Par Lior Pardo et Raphaël Pardo, cofondateurs d’Investir dans l’ancien
L’application progressive de la loi Climat & Résilience oblige les bailleurs à réaliser des travaux de rénovation pour améliorer significativement les performances énergétiques des logements mal isolés sous peine de ne plus pouvoir les mettre à la location. Conséquence : le volume des ventes de logements « vétustes » ne cesse d’augmenter, allant jusqu’à avoir par endroit une offre plus importante que la demande et donc des prix de vente inférieurs au prix marché. Une aubaine pour les investisseurs …
La France compte 4,8 millions de passoires énergétiques dans son parc immobilier, dont 2 millions en location. Ces logements vétustes et mal entretenus sont très consommateurs d’énergie pour être chauffés et sont fortement émetteurs de gaz à effet de serre. Face à l’urgence écologique, la loi Climat & Résilience de 2021 vise à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Un des volets de cette loi concerne le logement en accélérant leur rénovation thermique. Il est prévu d’interdire progressivement à la location les passoires thermiques à l’horizon 2028.
Ainsi, dès janvier 2023, les logements affichant une consommation d’énergie supérieure à 450kWh/m2 seront interdits à la location. Quelque 90 000 logements sont concernés par cette mesure. De même, les loyers des logements notés F et G ne pourront plus être augmentés si des travaux ne sont pas engagés. Conséquence, les professionnels de l’immobilier constatent une hausse du volume de mises en vente des logements notés E, F et G dans leur DPE.
Des investisseurs à l’affût de passoires thermiques
Les propriétaires bailleurs sensibles aux restrictions de la loi et à son calendrier préfèrent, pour certains, vendre leur bien plutôt que d’entamer de lourds travaux de rénovation. Ainsi, selon une étude de l’Unpi, moins d’un tiers des propriétaires envisagent d’entamer des travaux de rénovation. Les prix chutent partout, à l’exception des grandes villes, Paris en tête, et attirent l’œil des investisseurs à l’affût d’une bonne affaire.
Entre 2020 et 2021, les mises en vente de logements énergivores ont progressé de 7,7 % avec les départements ruraux des Hautes-Alpes, la Lozère, le Cantal et la Creuse qui affichent la part de passoires thermiques la plus importante. Selon, une étude Meilleurs Agents et Se Loger, la valeur des logements classés F et G est désormais inférieure de 18% à un bien noté A ou B.
La baisse des prix devrait se poursuivre et même s’accentuer à mesure que les différentes échéances de la loi Climat & Résiliences approchent. Si l’investissement semble alléchant, il convient de prendre en compte plusieurs critères comme l’état général du bâtiment, sa situation géographique et l’état du marché locatif. Une analyse indispensable pour s’assurer de la rentabilité du projet, d’autant que de lourds travaux de rénovation devront être engagés afin que le DPE du bien affiche à minima la notation D.
Des aides conséquentes pour réaliser les travaux de rénovation
Les travaux de rénovation des passoires thermiques s’élèvent à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Ces travaux de réhabilitation destinés à rendre le logement décent s’articulent autour de trois postes : l’isolation extérieure et intérieure, la ventilation et la consommation d’énergie pour le chauffage.
Pour inciter et accompagner les propriétaires et les bailleurs, l’Etat propose divers dispositifs incitatifs. Le succès de MaPrimeRénov’ a permis de financer en partie la rénovation de 800 000 projets en 2021. Reconduit en 2022, le dispositif piloté par l’Anah est doté d’un financement de 2 milliards d’euros. Il est ouvert à tous les ménages et permet de leur accorder une subvention en fonction de la nature des travaux. Autre dispositif en vogue, l’éco-prêt à taux zéro ou éco PTZ permet d’obtenir un prêt sans intérêt d’un montant pouvant atteindre 50 000 euros et sans conditions de ressource. En complément de ces deux dispositifs phares, il existe aussi des aides locales pour financer en partie les travaux de rénovation.
Enfin, les propriétaires bailleurs peuvent profiter d’une réduction d’impôt sur le revenu grâce au dispositif Denormandie. Pour en bénéficier, il est impératif d’engager des travaux représentant au moins 25 % de la valeur du bien, qui doit par ailleurs être localisé dans l’une des 222 villes du programme Actions cœur de ville. Le bailleur s’engage à louer vide le logement comme résidence principale sur une durée de 6 à 12 ans à un locataire respectant des conditions de ressources.
Dans le cas d’une location meublée, le statut LMNP incite les bailleurs à réaliser des travaux de rénovation, en leur permettant de déduire ces charges de leurs revenus locatifs dans le cadre du régime réel. Le fisc va jusqu’à autoriser le déficit foncier reportable sur plusieurs années pour réduire l’impôt sur le revenu.
Ainsi, malgré les nouvelles normes énergétiques sur les biens immobiliers, les passoires thermiques disposent de tous les arguments pour séduire les investisseurs, même les moins aguerris, à investir dans la pierre. Des avantages nombreux qui seront maintenus, voire étoffés, durant le nouveau quinquennat d’Emmanuel Macron.
En rénovant les logements, on limite ainsi le bilan carbone du marché de l’immobilier.