La veille stratégique se déploie de plus en plus horizontalement au sein des organisations. Les outils mis à leur disposition accompagnent ce mouvement de transversalité, qui est aussi un mouvement de fond.
L’analyse d’Arnaud Marquant, Directeur des opérations chez KB Crawl SAS
Qu’elles soient publiques ou privées, les organisations réalisent chaque jour des veilles plurielles. Marketing, juridique, innovation, communication… De nombreuses entités internes sont concernées. Pour les entreprises, la veille se conjugue ainsi au pluriel, témoignant d’une forme d’atomisation de cette fonction. Dans l’immense majorité des cas, les projets se mettent en place de manière fragmentée, par service, parfois par direction.
L’information transverse : une nécessité
Pour autant, c’est bel et bien l’acculturation générale qui donne une valeur supplémentaire à la veille. Une information destinée au marketing est en effet susceptible d’intéresser également la R&D, le service juridique ou encore la communication. Car lorsque l’on pense au déploiement d’un produit ou d’un service sur le marché, il est nécessaire d’analyser aussi les questions juridiques qui y sont attachées, d’étudier les débouchés, d’identifier les concurrents et leurs éléments différenciants. Dans de telles conditions, le décloisonnement et la transversalité de la veille constituent des enjeux qui permettent de mieux faire circuler l’information, et qui obligent parfois les veilleurs à créer des communautés dédiées, à la fois verticales et horizontales. Cette information est devenue une matière éminemment vive : rapide, changeante, mouvante, elle doit être captée en temps réel et rediffusée aux bonnes personnes.
Des solutions de veille désormais collaboratives
Les solutions de veille qui sont désormais à notre disposition rendent possible cette transversalité. Les plus abouties d’entre elles comportent de nouvelles fonctionnalités. Les modules collaboratifs permettent, par exemple, aux utilisateurs de travailler au sein de différents groupes, autour d’un projet commun. La présence d’un module de chat, dans la mesure où celui-ci favorise l’analyse partagée, permet également l’échange d’idées, en un mot l’intelligence collective. Ajoutons à ces éléments la présence de l’annuaire, qui permet notamment de voir qui est connecté, qui ne l’est pas, et surtout d’identifier des personnes que l’on croise parfois dans les couloirs sans avoir l’opportunité de leur parler. Il faut encore ajouter à cela une notion importante, inhérente à tout projet de veille : celle de la contribution. Cette dernière offre aux utilisateurs la possibilité de remonter une information, ce qui va là encore dans le sens de l’intelligence collective.
L’information : un pouvoir collectif
De telles évolutions techniques, voire technologiques, sont là pour témoigner des changements culturels de fond qui touchent la veille. Longtemps, l’information a pu être considérée comme le moyen de conserver par devers soi une forme de pouvoir au sein de l’organisation. Or, avec le temps ces mêmes organisations ont pris conscience du fait que les notions d’audience et de partage étaient primordiales. C’est notamment le cas dans certains grands groupes des secteurs bancaire, automobile ou de l’énergie, particulièrement dans une perspective internationale. Pour ces multinationales, partager l’information avec leurs divisions étrangères est devenu une nécessité de développement. Lorsqu’un fabricant automobile sort un nouveau modèle par exemple, il doit au préalable avoir veillé et partagé un ensemble de sujets liés au juridique, aux pratiques multimodales, aux évolutions culturelles, etc.
Désormais, les solutions de veille permettent le partage et la transversalité, et les organisations sont aujourd’hui mûres pour cela. L’information s’est ouverte, étendue, et peut être adressée à des publics très divers. L’expérience montre toutefois que des enjeux nouveaux apparaissent. L’un des signaux faibles observé vient de ce que l’information largement partagée ne concerne pas toujours des cibles précises. Gare à « l’effet vide-poches ». Par exemple, chez un constructeur automobile, la division qui s’occupe des moteurs électriques n’a que faire d’une veille relative aux moteurs thermiques, et inversement. En revanche, toutes deux seront intéressées par une information sur les moteurs hybrides… Ce qui pose la question du resserrement de l’information, de son ciblage, voire de son cloisonnement.
Mais ceci est une autre histoire…