… La Présidence française s’achève par des accords politiques sur MiCA et TFR
Les 29 et 30 juin 2022, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne sont parvenus à des accords politiques provisoires sur deux textes réglementaires majeurs qui vont changer le visage de l'industrie crypto européenne : le règlement Markets in crypto-assets (MiCA) et le règlement révisé sur les transferts de fonds (TFR).
MiCA et TFR, les deux faces d'une même pièce pour la structuration de l'industrie des crypto-actifs
Ces deux derniers jours ont marqué un tournant pour l'industrie crypto alors que les délibérations sur MiCA et TFR continuent de façonner les marchés crypto européens de demain, et accélérer la construction d'un environnement plus sûr pour les citoyens désireux d'embrasser l'innovation crypto.
En effet, avec MiCA, l'Europe crée un cadre réglementaire entièrement dédié à cette nouvelle classe d'actifs. En parallèle et comme le recommandait le Groupe d'Action FInancière (GAFI), les transferts en crypto-actifs devront désormais respecter les exigences de traçabilité et d'identification ("travel rule") exigées par la révision de TFR.
Avec ces deux accords politiques, qui constituent un pas vers l'harmonisation des règles au sein des marchés européens, Bruxelles espère mieux protéger ses citoyens tout en luttant efficacement contre la criminalité financière.
« Ces avancées majeures - acquises sous Présidence française - sont non seulement cruciales pour le secteur afin d’assurer certitude et lisibilité règlementaires, garantir une concurrence équitable et faciliter l'expansion de leur activité au sein de l'UE grâce au passeport européen, mais aussi pour les citoyens européens afin de les aider à saisir les opportunités offertes par les crypto-actifs dans un environnement sûr et serein », estime Faustine Fleuret, présidente de l'Adan.
Entre soulagements et regrets
L’Adan accueille positivement les résultats des trilogues sur plusieurs questions majeures qui avaient mobilisé le secteur. L'exclusion de la finance décentralisée (DeFi) du champ d'application de MiCA était essentielle pour ne pas dénaturer ces innovations ou les contraindre à se développer à l'étranger. La non-qualification par défaut des NFT en crypto-actifs reconnaît enfin qu'ils ne constituent pas une population homogène d'actifs financiers. La création d'un registre public des prestataires de services de crypto-actifs (PSAN) non conformes impliquant des restrictions à leur activité est une arme supplémentaire contre la concurrence déloyale et les abus préjudiciables aux utilisateurs européens. L’approche proportionnée sur les questions environnementales permettra en outre d’embarquer de manière efficace les entreprises crypto dans la lutte contre le changement climatique.
Cependant, en dépit de nos nombreuses alertes, certains problèmes n'ont pas trouvé d'issue favorable et menaceront très probablement la réalisation des objectifs réglementaires ainsi que la compétitivité de l'UE. Parmi eux : une complexité et une rigidité accrues du régime des stablecoins (alors que des entités américaines profitent déjà de l'opportunité d'émettre des crypto euros à notre place) ; la transposition pour les marchés crypto de la reverse sollicitation ouvrant une brèche dans le marché pour les acteurs étrangers non conformes ; un élargissement du champ d'application de la travel rule à toutes les transactions (dès le premier euro) et à celles entre plateformes et portefeuilles privés (“unhosted wallets”); ou encore, la vérification systématique des informations relatives aux détenteurs de portefeuilles privés pour les transactions supérieures à 1 000€.
« L'Europe avance plus vite et plus loin que toutes les autres grandes juridictions dans le monde. Tant les régulateurs que les entreprises sont alignés quant aux objectifs légitimes poursuivis par la réglementation. Cependant, si nos efforts convergent afin de protéger les utilisateurs, atteindre les objectifs environnementaux de l'UE et agir contre la criminalité financière - sans abandonner notre souveraineté à des acteurs étrangers qui sont déjà plus grands que les acteurs européens - il existe un prérequis indispensable : établir en Europe des champions qui portent nos valeurs et nos ambitions », alerte Faustine Fleuret.
Ce n'est pas fini tant que la cloche n’a pas sonné
Les discussions techniques se poursuivent actuellement entre les co-législateurs sur chaque règlement avant leur publication au Journal officiel de l'Union européenne. MiCA et TFR révisé entreront en application 18 mois après leur entrée en vigueur, probablement fin 2022- début 2023, à l'exception de certaines dispositions notamment concernant les stablecoins. D'ici là, l'industrie sera confrontée à de nombreux défis. Tout d'abord, l’Adan encourage vivement la clarification de plusieurs règles grâce à des textes techniques qui doivent être rédigés par les régulateurs européens. Cela sera indispensable à la bonne préparation et mise en conformité des acteurs avec MiCA et TFR. Ensuite, d’autres textes tels que les règlements AMLA et AML - qui seront examinés dans les prochains mois - viendront compléter ces réglementations et, pour répondre aux inquiétudes des acteurs, rééquilibrer les rapports de force avec les acteurs étrangers. Enfin, certaines questions n'ont pas été abordées dans cette première phase d’encadrement des marchés de crypto-actifs et feront l’objet de réflexions dans les mois et années à venir, comme le traitement de la DeFi. C'est pourquoi ces accords politiques ne sont que la fin du début pour la réglementation européenne des marchés de crypto-actifs.
« L’Adan continuera d’œuvrer pour le secteur et à l’accompagner sur la voie de la réglementation européenne : il faut préserver l’ambition d’une industrie forte et compétitive dans la ligne de mire de l’Europe », rassure Faustine Fleuret.