Knight Frank dresse le bilan du marché de l’investissement en France et du marché locatif des bureaux en Ile-de-France.
1/ Marché de l’investissement : retour à la hausse
Hausse de 24 % des volumes investis au 3e trimestre 2021
Après la baisse de 28 % constatée entre les 1er et 2e trimestres 2021, les sommes engagées sur le marché français de l’investissement en immobilier d’entreprise (bureaux, commerces et locaux industriels) sont reparties à la hausse durant la période estivale. « 4,5 Mrds€ ont été investis dans l’Hexagone au 3e trimestre 2021, soit une progression de 24% par rapport au trimestre précédent. Avec 13,3 Mrds€ depuis le début de 2021, les montants investis sont toutefois inférieurs de 23% au résultat de la même époque l’an passé. La baisse est même de 40% par rapport aux neuf premiers mois de 2019, confirmant que l’épidémie pèse toujours sur l’activité du marché de l’investissement malgré la nette amélioration de la situation économique et sanitaire », annonce Matthieu Garreaud, co-directeur du département Investissement de Knight Frank France.
Le recul de l’activité est toujours lié au moindre dynamisme des grandes transactions. 35 opérations supérieures à 100 M€ ont ainsi été recensées depuis le début de 2021, contre 46 à la même période en 2020 et 50 lors des neuf premiers mois de 2019.
Bureaux : la sécurité avant tout
Les volumes investis en bureaux en France s’élèvent à 8,5 Mrds€ depuis le début de 2021, soit un recul de 27% sur un an et de 49% par rapport à la même période en 2019. La part des bureaux continue par conséquent de diminuer pour atteindre 64% de l’ensemble des sommes engagées dans l’Hexagone contre 68% il y a un an et 75% deux ans auparavant. En Ile-de-France, leur part reste plus importante (87%) en dépit d’une chute de 25% des volumes investis sur un an liée, là encore, au nombre restreint de grandes opérations (23 transactions supérieures à 100 M€ recensées depuis janvier contre 49 à la même période en 2019). Un rebond est toutefois attendu au 4e trimestre, avec plusieurs grandes transactions à finaliser dont certaines supérieures à 200 M€.
Les volumes investis ont reculé dans la plupart des pôles tertiaires, à commencer par le QCA où ils s’élèvent à 1,7 Mrds€ à la fin du 3e trimestre 2021. La baisse est de 25% sur 1 an et s’explique par une offre très restreinte plutôt que par la désaffection des investisseurs.
Hors de Paris, La Défense est l’un des rares secteurs à voir sa performance s’améliorer à la fin du 3e trimestre grâce notamment à la cession par Generali à Antirion de 50% de la Tour Saint-Gobain (« M2 »). « La hausse des volumes investis à La Défense doit être relativisée. Après une année 2020 quasi blanche et malgré quelques grandes transactions à venir, les sommes engagées en 2021 resteront significativement inférieures à la moyenne annuelle entre 2015 et 2019, soit 2,7 Mrds€. Néanmoins, le redressement du quartier d’affaires est indéniablement en marche, d’autant que les transactions locatives sont également plus nombreuses et que les livraisons de grandes surfaces neuves-restructurées vont progressivement se raréfier après une période de forte production », soutient Matthieu Garreaud.
Redressement du marché des commerces
Après un début d’année timide, le marché français des commerces a repris des couleurs. « Après les 900 M€ du 1er semestre 2021, l’activité s’est redressée au 3e trimestre avec un volume égalant celui des six mois précédents, ce qui porte à 1,8 milliard l’ensemble des sommes engagées sur le marché français des commerces depuis janvier. Ce montant est tout de même inférieur de 41% à celui de la même époque l’an passé », annonce Antoine Grignon, co-directeur du département Investissement de Knight Frank France. La baisse des volumes tient au nombre réduit de transactions, même si les trois derniers mois ont été animés par plusieurs grandes opérations. « La concrétisation de ces grandes opérations est un signe positif : s’ils restent très sélectifs, les investisseurs retrouvent peu à peu la confiance et sont prêts à se positionner sur de gros montants. En outre, les principales opérations du 3e trimestre ont porté sur différents types de biens, qu’il s’agisse de flagships parisiens, de centres commerciaux urbains, de formats alimentaires ou de commerces de périphérie, montrant que les investisseurs sont prêts à saisir des opportunités sur tous les segments de marché », poursuit Antoine Grignon.
