- La barre des 38 000 défaillances sur 12 mois est franchie
- Le nombre de procédures augmente de 69%, un taux jamais observé en 25 ans, mais reste très inférieur aux seuils de 2019
Le groupe Altares, expert historique et référent de la data d’entreprise publie les chiffres des défaillances d’entreprises en France au 3ème trimestre 2022.
Avec 8 950 procédures collectives ouvertes entre le 1er juillet et le 30 septembre, le niveau des défaillances augmente de 69% comparé à l’été 2021, un taux jamais observé depuis 25 ans. Sur 12 mois glissés, la barre des 38 000 défauts a été franchie. Avec 10 000 procédures de plus sur un an (+34%), la France renoue avec les niveaux de défaillances de l’été 2020, mais reste encore loin des 53 500 procédures observées fin septembre 2019.
Dans le détail des secteurs, les activités B2C (commerce de détail, restauration, services à la personne) sont toujours durement fragilisées. Des signaux préoccupants émergent dans le bâtiment (second œuvre, fabrication et négoce de matériaux). Du côté des régions, si tous les territoires sont dans le rouge, la région PACA semble le mieux résister. A l’inverse, les Hauts-de-France - où les défauts ont doublé durant l’été - retrouvent une situation équivalente à 2019. Enfin, la hausse de la sinistralité chez les PME de moins de 50 salariés fait flamber le nombre d’emplois menacés, qui approche désormais 33 000.
Thierry Millon, directeur des études Altares, constate en effet que : « le nombre des défaillances d’entreprises augmente très vite. Les difficultés, qui se concentraient ces derniers mois sur les activités B2C se propagent et n’épargnent plus les PME. Le contexte économique très tendu mine la confiance des acheteurs et la montée des risques fait trembler les directions financières. Les mauvais chiffres du mois d’août (+98% vs. Août 2021), période pourtant traditionnellement plus calme, témoignent de l’urgence de certaines situations. Nous sommes encore loin des 50 000 procédures annuelles mais l’accélération très forte de ces derniers mois pourrait impacter les fournisseurs qui peineraient à gérer la démultiplication soudaine des défauts de clients, a fortiori de PME. 10 000 défaillances de plus sur un an, ce sont aussi de nombreuses factures qui resteront impayées. »
Le nombre de défaillances en hausse de 69%, un taux jamais observé en plus de 25 ans
Les records se suivent d’une année à l’autre, mais pour des raisons diamétralement opposées. Avec moins de 5500 défaillances, le niveau de sinistralité du 3ème trimestre 2021 était le plus bas jamais observé en 25 ans. Cet été 2022, 8950 entreprises ont défailli entre le 1er juillet et le 30 septembre 2022, c’est 68,5% de plus qu’un an plus tôt. Une hausse record, jamais observée jusqu’à aujourd’hui. Si l’on ne franchit pas encore le seuil des 10 000 procédures de l’été 2019, le retour aux standards d’avant Covid s’accélère.
A titre de référence, au cours des 25 dernières années, des hausses de plus de 20% n’ont été observées qu’à trois autres reprises : lors de la crise financière de 2008 (+22% au 4ème trimestre 2008 et au 1er trimestre 2009) et au 1er trimestre 2002 (+25%) en comparaison d’un 1er trimestre 2001 perturbé par la grève des juges des tribunaux de commerce.
Sur 12 mois glissés, la barre des 38 000 ouvertures de procédure collective est dépassée pour la première fois depuis l’été 2020. Une augmentation de 10 000 défaillances sur un an, qui ne ramène pas pour autant la France à ses niveaux de défauts de septembre 2019 (53 500).
Les procédures de sauvegarde restent toujours peu nombreuses (229) au regard de l’ensemble des ouvertures mais en ce 3e trimestre 2022, leur nombre dépasse les seuils d’avant crise. C’est même la valeur estivale la plus haute depuis 2016.
Les procédures de redressement judiciaire (RJ) sont en hausse rapide de 63,2% avec 2109 jugements prononcés. Elles représentent toujours moins d’un jugement sur quatre (24%), un taux inférieur aux 30% relevés avant Covid.
Les liquidations judiciaires directes (LJ), concentrent encore près des trois quarts (74%) des jugements d’ouverture. Ce taux est nettement supérieur à celui constaté avant la crise sanitaire (68%). Elles ont concerné 6612 entreprises, soit une augmentation de 71,3%.
