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[Questions de Gestion] L’épargne mondiale en période de covid  

Etude annuelle Global Wealth Report publiée par le groupe Allianz

  • Epargnés par la crise : La taille totale des actifs financiers mondiaux a augmenté de 9,7% en 2020, atteignant pour la première fois la barre symbolique des 200 000 Mrds€
  • Vaccinés : 2021 devrait à nouveau être une bonne année pour les épargnants, avec une croissance des actifs financiers dans le monde d'environ 7%
  • Covid long : la crise devrait contribuer à creuser les inégalités de richesse entre pays riches et pauvres et entre catégories sociales de ces pays
  • France : Une croissance solide de 5,7% des actifs financiers en 2020

Epargnés par la crise

2020 a été l'année des contrastes les plus extrêmes. Le Covid-19 a fait des millions de victimes.  L'économie mondiale a fait l’expérience de la récession la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans le même temps, les politiques monétaire et budgétaire ont mobilisé des sommes inimaginables pour soutenir l'économie, les marchés et les populations. Avec succès : les revenus des ménages ont été préservés et les marchés boursiers se sont rapidement redressés. Grâce à ce soutien politico-économique sans faille, le patrimoine des ménages a résisté à la crise de Covid-19 : les actifs financiers bruts mondiaux ont augmenté de 9,7% en 2020, atteignant pour la première fois la barre symbolique des 200 000 Mrds€.

L'épargne liquide a été la principale contributrice à cette hausse des actifs totaux des ménages : avec les mesures de confinement réduisant drastiquement les débouchés de consommation, le phénomène de l' « épargne forcée » a pris une dimension mondiale et historique. Les nouveaux flux d’épargne ont bondi de 78% au niveau global pour atteindre 5 200 Mrds€ en 2020, un record absolu. Les flux nourrissant les dépôts bancaires - l'option par défaut de l'épargne forcée (ensemble des revenus non dépensés et laissés sur les comptes bancaires) - ont presque triplé (+187%). Les dépôts bancaires ont représenté un peu plus de la moitié de l'épargne nouvellement créée sur l’ensemble des marchés du monde. Pour la première fois dans l’histoire, les dépôts bancaires dans le monde ont connu une croissance à deux chiffres de 11,9% ; le précédent pic de croissance était de 8% lors de la crise financière de 2008. Alors que la classe d'actifs des valeurs mobilières - portée par la vigueur des marchés boursiers - a augmenté de 10,9%, les actifs d’assurances et de fonds de pension ont connu une évolution beaucoup plus faible, avec une hausse de 6,3%.

Vaccinés

Malgré un début d’année timide, marqué par la persistance de goulets d'étranglement dans le commerce mondial et de nouveaux variants du virus qui imposent de nouvelles restrictions, le PIB mondial connaîtra une forte croissance en 2021. Les bons progrès des campagnes de vaccination permettent en effet aux économies de rouvrir et de revenir (partiellement) vers un fonctionnement normal. En outre, les politiques monétaires accommodantes et un soutien budgétaire généreux restent en place. Le résultat pour les épargnants du monde entier ? Sauf correction boursière majeure, 2021 devrait représenter une autre bonne année, avec une croissance des actifs financiers d'environ 7% attendue au niveau global.

« Les chiffres clé sont très impressionnants », déclare Ludovic Subran, Chef économiste du groupe Allianz. « Mais nous devrions analyser ces phénomènes plus en profondeur. La plupart des ménages n'ont pas vraiment épargné au sens productif du terme mais ont simplement mis leur argent de côté. Tout cet argent qui dort sur les comptes bancaires représente un coût d’opportunité considérable.  Au lieu d’envisager l’épargne comme une variable résiduelle, les ménages devraient investir de manière active dans leur retraite et dans l’économie de la transition verte. Cela donnerait l’opportunité à nos sociétés d’envisager les défis primordiaux auxquels nous sommes confrontés, comme le changement climatique et démographique, avec beaucoup plus de sérénité. Dans l’éventualité où les ménages commenceraient à désépargner suite à un rétablissement de la confiance, l'argent qui stagne actuellement, pourrait finalement se retrouver dans une consommation de rattrapage, alimentant par là-même le risque inflationniste. Nous avons besoin de toute urgence d'une nouvelle "culture de l'épargne" ».