Logistique : l’exceptionnel devient la norme
Malgré leur redressement, les commerces sont toujours devancés par les actifs industriels. Avec 3 Mrds€ investis sur les neuf premiers mois de 2021, soit une hausse de 14% par rapport à la même période l’an passé, ces derniers concentrent 23% de l’ensemble des montants engagés sur le marché français de l’immobilier d’entreprise contre 13% pour les commerces. Constitué à 68% de portefeuilles, dont l’acquisition récente par Hines de 11 sites logistiques Auchan et la cession par Morgan Stanley du portefeuille « Spark », ce volume important permet de tabler sur une nouvelle année à plus de 3,5 Mrds€.
La logistique concentre toujours la grande majorité des volumes investis en immobilier industriel (86% depuis le début de 2021), qu’il s’agisse d’entrepôts XXL neufs vendus en blanc ou de sites existants cédés dans le cadre de sale & leaseback, à l’image du portefeuille Auchan acheté par Hines. De fait, le contexte est particulièrement propice aux opérations d’externalisation, qu’il s’agisse pour les acquéreurs de pallier le manque d’offres sécurisées ou pour les vendeurs de profiter de la hausse des valeurs vénales. Enfin, les besoins liés à la livraison du dernier kilomètre alimentent également la demande pour les zones les plus proches des agglomérations, la rareté du foncier faisant notamment de la reconversion de bâtiments obsolètes en parcs d’activités et sites logistiques de dernière génération une solution de plus en plus pertinente et recherchée par les investisseurs.
Quelles perspectives pour les prochains mois ?
Malgré la hausse enregistrée au 3e trimestre, le résultat des neuf premiers mois laisse prévoir un volume inférieur en 2021 à celui de 2020 (26,4 Mrds€ en France). La tendance devrait néanmoins s’inverser en 2022 grâce à l’amélioration du contexte économique et sanitaire, à des marchés locatifs mieux orientés et à la plus forte présence des investisseurs étrangers, qui ne représentaient ainsi que 40% des volumes investis en France en 2020 mais 53% depuis le début de cette année. Néanmoins, l’activité pourrait être pénalisée par le manque de produits sur les segments de marché les plus recherchés, qu’il s’agisse de bureaux sécurisés par des baux longs, ou des types d’actifs ayant démontré leur solidité lors de la crise sanitaire (commerce alimentaire, retail parks, logistique, etc.). Ceci entretiendra la concurrence entre investisseurs, maintenant les taux de rendement prime à leur niveau plancher ou accentuant leur compression, sur le segment de la logistique en particulier. « Face à la rareté persistante de l’offre et à la compression des taux, les investisseurs pourraient être tentés de prendre plus de risque pour atteindre leurs objectifs de rendement et tirer parti de la reprise. L’amélioration du contexte économique et sanitaire, le retour progressif de la confiance et l’urgence écologique les inciteront notamment à saisir les opportunités de revalorisation d’actifs existants. Le marché français regagnerait ainsi de la profondeur et pourrait peu à peu renouer avec ses performances d’avant crise », concluent Matthieu Garreaud et Antoine Grignon.
2/ Marché locatif des bureaux : la reprise s’accélère
L’activité locative ne cesse de s’améliorer au fil des mois, signe de l’accélération des prises de décision des entreprises sur fond d’amélioration de la situation sanitaire et économique et de retour au bureau des salariés. « 513 000 m² de bureaux ont été pris à bail en Ile-de-France au 3e trimestre, soit une hausse de 18% par rapport au trimestre précédent mais une légère baisse de 3% par rapport à la moyenne d’un 3e trimestre depuis cinq ans » annonce Guillaume Raquillet, Directeur de l’agence Bureaux chez Knight Frank France. Les surfaces prises à bail depuis le début de 2021 totalisent un peu plus d’1,3 million de m², un volume assez proche du résultat atteint sur l’ensemble de 2020 (1,4 million) mais inférieur de 21% au niveau d’avant crise (1,68 million de m² à la fin du 3e trimestre 2019).
Le moteur des grandes transactions redémarre
Le rebond de l’activité d’une année sur l’autre concerne tous les créneaux de surfaces, mais c’est sur celui des petites transactions (celles inférieures à 1 000 m² avec une hausse de 44% des volumes placés en un an) et celui des grandes transactions (celles supérieures à 5 000 m² avec une hausse de 60% sur 1 an) que la progression est la plus importante. L’évolution est moins marquée sur le créneau des surfaces de taille intermédiaire, avec une hausse de 6% par rapport à la même période en 2020. La tendance est la même en nombre de transactions, avec un chiffre stable sur le créneau des moyennes surfaces mais un bond de 46 % sur le segment des petites surfaces et de 144% sur celui des grandes opérations.
