L’Autorité des marchés financiers revient sur les actions conduites en 2021 au service de la protection des investisseurs et du bon fonctionnement des marchés financiers, qu’elle met en perspective des orientations stratégiques qu’elle s’était fixées sur la période 2018-2022. Alors que ce cycle stratégique s’achève dans un contexte économique affecté par les conséquences du conflit en Ukraine, le Président de l’AMF souligne les principaux défis à venir pour la supervision et la régulation des marchés financiers en France et en Europe.
Retour sur une année 2021 de forte mobilisation
Pour les sociétés cotées, 2021 a été une année active en matière d’introductions en Bourse, avec 45 opérations ce qui a permis d’enregistrer une augmentation du nombre des sociétés cotées sur Euronext ou Euronext Growth. Le nombre des diverses offres publiques, dont l’AMF doit examiner la conformité à la réglementation, a également fortement progressé, avec 43 décisions de conformité rendues. Ces tendances se poursuivent à un rythme moins élevé au premier semestre 2022. Parallèlement, dans le but d’accompagner les sociétés à l’approche d’échéances réglementaires importantes, l’AMF a effectué un panorama du reporting carbone des entreprises, afin de souligner les meilleures pratiques.
S’agissant de la supervision des sociétés de gestion et des produits d’épargne, 2021 a vu l’entrée en application de certaines des dispositions du règlement européen sur la fourniture d’informations sur l’intégration des critères de durabilité dans leurs décisions par les acteurs des marchés financiers (Sustainable Finance Disclosure Directive ou SFDR) et la préparation des professionnels en vue de la mise en œuvre du règlement Taxinomie. Le régulateur a poursuivi ses actions visant à accroître l’adoption par les gestionnaires des différents outils de gestion de la liquidité optionnels ; une consultation publique a été lancée en début d’année sur le sujet. D’importants travaux ont été conduits en matière de frais imputés aux investisseurs qui ont vocation à déboucher sur des évolutions réglementaires.
Dans le domaine de la finance digitale, l’AMF a enregistré, en lien avec l’ACPR, 21 prestataires de services sur actifs numériques en 2021. A mi-mai 37 prestataires sont ainsi enregistrés. L’enregistrement ne constitue qu’une première étape dans la perspective d’un agrément, optionnel à ce stade mais qui deviendra obligatoire dans le cadre du futur régime européen et permettra ainsi une supervision de prestataires qui pourront alors proposer leurs services dans l’ensemble de l’Union.
Que ce soit via son centre de relations avec les épargnants AMF- Épargne Info Services, via des contenus pédagogiques et ses mises en garde sur son site internet ou via une communication régulière sur les réseaux sociaux avec notamment son nouveau compte Instagram ou encore sa nouvelle campagne de prévention des arnaques initiée en décembre 2021, l’AMF a poursuivi ses actions d’information, d’éducation financière, de prévention et d’alerte. Pour permettre une commercialisation adaptée aux besoins et au profil des particuliers, elle a poursuivi aux côtés de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), ses travaux sur les parcours en ligne lors de la souscription de produits financiers. Dans le cadre de la vérification des compétences et connaissances des professionnels, dont ceux exerçant la fonction de vendeur, le module sur la finance durable est opérationnel depuis janvier 2022.
Une AMF en transformation
2022 étant la dernière année de la stratégie #Supervision2022, l’AMF a dressé dans son rapport annuel un bilan du chemin parcouru jusqu’ici et de ce qui lui reste à faire sur les quatre axes prioritaires identifiés début 2018 :
- s’engager pour une Europe à 27 forte, intégrée et compétitive à l’international ;
- faire évoluer la supervision et les moyens d’intervention ;
- accompagner les acteurs, favoriser l’innovation et soutenir l’attractivité des marchés et de la Place ;
- se transformer pour une AMF modernisée, plus ouverte et plus agile.
S’agissant plus directement de l’AMF, le régulateur est maintenant outillé pour développer de nouveaux usages de la donnée à des fins de supervision. Il continuera à déployer sa surveillance grâce aux projets développés à partir de la plateforme de surveillance ICY, qui repose sur des technologies Big Data, notamment dans le domaine de la gestion. De premiers résultats ont été obtenus en matière de réduction des délais de la filière répressive. Enfin, la nouvelle approche de supervision de l’AMF, qui s’appuie pour partie sur des contrôles thématiques courts (dits SPOT pour Supervision des pratiques opérationnelle et thématique) dont l’objectif est d’identifier les bonnes et les mauvaises pratiques dans le but de faire progresser l’ensemble des acteurs, est comprise. Au total, depuis 2018, ce sont quelque 160 établissements qui ont fait l’objet de contrôles SPOT.
Les défis à relever
A l’occasion de la présentation du rapport annuel à la presse, Robert Ophèle, le président de l’AMF a souligné les axes prioritaires pour l’AMF dans un contexte économique actuel, marqué par le conflit en Ukraine :
- Mobiliser au mieux l’épargne des Français vers le financement des fonds propres des entreprises ;
- Donner de la lisibilité et de la crédibilité à l’investissement durable ;
- Renforcer le cadre réglementaire européen.
S’agissant des années à venir, trois défis majeurs devront être relevés :
- S’agissant de la gestion d’actifs : « La position de leader de la France sur la gestion d’actifs, dont l’importance systémique est désormais avérée et la complexité de la répartition des responsabilités entre autorités nécessitent la poursuite de la montée en puissance du superviseur français et l’émergence d’une véritable approche européenne du secteur », a-t-il déclaré. A court terme, l’AMF poursuivra son programme de digitalisation des traitements et des échanges avec les sociétés de gestion et dépositaires et d’utilisation de la donnée pour une meilleure détection des zones de risques ;
- Finance durable : « Le second défi consiste à rendre opérationnelle une finance durable efficace et utile pour le financement de la transition, sur une base pertinente mais sans excès de complexité », a souligné Robert Ophèle. Ici, le principal enjeu sera celui de la bonne mise en œuvre des nouvelles normes de l’information extra-financière et l’AMF accompagnera les entreprises dans cette nouvelle étape ;
- Finance digitale : l’adoption du régime dérogatoire pilote pour les infrastructures de marché qui souhaitent utiliser les techniques de registres distribués et celle, attendue, de la réglementation des activités sur actifs numériques (MiCA) devront permettre l’émergence sur le périmètre du marché unique d’une approche homogène de ces activités. « C’est d’autant plus nécessaire que le régime français d’enregistrement des PSAN montre ses limites et que les expérimentations conduites sur le recours à la blockchain pour effectuer des transactions financières se sont révélées prometteuses », a précisé Robert Ophèle. S’agissant de la digitalisation de la commercialisation transfrontière des produits financiers, le président de l’AMF a appelé de ses vœux une montée en responsabilité de l’ESMA ainsi que le renforcement des compétences du superviseur du pays dans lequel les produits sont commercialisés.