Nombre de défaillances d’entreprises par type de procédure par trimestre
(Données arrêtées au 1er octobre de chaque année)
|
2018 |
2019 |
2020 T23 |
2021 |
2022 |
EVOLUTION T3 2022/21 |
|
MOYENNE |
Sauvegardes |
216 |
205 |
155 |
159 |
229 |
44,0% |
193 |
|
Redressements Judiciaires |
3 613 |
3161 |
1 466 |
1 292 |
2 109 |
63,2% |
2 328 |
|
Liquidations Judiciaires directes |
7 843 |
7 205 |
5 081 |
3 860 |
6 612 |
71,3% |
6 120 |
|
Total défaillances |
11672 |
10571 |
6702 |
5311 |
8950 |
68,5% |
8 641 |
|
Total Emplois menacés |
34 900 |
36 200 |
26 600 |
17 460 |
32 970 |
15 510 |
29 626
|
|
Emplois menacés par entreprise |
3,0 |
3,4 |
4,0 |
3,3 |
3,7 |
0,4 |
3,5 |
Les activités à destination du consommateur toujours plus en souffrance
RESTAURATION & HEBERGEMENT
|
|
COMMERCE
|
|
SERVICES AUX PARTICULIERS
|
Les activités B2B rattrapées à leur tour par la forte hausse des procédures
CONSTRUCTION
|
|
INDUSTRIE MANUFACTURIERE / AGROALIMENTAIRE
|
|
SERVICES AUX ENTREPRISES
|
|
TRANSPORTS
|
|
AGRICULTURE
|
Toutes les régions « dans le rouge » : la PACA résiste mieux, les Hauts de France à la peine
- Les Hauts de France, seule région à retrouver la sinistralité de 2019 | La région enregistre son douzième mois consécutif de hausse du nombre de défaillances d’entreprises et les mois de cet été n’ont pas donné de signes d’amélioration. Les ouvertures de procédure ont plus que doublé (+116%) et dépassent désormais le niveau du 3e trimestre 2019 (875 vs 828).
- La Corse accuse la plus forte augmentation du nombre de défauts | La région compte 54 entreprises en défaillance ce 3e trimestre contre 21 un an plus tôt soit une augmentation de +157%. Aucune autre région ne présente une dégradation aussi rapide.
- Dans quatre autres régions, l’augmentation des défaillances d’entreprises dépasse + 80 % |
En Occitanie, les ouvertures de procédure sont en hausse continue depuis neuf mois. L’été marque même une accélération avec un bond de plus de 130 % en août. Sur le trimestre ; la région enregistre 814 défauts (+91%).
En Auvergne-Rhône-Alpes, la hausse des défaillances, ininterrompue depuis novembre 2021, est plus forte encore cet été 2022 (+87 %). La région compte 1050 ouvertures de procédures.
En Pays de la Loire, les défauts ont explosé de 314 % en août. Sur trois mois la hausse est de 87 % (360 procédures).
La Normandie a enregistré un mois de juillet très dégradé (+138 %) qui a pesé sur la tendance trimestrielle (82 %).
- Trois régions enregistrent une dégradation comprise entre +60 % et +80 %|La Bretagne a enregistré une augmentation de 103 % du nombre de défaillances d’entreprises en juillet et 206 % en août. A la faveur d’un bien meilleur mois de septembre, la région limite la hausse trimestrielle à +77% ;
Le Centre Val de Loire a stabilisé les ouvertures de procédures en septembre mais sur le trimestre l’augmentation reste sensible (+71%).
La Bourgogne-Franche-Comté fait à peine mieux que la moyenne nationale (+64%).
- Trois régions passent juste sous 60%|En Nouvelle-Aquitaine, Ile-de-France et Grand Est, l’évolution du nombre de défaillances est comprise entre 58 et 59 %.
- Provence-Alpes-Côte d’Azur, la meilleure performance régionale |La région a contenu la hausse des défauts à 31% en août et sous les 5 % en septembre. Dans ces conditions, sur trois mois, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur contient l’augmentation à « seulement » 37 %.
Thierry Millon conclut : « L’hypothèse d’un volume de défaillances d’entreprises contenu sous la barre symbolique des 40 000 en 2022 reste à ce stade plausible mais compromise. Le risque de pénurie d’énergie et l’envolée des prix complexifient fortement l’équation budgétaire des prochains mois pour de très nombreuses entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité. D’autant qu’au-delà des factures qui flambent, s’ajoute la problématique du remboursement des dettes (classiques et/ou PGE) ou auprès des Urssaf. Ces dernières ont joué un rôle tampon durant la crise mais, à l’instar du reste de l’économie, le retour à la normale prévaut et avec lui les échéances de règlement qu’il va falloir tenir. Par conséquent, en début d’année prochaine, les tribunaux pourraient retrouver davantage d’assignations déposées par l’organisme en action en recouvrement. La remontée des défaillances d’entreprises qui semble donc bien irréversible se poursuivra en 2023. Anticipation et prévention, resteront les mots d’ordre. »
L’étude complète « Défaillances et sauvegardes d’entreprises – 3e trimestre 2022 » est disponible ICI.