39 mouvements supérieurs à 5 000 m² ont été finalisés depuis le début de l’année 2021 dont 16 au 3e trimestre. En 2020, seules 22 transactions de plus de 5 000 m² avaient été dénombrées sur l’année entière, dont 15 portaient sur des surfaces neuves-restructurées.
La reprise se diffuse à l’ensemble de l’Ile-de-France
La répartition géographique des grandes transactions est bien plus équilibrée qu’il y a un an, signe que la reprise ne repose pas sur un nombre restreint de territoires mais se généralise à l’ensemble de l’Ile-de-France. Ainsi, les mouvements supérieurs à 5 000 m² ont été plus nombreux dans plusieurs pôles tertiaires franciliens, la plupart affichant également une hausse des volumes placés toutes surfaces confondues. L’augmentation est particulièrement marquée en 1ère Couronne Nord (+89% sur un an), du fait des cinq grandes transactions actées depuis le début de 2021 dont la récente prise à bail par la SNCF de près de 30 000 m² dans « Hamo » à Saint-Denis.
Paris QCA : quelle crise ?
Dans Paris intra-muros, où les volumes progressent de 42% sur un an grâce notamment au dynamisme des petites surfaces, le QCA reste le moteur de l’activité locative. 284 000 m² y ont été loués ou vendus aux utilisateurs depuis le début de 2021 contre 160 000 m² à la fin du 3e trimestre 2020 (+77%). Tous les créneaux de surfaces sont dynamiques. « Si la hausse d’une année sur l’autre était attendue, l’ampleur des volumes placés est remarquable, la performance des neuf premiers mois de 2021 n’étant inférieure que de 6% à celle de la même période en 2019. Cela ne signifie pas que le QCA n’a pas souffert de l’épidémie. Mais ce dernier s’est redressé très rapidement, comme nous le pressentions dès le premier confinement », poursuit Guillaume Raquillet. Le QCA dispose en effet de tous les atouts pour résister à la crise sanitaire, bénéficiant de certaines évolutions structurelles de la demande des utilisateurs de bureaux (recherche de centralité, aménités urbaines, etc.) et restant la cible prioritaire d’entreprises captives et à forte valeur ajoutée comme le luxe, le conseil, les nouvelles technologies, la finance et les activités juridiques.
Ralentissement de la hausse de l’offre
Le volume de l’offre disponible a augmenté de façon plus modérée au 3e trimestre 2021 grâce au rebond de la demande et à des livraisons moins nombreuses. Après un bond de 33% entre mi-2020 et mi-2021, l’offre n’a progressé que de 2% au cours des trois derniers mois, et totalise désormais 4,05 millions de m² en Ile-de-France. Le taux de vacance est de 7,3% contre 5,9% il y a 1 an et se rapproche un peu plus du pic de la fin de 2014 (7,7%).
Pénurie en vue dans le QCA
Un peu plus d’1,3 million de m² de bureaux neufs-restructurés seront achevés en 2021 en Ile-de-France. Gonflé par certaines livraisons initialement prévues en 2020 mais reportées en raison de l’épidémie, ce volume est nettement supérieur à la moyenne des cinq dernières années (807 000 m² livrés chaque année entre 2016 et 2020). Les rythmes de développement seront plus modérés en 2022 (1,05 million de m²) et 2023 (0,9 million) du fait de l’ajournement, du décalage ou, plus rarement, du redimensionnement de certains projets. Les difficultés d’approvisionnement en matériaux de construction pourraient également occasionner des retards.
Quelles perspectives pour les prochains mois ?
Le redressement du marché des bureaux d’Ile-de-France devrait se poursuivre au 4e trimestre, permettant de tabler sur des volumes placés plus importants qu’escompté en début d’année. Après le trou d’air de 2020, la demande placée devrait ainsi atteindre, et même dépasser 1,7 million de m² en 2021. « Ce résultat serait à minima inférieur de près d’un tiers à la moyenne des cinq années précédant la crise sanitaire. Mais après tant d’incertitude, l’amélioration des derniers mois n’est pas anodine. Les entreprises, qui y voient aujourd’hui plus clair sur les perspectives économiques et l’impact du télétravail sur leur organisation, sont désormais capables de se projeter dans l’avenir et de mener à bien leur projet immobilier », conclut Guillaume Raquillet.