siècle pour les RH ?”.
Fruit d'une année de travail et de nombreux échanges avec des professionnels de la fonction RH mais aussi des acteurs de la vie économique et environnementale, il dresse un état des lieux réaliste de la transition verte des entreprises et de ses enjeux ainsi qu'une liste concrète de 10 pratiques RH à verdir sans attendre. Il propose également 5 fiches métier prospectives des nouveaux profils qui accompagneront les transformations liées à la transition écologique et répondront aux impacts du changement climatique.
Le constat est unanime et sans appel : notre planète brûle. Le temps n'est donc plus aux discours grandiloquents mais à un passage à l'action immédiat et rapide pour tenter de limiter les effets du changement climatique.
Alors que 6 des 9 limites planétaires identifiées ont déjà été atteintes et que les experts
climatiques continuent d'alerter avec urgence sur la dégradation rapide et irréversible de nos écosystèmes, quel état des lieux dresser de la transition écologique au sein des entreprises ? Quelles mesures ont déjà été prises et quels leviers restent à activer ? Pourquoi la fonction RH doit se positionner comme actrice clé de la transition écologique ? Et surtout quels enjeux humains (emplois, compétences) se cachent derrière cette transformation majeure indispensable qui appelle au bouleversement profond de nos business models ?
Enjeux environnementaux : la prise de conscience est là mais le passage à l'acte reste très insuffisant
Ce chantier d'étude a commencé il y a un an, par un état des lieux, à travers une revue de détail des plus récents rapports, travaux de recherche et d'études sur les enjeux climatiques et environnementaux, et une série d'entretiens menés avec une vingtaine de représentants du monde des ressources humaines : DRH, syndicalistes, enseignants en RH et experts.
Ce travail a révélé un vrai paradoxe. Certes, la nécessité à agir fait consensus chez les RH, et le degré de conscience est fort chez les dirigeants. Il n'empêche qu'un nombre limité d'entreprises s'engagent dans une transition verte ambitieuse. Le mouvement reste disparate et d'une ampleur insuffisante. La somme des avancées ne répond donc en aucun cas au rythme des transformations qui seraient nécessaires pour répondre aux alertes des scientifiques.
Face à cette tension entre la nécessité d'agir vite et la difficulté à mettre en mouvement le tissu économique, ce rapport constitue à la fois un recueil d'expertises et présente des pistes concrètes pour dépasser les simples discours afin d'engager concrètement le mouvement au sein des entreprises avec un manifeste comportant 10 recommandations adressées aux professionnels des ressources humaines.
Un manifeste pour mobiliser les RH
La fonction RH doit se positionner aux avant-gardes de la transition écologique
Par leur position centrale dans les organisations, les RH jouent un rôle plus qu'essentiel dans la transformation de la culture des entreprises et des collaborateurs. Dans le cadre de la transition écologique, ils sont indéniablement les mieux placés pour entraîner les instances de direction, dialoguer avec les organisations syndicales et les élus du personnel et aussi impliquer réellement les salariés, via les recrutements, la formation et l'organisation des parcours de carrière. C'est la raison pour laquelle le rapport débute par un manifeste adressé aux acteurs RH.
L'urgence : préparer et anticiper la transition des emplois et des compétences
- Il est urgent d'anticiper et de planifier les emplois et compétences de demain.
- La demande de compétences vertes va bientôt dépasser l'offre, et la révolution des “emplois verts”, “verdissants” et à “potentiel vert” va induire à moyen terme une pénurie de compétences (green skills) qu'il faudra combler. Dans ce contexte, l'anticipation et la planification des emplois et des compétences seront clefs.
- La majeure partie de la transition se fera par ce que l'on appelle des métiers verdissants : des postes dont la finalité n'est pas environnementale, mais qui intègrent de nouvelles « briques de compétence » pour prendre en compte l'environnement.
Le rôle pivot des RH pour faciliter et réussir la transition interne
- De façon générale, les RH ont un rôle majeur à jouer pour faire « pivoter » l'entreprise en accompagnant l'évolution des compétences, par exemple des commerciaux et des acheteurs, mais aussi des responsables innovation et R&D, marketing, etc.,
- Réussir la transition environnementale d'une organisation implique d'actionner deux leviers internes majeurs pour lesquels les RH sont en première ligne : la formation et la culture d'entreprise.
- Si les écogestes sont (très) insuffisants pour agir en profondeur, ils peuvent cependant être utiles pour mettre en mouvement les collaborateurs au commencement de la transition d'une organisation.