Covid long

En 2020, les actifs financiers des marchés émergents (+13,9%) ont à nouveau progressé plus rapidement que ceux des marchés avancés (+10,4%), renouant ainsi avec des schémas traditionnels de croissance. L'écart de prospérité entre pays riches et pays pauvres s'est ainsi quelque peu réduit. L’observation que nous avions faite l'année précédente, à savoir un écartement de la richesse entre pays pauvres et pays riches au profit de ces derniers, ne semble donc plus s’être reproduite. Toutefois, il est (beaucoup) trop tôt pour se réjouir d’un retour du processus de réduction des écarts de richesse. Si de nombreux pays en développement se sont étonnamment bien comportés au cours de la première année de la pandémie, certains éléments indiquent que les conséquences et les défis à long terme liés à cette crise - vaccination insuffisante, nécessité de reconfigurer les chaînes d'approvisionnement en opérant une transformation numérique et écologique - pourraient principalement défavoriser les pays les plus pauvres.

On peut faire le même constat en ce qui concerne la répartition des richesses nationales. Alors que le poids des classes moyennes dans la richesse nationale s'est réduite ces dernières années dans de nombreux pays, pour 2020 au moins, les immenses transferts sociaux semblent avoir permis une inversion de cette tendance. Néanmoins, ce facteur atténuateur des inégalités pourrait ne pas durer avec des aides publiques arrivant à échéance et le niveau de protection (du fait de l’intervention des états) des marchés de l’emploi s’abaissant progressivement. De plus, la crise a entraîné une dégradation importante des fondamentaux de scolarité. La Covid-19 risque donc de bloquer encore davantage l’ascenseur social. L’interruption de la baisse progressive de la richesse de la classe moyenne au sein de la richesse nationale en 2020 n’a donc vocation qu’à être temporaire.

« La pandémie représente un défi bien plus important pour les pays les plus pauvres », a commenté Patricia Pelayo Romero, co-auteur du rapport. « Très probablement, la Covid-19 continuera à freiner le développement économique de ce groupe de pays de manière beaucoup plus durable que dans les marchés avancés. Le véritable défi pour ces pays se situe dans l’héritage structurel de cette crise : ces derniers se retrouveront dans un monde post-pandémique où il leur sera de plus en plus difficile de faire jouer leurs avantages comparatifs (notamment les faibles coûts de production), compte tenu de changements durables qui concerneront des technologies plus protégées, des politiques commerciales plus défensives et des modes de vie plus respectueux de l’environnement. La réduction progressive de l'écart de prospérité mondial entre pays riches et pays pauvres - l'évolution déterminante de ces dernières décennies - ne peut plus être considérée comme acquise."

France

Une croissance solide de 5,7% des actifs financiers. Le patrimoine financier brut des ménages français a augmenté de 5,7% en 2020, ce qui correspond à la moyenne régionale de l'Europe occidentale (5,8%). Les dépôts bancaires ont été le principal moteur de cette hausse, avec une augmentation (en stock) de 9,8%, la plus rapide depuis le début du siècle. En flux, les dépôts ont bondi de 83% en 2020 (contre 67,9% pour l’ensemble des actifs financiers). En fait, 60% de l'épargne nouvellement créée a atterri sous forme liquide sur des comptes bancaires. Les valeurs mobilières sont l'autre grand gagnant de l'année 2020 : après avoir été vendeurs nets de titres pendant quatre années consécutives, les ménages français ont investi 28 Mrds€ sur les marchés de capitaux (ce qui représente tout de même moins de 20% du montant placé sur les dépôts bancaires). Malgré ces nouveaux investissements, la classe d'actifs des valeurs mobilières n'a progressé que de 2,9% en 2020 (versus 13,1% en 2019), ce qui reflète la piètre performance du marché boursier français. Enfin, les actifs d’assurances et de fonds de pension ont connu une croissance modeste de 3,1%, avec une division par deux des nouveaux flux d'épargne dédiés à cet effet (environ 22 Mrds€). Néanmoins, avec une part de portefeuille de 36%, cette classe d'actifs (assurances et fonds de pension) reste la plus populaire (dépôts bancaires : 29%, titres : 28%).

Le passif ou dette des ménages français a augmenté de 5,2%, soit bien plus que la moyenne européenne régionale de 3%. La production économique s'étant contractée en 2020, le taux d'endettement des ménages (passif en % du PIB) a bondi à 81%. Les actifs financiers nets, enfin, ont augmenté de 6%. Avec des actifs financiers nets par habitant de 66 560€, la France se maintient à la 15e place du classement des 20 pays les plus riches (actifs financiers par habitant, voir tableau), devant l'Italie et l'Allemagne. Cependant, comme d'autres pays européens tels que l'Italie, la Belgique ou la Grande-Bretagne, la France a chuté de manière assez spectaculaire dans le classement depuis 2000 au profit de pays scandinaves et asiatiques tandis que les États-Unis et la Suisse règnent toujours en maîtres.

Pour 2021, on peut s'attendre à une évolution plus dynamique, notamment grâce à un marché boursier porteur. Avec une hausse de 7%, les actifs financiers des ménages français ont d’ores-et-déjà augmenté au premier semestre 2021 plus rapidement que toute l'année dernière.

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