Le point avec Gauthier Bailleul, CEO d’Hippolyte-rh
Pénurie de talents, inversion du rapport de force entre candidats et recruteurs… le marché du travail a opéré ces dernières mois un virage à 360°. Si le contexte économique joue un rôle majeur dans ce changement de paradigme, il ne peut être tenu pour seul responsable. C’est la place du travail en elle-même qui est en train d’évoluer chez les candidats et les collaborateurs. Un état de fait qui bouscule les acteurs les plus traditionnels, tant publics que privés, et les oblige à être plus exigeants quant à leur image de marque. Comment y parvenir ? En misant sur une promesse employeur claire, véhiculée et incarnée par les services RH des entreprises.
Explications.
Nouvelles générations = nouvelles attentes
Il est fini le temps où la vie professionnelle était la pierre angulaire du quotidien des individus. Les nouvelles générations (Y et Z) n’ont plus le même rapport au travail. C’est désormais leur vie personnelle qui prime sur leur engagement professionnel. Ce dernier n’en est pas forcément moindre pour autant, mais il est nécessaire qu’il soit profondément aligné avec les valeurs du candidat, qu’elles soient politiques, sociales et/ou environnementales. Surnommés « les salariés mercenaires », ces nouveaux collaborateurs sont en recherche de flexibilité, de souplesse organisationnelle, de lien social, et ont tendance à être plus volatiles et mobiles que leurs ainés.
Qui dit nouvelles attentes implique forcément une approche renouvelée du recrutement et de la communication. Puisqu’ils sont plus intransigeants que leurs prédécesseurs sur le cadre professionnel (contenu du poste, dimension RSE, projet d’entreprise…) qu’ils recherchent, les candidats d’aujourd’hui s’informent davantage avant de postuler. Les entreprises doivent donc se réinventer, tant sur le fond que dans la forme, afin d’attirer et de fidéliser les meilleurs talents.
La promesse employeur : élément décisionnel fort pour les candidats
Concrètement, nous pourrions presque dire aujourd’hui que c’est le candidat qui choisit l’entreprise et non l’inverse. Travailler sa promesse employeur (appelée EVP – Employer Value Proposition) est donc crucial. Selon Link Humans, une marque employeur forte augmente ainsi de 50% le nombre de candidatures qualifiées. Et ce n'est pas tout : l’image perçue de l’entreprise (y compris en ligne) doit être en accord avec celle projetée par l’organisation. Cela constitue une preuve de respect de la promesse employeur énoncée et un gage de confiance pour les candidats. 67% d’entre eux seraient même prêts à accepter un salaire moins élevé si l’entreprise a une bonne image sur le web.
Tout est question de transparence et d’incarnation :
- que défend l’entreprise ?
- comment s’inscrit-elle dans la société ?
- quelle est sa réputation ?
- cette dernière est-elle cohérente avec sa promesse de marque ?
Cela fonctionne aussi pour le service public. Prenons l’exemple d’une mairie (ou même de l’Éducation Nationale ou de la Police) souffrant d’un déficit d’image. Pour revaloriser les métiers qu’elle propose, elle doit définir et affirmer ses piliers de valeurs, construire sa proposition employeur, redorer l’image des moyens d’accès (concours de la fonction publique notamment), et relayer ces différents éléments sur les canaux de communication plébiscités par ses cibles.
D’un point de vue purement communicationnel, le meilleur moyen d’agir sur son image est de respecter sa promesse employeur. De « simples » fonctions supports, les services RH sont aujourd’hui devenus la vitrine de l’entreprise, et de sa promesse employeur. Il est essentiel qu’ils s’engagent dans une approche marketing de leurs actions pour construire une marque employeur authentique et incarnée.
Pacte social : il ne suffit pas de le dire
Au-delà de ses résultats financiers, la richesse d’une entreprise repose sur son capital humain et sa capacité à fidéliser et engager ses collaborateurs dans un projet commun. Il est donc essentiel d’aligner réalité business et principes éthiques, et ce d’abord en interne. Réguler la politique de rémunération ou agir sur la flexibilité du travail ne sont pas suffisants. Il s’agit d’envisager l’expérience collaborateur dans sa globalité, et dans la durée. Cela implique les conditions de travail certes, mais aussi l’impact sociétal de l’entreprise, son engagement au long court pour un monde plus juste et plus responsable.
Chaque employé doit être considéré pour ce qu’il apporte à l’entreprise mais aussi au regard de ce que l’entreprise lui offre. Seul cet équilibre permet de construire une relation saine et positive tant pour l’individu que pour le collectif entreprise. C’est la clef de voûte du pacte social qui lie l’organisation à ses contributeurs.
Le collaborateur RH, nouvel ambassadeur de l’entreprise
Dans ce contexte particulier, le principe d’employee advocacy est poussé à son paroxysme. Les collaborateurs RH vont jouer un rôle d’influence auprès des candidats, mais aussi des employés. L’équilibre offre/demande s’étant inversé sur le marché du recrutement, ils ont aussi à leur charge l’animation d’un vivier de candidats qu’ils doivent entretenir, alimenter en contenu… Ces influenceurs d’un genre nouveau interviennent sur les plateformes digitales que sont LinkedIn, Instagram, mais aussi Snapchat, Spotify, Waze ou encore TikTok. Cela leur permet aussi de construire leur visibilité auprès d’une cible très présente sur ces supports : les talents de demain.
Et ça marche ! Au-delà des résultats en matière de recrutement et de fidélisation, les collaborateurs, ainsi engagés vis-à-vis du projet d’entreprise y trouvent la cohérence recherchée entre la promesse employeur et leurs propres valeurs. Cette situation est moteur pour les organisations qui s’investissent dans cette démarche, développent une promesse forte et accompagnent leurs collaborateurs dans leurs prises de parole.
Aujourd’hui, la promesse employeur est l’un des axes principaux du contrat social qui lie les collaborateurs aux entreprises. Il s’agit de l’incarner au quotidien, et de véhiculer l’état d’esprit d’une entreprise en toute transparence. C’est bien là le nouveau rôle - véritablement crucial - des collaborateurs des services ressources humaines !