Ce rapport annuel publié par Deloitte et Altares dresse un bilan des procédures de prévention et de traitement des difficultés des entreprises sur la période 2008- 2012.
Après la consolidation constatée en 2011, la tendance 2012 est à l’augmentation, aussi bien en termes de procédures amiables que collectives. La fin de l’année 2012 est marquée par une accélération des défaillances liée à une conjoncture générale défavorable en Europe, ainsi que par une hausse du nombre de défaillances des sociétés de plus de 50 salariés.
Le nouveau ralentissement économique observé au deuxième semestre 2012 et son prolongement en 2013, combinés aux modifications des habitudes de consommation des ménages ont fini par peser sur les défaillances d’entreprises. Celles-ci accusent une hausse de 3% par rapport à 2011 avec environ 59 800 procédures ouvertes, ce qui représente un taux de sinistralité de 2% des entreprises françaises. Cette hausse modérée masque en fait une accélération des défaillances d’entreprises sur le dernier trimestre de 2012 avec une augmentation de 13% du nombre total de procédures ouvertes par rapport à la même période de 2011.
Des procédures amiables en nette augmentation en 2012
Sur un échantillon de 13 grands Tribunaux de Commerce, le nombre de dossiers de prévention instruits et le recours aux procédures de traitement amiable ont augmenté de manière significative par rapport à 2011, avec une croissance de 15%, confirmant l’intérêt de l’anticipation des difficultés. Cependant, ce niveau reste inférieur de 16% à celui atteint en 2009.
La prévention joue un rôle de plus en plus important dans le traitement des difficultés. Toutefois, les procédures amiables (mandat ad hoc et conciliation) ne représentent qu’une faible proportion des dossiers traités par les Tribunaux de Commerce. Elles concernent principalement des sociétés de taille importante.
La prévention dans le cadre de procédures amiables n’est pas encore assez utilisée par les TPE et PME, par manque d’information et du fait du coût qui lui est associé.
Le mandat ad hoc reste la procédure la plus utilisée dans le traitement amiable des difficultés. On constate cependant une part croissante de la conciliation qui représente 47% des procédures amiables en 2012 (en pratique, bon nombre de mandats ad hoc sont suivis d’une conciliation).
Une recrudescence des procédures de sauvegarde
Le nombre de procédures de sauvegarde est en progression de 6% par rapport à 2011, avec 1 498 jugements d'ouverture prononcés en 2012, soit plus du double du niveau de 2008.
Bien qu’en augmentation, la part des sauvegardes reste cependant limitée. On compte seulement une ouverture de sauvegarde pour 12 redressements judiciaires. En effet, la perte de confidentialité liée à cette procédure, combinée à une absence d’anticipation des difficultés, pousse les sociétés à retarder le traitement de leurs difficultés avec le risque d’entrer directement en redressement judiciaire.
Les entreprises de plus de 50 salariés ont plus recours aux procédures de sauvegarde (22% des procédures). Elles ont toutefois fait preuve de moins d’anticipation de leurs difficultés en 2012, avec une baisse du nombre d’ouvertures de sauvegardes, à comparer à une forte hausse des défaillances (redressement judiciaire ou liquidation judiciaire directe).
Malgré tout, l’efficacité de cette procédure est avérée, car près de la moitié des procédures se concluent par un plan de sauvegarde (avec un délai moyen de période d’observation de 14 mois) dont seulement 10% débouchent in fine sur un redressement ou une liquidation judiciaire.
Un nombre de redressements et de liquidations judiciaires en hausse
En 2012, le niveau des défaillances est reparti à la hausse avec 59 780 jugements, combinant une stabilité des jugements d’ouvertures de redressement judiciaire (18 475 jugements) et une hausse de 4% des jugements d’ouvertures de liquidation judiciaire directe par rapport à 2011, soit 41 305 jugements. Pour autant, ce niveau de défaillances n’atteint pas le niveau historique de 2009.
Cette hausse des défaillances est nettement plus marquée sur la fin de l’année, du fait d’une nouvelle dégradation de l’environnement économique au second semestre 2012 (+4% pour les redressements judiciaires et +17% pour les liquidations judiciaires directes sur le seul quatrième trimestre 2012).
Par ailleurs, on observe une forte hausse (18%) des défaillances d’entreprises de plus de 50 salariés, notamment de sociétés de taille très importante.
Les liquidations judiciaires directes, presque uniquement représentées par de très petites entreprises, constituent toujours plus des deux tiers des défaillances enregistrées (68%).
L’issue des procédures de redressement judiciaire reste stable avec une solution, sous forme de plan de redressement ou de plan de cession, trouvée pour 27% des entreprises.
Quelles perspectives pour 2013 ?
Fin 2012, bon nombre d’entreprises n’ont pas réussi à revenir à leur niveau de rentabilité antérieur et se sont progressivement affaiblies au cours des 4 dernières années sous le poids de leur endettement ou d’ajustement structurels insuffisants. Les entreprises traversent donc l’environnement économique turbulent actuel avec une vulnérabilité accrue. Pour s’adapter à une crise qui dure, et face à l’émergence des nouveaux modes de consommation (drive, e-commerce…) et nouvelles technologies (cloud, smart grid, big data…), les entreprises doivent opérer des transformations structurelles afin de défendre leur compétitivité. Cependant les possibilités de reconversion, d’ajustement ou de diversification salvatrices se voient limitées par la santé financière des entreprises fragilisées par quatre années de crise.
La nécessaire adaptation à la crise permettra aux entreprises de réenclencher le cercle vertueux de l’innovation, des créneaux porteurs et de l’exportation, favorisant ainsi leur développement sur le plan national et international. Elles pourront s’appuyer sur des signaux positifs en 2013 : une demande mondiale qui continue de progresser, des dépenses en recherche et innovation qui restent à un niveau élevé en France (2,2% du PIB en 2010) et une prise de conscience collective de la nécessité de restaurer la compétitivité des entreprises françaises. Le savoir-faire, la productivité, l’investissement en R&D, la formation reconnue des salariés, le positionnement géographique et la diversité des industries et services en France laissent envisager un redressement de la situation.
« Le panorama 2012 de l’entreprise en difficulté souligne la vulnérabilité des entreprises, avec une accélération des défaillances au dernier trimestre. Néanmoins, les entreprises qui ont su se transformer en adaptant leur organisation, en diversifiant leurs marchés et leurs activités, en bénéficiant de la croissance mondiale grâce à une internationalisation réussie et en favorisant l’innovation, ont aujourd’hui retrouvé un niveau d’activité supérieur à celui de 2008» souligne Vincent Batlle, Associé responsable de l’activité Reorganisation Services chez Deloitte. Il poursuit : « Nul doute que les entreprises françaises sauront s’adapter et trouveront les leviers qui leur permettront de se redresser et prendre part à la compétition économique mondiale».
Thierry Asmar, Président du Directoire d’Altares conclut : « On peut observer que les enjeux ne sont sans doute pas les mêmes selon la taille des entreprises et leurs dynamiques sur leurs marchés. C'est notamment vrai pour les plus importantes, PME et ETI, qui sont aujourd'hui bien plus attentives à la gestion du cash, beaucoup plus volontaires en matière de présence à l'international, et surtout majoritairement engagées dans des processus d'innovation et d'adaptation permanente. Ce sont à l'évidence ces facteurs qui vont les aider de plus en plus à se projeter vers le futur dans de bien meilleures conditions. »
Pour télécharger l'étude complète : www.deloitte.com/view/fr_FR/fr/mediatheque/b17abda26588d310VgnVCM1000003256f70aRCRD.htm