Par Olivier Grenon-Andrieu, Président d’Equance, société de gestion privée à l’international
À fin 2019, on estime la présence française à l’étranger à plus de 3,5 millions de personnes. Si l’expatriation continue de séduire de plus en plus de Français, pour autant un départ à l’étranger, notamment dans le contexte sanitaire actuel, ne s’improvise pas. Santé, prévoyance, retraite, impôts : chaque pays ayant ses spécificités, il est important de bien préparer son expatriation.
Quel que soit son statut et sa situation personnelle, une expatriation se prépare minutieusement afin d’éviter toute déconvenue sur place et se prémunir en cas d’accident de la vie (maladie, décès, divorce, etc.). Construire son patrimoine et le développer dans la perspective d’un retour en France sont également des éléments à prendre en compte lorsqu’on entame une démarche d’expatriation.
Choisir une protection sociale adaptée au pays d’expatriation
La protection sociale dont va pouvoir bénéficier un expatrié et ses proches varie selon le pays d’expatriation, sa situation familiale et professionnelle (expatrié, détaché, contrat local ou chef d’entreprise). Il est donc nécessaire avant de s’expatrier de bien vérifier les différentes couvertures afférentes à son nouveau statut car dès l’arrivée dans le pays d’expatriation, ce sont les règles de protection sociale du pays d’expatriation qui s’appliquent. Si l’existence de conventions bilatérales de sécurité sociale ou de règlements propres à l’Union européenne facilitent le passage du régime français au régime local, il est néanmoins très important de faire le point sur sa protection, et dans la plupart des cas, de la compléter par des garanties complémentaires en santé et en prévoyance pour éviter de mauvaises surprises. De même, pour éviter les délais de carence au retour en France, continuer à cotiser pour sa retraite et bénéficier du régime de l’Assurance Maladie française, il est possible et recommandé d’adhérer à la Caisse des Français de l’étranger (CFE), et cela dans l’optique d’assurer une continuité dans les prestations. Par ailleurs, lors d’une expatriation, la plupart du temps, le conjoint est obligé de quitter son travail, se retrouvant temporairement sans ressources. Réaliser un bilan social et retraite est donc primordial pour préserver au maximum les droits de chacun des membres de la famille.
Se prémunir contre les accidents de la vie
Souvent les couples pensent que si le mariage a été contracté en France, ils sont automatiquement soumis au régime légal français par défaut. Or, cela n’est pas le cas car à partir du moment où le couple s’expatrie, ce sont les règles de Droit International Privé (DIP) qui s’appliquent pendant le mariage et sa dissolution. Ainsi, en fonction de la date du mariage, la durée et le lieu d’expatriation, un couple peut changer plusieurs fois de régime matrimonial. Par exemple, un couple marié avant 2019 qui s’établit dix années consécutives en Angleterre sera soumis au régime matrimonial anglais. Ce qui signifie l’application du régime de la séparation de biens par défaut et non le régime légal français de la communauté réduite aux acquêts. Il est donc important, avant le départ, de fixer définitivement le régime matrimonial. L’application depuis le 29 janvier 2019 du nouveau règlement sur les régimes matrimoniaux simplifie l’ensemble de ces règles, notamment en supprimant la mutabilité automatique du régime matrimonial, et donnant le choix de la loi applicable.
S’agissant des successions internationales, elles sont régies par un nouveau règlement européen du 17 août 2015. Il applique le principe d’unité de la loi successorale à tous les biens, évitant ainsi le morcellement de la masse successorale entre plusieurs pays, tout en précisant que la loi applicable sur le plan civil est celle du pays de la résidence habituelle du défunt. Si la loi est jugée défavorable par rapport à celle du pays de sa nationalité, il est possible pour le couple expatrié, d’établir auprès d’un notaire une déclaration de loi applicable, et de bénéficier ainsi d’une Professio Juris.
Gérer ses finances et son patrimoine
Est-ce que l’on est résident ou non-résident fiscal ? Existe-t-il une convention fiscale entre la France et le pays d’expatriation, permettant d’éviter la double imposition ? Si l’on est non-résident fiscal, seuls les revenus issus de source française sont imposés. En fonction de la durée de l’expatriation et des nouvelles obligations fiscales afférentes aux pays d’expatriation, il est important de (re)définir ses objectifs patrimoniaux : préparer sa retraite, préparer les études des enfants, protéger son conjoint, ce qui permettra de mieux choisir les véhicules d’investissement français ou locaux les plus appropriés. Parce que bien souvent les expatriés ont une capacité d’épargne supérieure aux résidents (revenus plus élevés, imposition plus faible, etc.), choisir d’investir dans un bien immobilier en direct, en nue-propriété ou par le biais de SCPI, est également une excellente opportunité d’anticiper et de préparer son retour en France. Car près de 80 % des expatriés reviendront tôt ou tard en France.