Vers l'externe, un recrutement et une marque employeur à réinventer
- Pour attirer et conserver les talents, les entreprises vont devoir montrer “patte verte”. Penser ou repenser leur marque employeur, leurs processus de recrutement, leurs politiques de rémunération, etc. : il faudra jouer sur tous les leviers pertinents via le prisme environnemental.
- Intégrer la dimension environnementale dès les processus de recrutement et la capacité des nouveaux collaborateurs de s'impliquer dans la transition écologique de l'organisation.
- Les RH ont un rôle essentiel de vigies pour veiller à ce que la transition soit inclusive et juste.
Quelle gouvernance pour la transition écologique ?
- L'enjeu de gouvernance de la transition écologique au sein de l'organisation ne doit pas être sous-estimé. Faut-il un “Chief Climate Officer”, et à qui doit-il être rattaché ? Quid des autres enjeux environnementaux, à commencer par la biodiversité ? Quel rôle des RH dans la mobilisation du Comex ?
Ce rapport contient en outre 5 fiches, indiquant quels pourraient être les nouveaux emplois verts demain, élaborées en collaboration avec une agence de conseil en innovation :
- Médiatrice ou médiateur sur les enjeux climatique
- Conseiller en reconversion verte
- Responsable des avantages sociaux climatiques
- Responsable score social et environnemental
- Expert transition travail bas carbone
Ces nouveaux métiers permettent d'ouvrir des questionnements, d'élargir les perspectives actuelles et d'inspirer potentiellement de nouvelles missions ou de nouveaux champs de compétences pour les professionnels de la fonction RH.
Ce qu’ils en pensent
Isabelle Bastide, présidente de PageGroup : « Auparavant, seuls les emplois strictement liés à l'écologie nécessitaient la maîtrise des compétences vertes. Désormais, celles-ci sont requises pour des métiers qui ne sont pas considérés comme intrinsèquement liés à la RSE, la transition écologique agissant comme un catalyseur de leur acquisition. La part des talents verts dans la main-d'œuvre mondiale est ainsi passée de 9,6% en 2015 à 13,3% en 2021 soit un taux de croissance de 38,5%. En 2022 en France, il y avait 4,4 millions d'emplois verts et verdissants sur le marché de l'emploi, et la création d'au moins 1,1 millions de « green jobs » est attendue d'ici 25 ans. C'est donc de la maîtrise de ces compétences d'un genre nouveau et de l'appétence écologique des candidats, que des perspectives positives émergeront. Le marché de l'emploi doit absolument valoriser les aptitudes durables pour mieux recruter les nouveaux talents d'aujourd'hui et de demain ».
Mathilde Le Coz, présidente du Lab RH : « Face aux défis écologiques, les entreprises peuvent pratiquer les greenwashing - faire semblant d'agir - ou le greenhushing - se taire et ne rien faire. Nous pensons qu'au contraire elles doivent agir. Le contexte environnemental et réglementaire va changer. Ce peut être une source d'innovation considérable, et les RH ont un rôle central à jouer. C'est pour les interpeller et leur faire prendre conscience de leur potentiel d'action que nous avons lancé cette démarche conjointe ».
Antoine Poincaré, vice-président Climate School - AXA Climate : « Pour les équipes RH, l'objectif est clair : que chacun trouve sa place dans la transition environnementale. Ceci suppose d'activer différents leviers, à commencer par la formation et l'engagement des collaborateurs. Sensibiliser aux enjeux du climat et de la biodiversité, embarquer toute l'organisation dans la transition, adapter les métiers existants, anticiper les emplois et compétences de demain… : les besoins sont vastes. Pour y répondre, l'alliance d'acteurs du monde des RH et de la transition environnementale est précieuse, à l'image du travail mené pour réaliser ce rapport ».
Alexandra Malak, DRH Digital, Data et Opérations RH de Renault Group : « Comme le Digital, porté initialement par des experts puis bouleversant profondément les métiers, la transition écologique nous oblige à changer de paradigme, quel que soit la taille ou le secteur de son entreprise. Devenir une entreprise automobile de prochaine génération, soutenant un modèle d'économie circulaire bas-carbone tout en agissant pour l'inclusion sociale, est une ambition au cœur de notre plan stratégique Renaulution. La fonction RH est d'ores et déjà aux avant-gardes de la transformation des compétences et du dialogue social. Alors que l'accélération se dessine, nous, professionnels RH, avons une place de choix pour intégrer cette transition écologique au cœur des évolutions métiers et organisationnelles, en préservant les richesses humaines. »