Avec l’allongement de la durée de la vie, la personne âgée n’est pas à l’abri d’une altération de ses facultés mentales ou physiques et l’impossibilité de gérer son patrimoine. Deux outils existent lui permettant d’organiser sa vieillesse,à la fois dans son propre intérêt et dans celui de ses héritiers ou des entreprises dont elle a la charge : le mandat de protection future (loi n°2007-308 du 5 mars 2007) et le mandat à effet posthume (loi n°2006-728 du 23 juin 2006).
Elisabeth Deflers, Avocat associée au cabinet Péchenard & associés*, fondatrice et présidente de l’Institut du droit de la famille et du patrimoine, passe au crible ces deux nouvelles pratiques.
Le mandat de protection future
Il permet à une personne, en pleine capacité de ses moyens au moment de la conclusion du mandat, d’organiser sa vie quotidienne, ses affaires courantes et la gestion de ses biens en cas d’altération à venir de ses facultés mentales ou physiques, et ce, qu’il s’agisse de ses biens mobiliers ou immobiliers, de son entreprise ou de son mode de vie.
Un contrat est signé entre le mandant – sain de corps et d’esprit – et le mandataire qui accepte la mission qui lui est confiée. Mission qui ne prendra effet qu’en cas d’incapacité du mandant à agir seul.
Ce mandat peut revêtir deux formes, les pouvoirs octroyés au mandataire seront différents selon l’option choisie :
- L’acte authentique notarié qui autorise le mandataire à accomplir tous les actes patrimoniaux qu’un tuteur peut faire, à la fois ceux qui peuvent être effectués sans autorisation du juge des tutelles, mais également ceux qui nécessitent une telle autorisation, notamment les actes de disposition (à l’exception des dispositions à titre gratuit).
- L’acte sous seing privé qui lui, au contraire, limite les actes du mandataire à ce qu’un tuteur peut faire sans autorisation du juge.
Le mandat de protection future peut porter également sur l’exercice de l’autorité parentale d’un enfant mineur, ou sur la « charge matérielle et affective » d’un enfant majeur, voire handicapé.
Le mandat à effet posthume
Il organise tout ou partie de la succession du mandant après son décès. Le mandataire est une personne physique ou morale qui agit en son nom propre mais pour le compte et dans l’intérêt des héritiers.
Le mandat à effet posthume est nécessairement un acte authentique avec une durée limitée par la loi (deux ou cinq ans, prorogeables par le juge). Ce mandat doit être motivé par un intérêt sérieux et légitime qui peut tenir soit à la personnalité des héritiers, soit à la nature des biens composant la succession. Le mandataire doit être choisi pour ses compétences et son énergie. Il aura ainsi la qualité d’exploitant, il remplira sa mission en son propre nom, il pourra acheter et vendre les stocks, gérer le personnel, mais il ne pourra pas accomplir d’actes de disposition. Dans une société, le mandataire n’aura pas la charge de l’exploitation, mais seulement la gestion des titres dépendant de la succession.
Ce mandat est largement encadré par des conditions de forme et de motivation et son champ d’application est limité, le mandataire n’est, par exemple, jamais autorisé à disposer des biens, l’acte de disposition restant l’apanage de l’héritier.
Qu’est-ce qui peut motiver de tels mandats ?
Mandat posthume et mandat de protection future répondent à une préoccupation de sécurisation du patrimoineen cas d’incapacité ou de décès, et à la nécessité d’une certaine continuité notamment lorsque le patrimoine comporte des entreprises.
Le mandat de protection future constitue un réel avantage par rapport à la curatelle et à la tutelle dans la mesure où le contrat fixe l’étendue des pouvoirs conférés au mandataire et peut permettre de répondre à des attentes particulières du mandant.
Le mandat à effet posthume peut être motivé par l’âge des enfants, leur immaturité ou leur inaptitude à gérer le patrimoine du défunt, ou encore la complexité particulière de ce patrimoine, notamment s’il comporte des entreprises. L’entreprise individuelle est parfois vouée à sa perte lorsque le chef d’entreprise n’est plus capable de la gérer ou disparaît.
Quels sont les pièges à éviter ?
Ces deux dispositifs qui permettent une individualisation très poussée de la gestion du patrimoine délèguent d’importants pouvoirs aux mandataires. Ils nécessitent une rédaction minutieuse et claire des mandats et un choix très scrupuleux du ou des mandataires. Dans les deux cas, le mandataire devra être choisi à la fois en raison de la confiance que le mandant porte en lui et en raison des compétences particulières du mandataire pour gérer les biens. Il appartient au rédacteur d’être le plus prévoyant possible, le plus proche des exigences particulières du mandant et le plus adapté au contexte.
*Péchenard & associés : Créé il y a plus de 50 ans par Christian Péchenard, le cabinet d’avocats Péchenard & associés s’est développé autour de quatre départements : communication, entreprise, social, famille & patrimoine. Certifié ISO 9002 depuis 1994 et ISO 9001 depuis 2003, Péchenard & associés compte désormais 6 associés entourés de 16 collaborateurs.